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Incontournable Manga Janvier 2023



Je découvre ce manga tard dans l'année, mais je me réjouit de trouver une nouvelle série qui s'articule sur des évènements et des faits historiques, à l'instar de certaines autres séries qui ont un fort fond historique, comme la série Arte, Brides Stories ou encore Les Carnets de l'apothicaire.



Pour ce que j'en comprend en faisant quelques recherches. "Les saisons d'Ohgishima constitue la troisième partie d'une sage en trois actes, avec "Le dernier envol du papillon" en première partie, mettant en scène la courtisane Kicho dont on entends parler dans le présent manga.La série en format manga de "La Lanterne de Nyx" qui prend le relais, avec Miyo, une orpheline japonaise qui est appelée à connaitre la culture française de très près. La série se déroule à partir de 1878, donc après le présent roman.



Nagasaki, 1866, à la veille de la révolution de Meiji et de la fin de l'ère Ed. Tamao a 14 ans et elle est apprentie pour une courtisane. C'est également le sort qui l'attend quand elle sera en âge. Avec Taki, une femme d'expérience du milieu et Sakunosuke, la courtisane en question, Tama part pour Dejima, un quartier de la ville de Nagasaki bâtit sur une île artificielle, où résidaient les étrangers occidentaux, notamment les Néerlandais et les Français. C'est un lieu où les influences étrangères se mêlent à la culture japonaise, véritable mosaïque de personnages de divers groupes sociaux et de groupes ethniques. Tama et les deux femmes vont vivre chez Hartman, un hollandais au tempérament doux.Au rythme des saisons, elles feront la connaissance de divers personnages. En outre, les temps semblent vouloir changer: Nous sommes à la veille d'une révolution sociale et certains groupes sociaux pourraient sortir de leur aninymat, alors que d'autres risquent de tout perdre. Surtout, pour les femmes, les options sont peu nombreuses. C'est une véritable incursion dans un Japon encore très méfiant envers les étrangers, mais qui possède une culture fascinante.



Il y a plusieurs aspect du Japon du 19e siècle que je ne connaissais pas. J'ai été plutôt surprise d'apprendre que des japonais chrétiens avaient vécus dans le secret de leur confession religieux durant cette période. Si je connaissais la culture artistique des Geishas, je ne connaissais pas les kamuros. Vendues par leur famille pauvre, les kamuros étaient de jeunes filles destinées à la prostitution dans le quartier des plaisirs. C'était un système plus complexe qu'il n'y parait, avec des contrats notamment. Comme elles ne pouvaient prendre de clients avant l'âge de 14-16 ans, elles servaient de domestiques à leur aînées, à titre "d'apprenties". Il y aura, au cours du manga, des petites notes de l'autrice sur fond blanc appelées "La Boîte à secrets de Dejima", dans lesquelles nous allons en apprendre sur la politique, la société et même le commerce de l'époque. De nombreuses annotation en bas de page ponctuent aussi le récit, et ces précisions sont fort appréciées pour en apprendre sur le contexte et la culture d'alors. Surtout, les précisions sur les termes spécifiques sont appréciées.



Tama est une kamuro, on peut donc imaginer à titre d'adultes que son avenir n'est pas réjouissant. Même si, à première vue, les femmes des quartiers des plaisirs ne semblent pas maltraitées, reste de ne pas avoir le choix de vendre son corps est injuste. Une décision d'autant plus triste que Tama sait à quoi elle fera face, sans connaitre les détails non plus. Pour les personnages occidentaux, la situation de Tama les émeut beaucoup et la plupart cherchent à rendre sa vie plus douce. Il faut dire que Tama détonne des autres personnages avec sa gentillesse sincère, sa joie de vivre, son émerveillement facile et son tempérament tranquille. Une jeune fille adorable et serviable, qui a un contact facile avec les autres. Elle a une broche en forme d'oiseau avec laquelle elle converse parfois.



Entre autres personnages notables, nous avons le cuistot Ganji, qui a l'air un peu bourru avec ses sourcils froncés, mais qui est très gentil , au fond. Il adopta Momo, enfant illégitime d'une amie prostituée. Aussi, Ganji est de confession chrétienne, un "kirishitan", un secret qu'il se doit de garder, puisque cette religion est illégale au Japon à ce moment là. Néanmoins, sa rencontre avec Yasuke, un jeune kirishitan qui rêve de devenir prêtre, va bousculer quelque peu ses perceptions.



Le docteur Thorn est aussi au compte des personnages qui apprécie Tama. On comprend qu'elle le connaissait déjà, mais comme je n'ai pas lu les deux séries précédentes de l'auteur, je ne sais pas si j'ai raté quelque chose de leur relation. Il voit en Tama une curiosité intellectuelle qui mérite d'être nourrie et se désole du sort qui l'attend. C'est lui qui lui a offert le tablier pour enfant en dentelle que Tama porte sur la couverture du manga.



Slamet est issu d'une colonie des pays-bas, il est donc noir de peau et n'a pas les contraintes des autres africains, car l'esclavage y a été abolit. C'est un gentil bonhomme jovial fait le commerce de perles précieuses avec des commerçants du quartier. Slamet forme un trio avec deux autres jeunes personnages: Victor, jeune français malheureux dans son milieu, dans lequel son père a de grandes attentes et sa marâtre est dure avec lui, ainsi que Momo, métis japonais-occidental adopté par Ganji. Les trois rêvent de se partir en affaires. C'est vraiment intéressant et touchant de voir un trio aussi disparate que le leur. Momo cherche a s'élever au dessus de sa condition et a comme Slamet l'avantage de parler les deux langues courantes. Pour Victor, c'est pas encore tout-à-fait ça, mais il semble progresser sur son japonais parler. Aussi, il a le béguin pour Tama, avec qui le premier contact a été chaleureux.



Kojiro Shimada est un samouraï, mais aucunement snob ni condescendant. Au contraire, il traite chacun chacune avec respect et préfère parler de la beauté des lames que de leur potentiel mortel.



Enfin, il y a "Dame Kei" ( qui aimerait se faire appeler ainsi par Ganji) qui est une mystérieuse femme semblant doté d'un féroce caractère, d'une intelligence vive et qui semble être la mère biologique de Momo. Je dit "mystérieuse" car on ne devine pas facilement ses pensées et elle semble plus que simple fille de joie. Kei a peut être été vue dans la série précédente, mais ce sera son avenir et non son passé. Comme "La lanterne de Nyx implique Momo, j'imagine que ce serait logique d'entendre parler de Kei.



Pour avoir déjà lu "L'amant" de la même autrice, adaptation du roman éponyme de Marguerite Duras, je retrouve donc la plume particulière que j'y avait découvert. C'est étonnant comment ces personnages si gentils et doux ont des faciès si durs et anguleux, avec des yeux souvent tombants et surmontés de généreux sourcils. Madame Taki a particulièrement l'air fatiguée et les femmes en général ne ressemble aucunement aux filles de shojo aux yeux complètement disproportionnés, au nez quasi absent, au corps de poupée barbie et aux cheveux beaucoup trop "plaqués" que j'ai souvent vu ( trop souvent). Honnêtement, je préfère le genre Seinen, avec ces plumes plus réalistes comme celle de Madame Takahama, ne serait-ce que pour la fraicheur et le sérieux que ça amène au récit.



Puisqu'on parle du graphisme, je trouve le tout vraiment beau. Les textures sont variées, les effets de clair-obscur maitrisées et on reconnait facilement chaque personnage, puisque leur visage varie suffisamment de l'un à l'autre. Ce sont des cases bien remplies et des décors omniprésents que nous avons ici. Il semble y avoir beaucoup de recherche dans l'élaboration des décors, surtout compte tenu de l'époque et de la particularité du manga à se tenir dans un quartier cosmopolite.



Quand à l'action, il y en a pas mal, malgré un rythme relativement tranquille. Chaque personnage jongle avec ses enjeux et comme ils sont nombreux et interconnectés, on a l'impression que ça foisonne de vie. Le tout se déroule sur quelques mois, cependant. Autre particularité, les marges sont noires, ça confère au manga un air de vieux recueil de photos.



À travers cette histoire, c'est tout un monde qu'on découvre, dans ses nuances et ses contradictions. Je remarque aussi que les hommes avaient toute sorte d'alternatives dans la vie, mais les femmes, très peu. Les classes sociales sont également plutôt étanches. En outre, on arrive à un moment charnière de l'Histoire japonaise, et malgré cela, le quotidien du quartier de Dejima semble relativement tranquille. On ne sent pas que tout va imploser sous peu, sauf sur la question de l'ostracisation des croyants chrétiens japonais. Peut-être en sauront-nous davantage dans le tome 2? Enfin, Tama évoque à quelque reprise que son temps est compté. Au début, je pensais que cela relevait de son "temps en tant qu'enfant", mais je pense qu'il y a une autre raison à ce compte à rebours.



J'ai bien hâte de lire les autres séries qui ont précéder ce tome-ci et bien sur, j'attends la suite avec impatience également.



Pour un lectorat adulte ( seinen), mais qui peut convenir aux ados, surtout si l'Histoire de ce pays les intéresse.



Pour les profs et les biblios: Mit à part quelques femmes en partie dénudées, il n'y a aucune violence outrancière, pas plus que de gros mots ou scènes sensibles. Si la condition des femmes peut être choquantes, le tout est amené de manière très délicate et sans violence.

Shaynning
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le 4 sept. 2023

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Shaynning

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