Tatie Danielle fait de la résistance !

Le succès des Vieux Fourneaux devrait profiter à cet album qui met Madeleine, une vieille femme aveugle et sénile en personnage central de ce one shot.
Un album avec beaucoup de qualités et très charmant qui se lit comme on regarde un téléfilm régional un vendredi soir sur France 3, (c'est moins péjoratif que ce qu'il semblerait, il y'en a des très regardables !) qui commence comme un album d'Astérix ("ils sont frais mes poissons !") sauf qu'ici c'est une vieille carne qui résiste encore et toujours à l'envahisseur : elle refuse de quitter sa maison en bord de falaise, menaçant chaque jour un peu plus de finir à la mer.

De jolis paysages, l'air frais de la Normandie et une intrigue drôle et touchante sont les atouts de cette histoire qui aurait eu beaucoup plus de force sans cette galerie de personnages caricaturaux vus cent fois (le maire irascible et sa femme castratrice, le tribunal populaire du PMU, le pompier compréhensif, le chat ressort-comique répétitif...) Ne manque plus que le docteur bourru mais sympa pour clore le casting.

Mais ce qui m'a réellement empêché d'apprécier cette BD autant que je l'aurai souhaité, c'est que malgré son deuil difficile et son handicap : la petite vieille a tort ! Sa maison ne va pas être saisie pour être rasée afin d'y construire un autoroute ou un supermarché, on ne veut pas l'expulser de gaieté de cœur : même s'il est pressant et pas très malin, le maire veut juste la protéger d'une mort imminente. Comme on a du mal à donner raison à la mamie, cela rend certaines scènes plus embarrassantes que percutantes (ex: quand la vieille menace la mairie avec des mines)...
On passe à côté de l'impact comique et émotionnel puisqu'à aucun moment on ne se range de son côté. Si la situation de départ avait été injuste pour elle, l'empathie aurait été de mise : mais ce n'est jamais le cas et on peine à trouver ses réactions justifiées... c'est une casse-bonbon ! Dommage car on tenait là une héroïne originale, avec un passé intéressant, un caractère bien trempé et quelques passages de lucidités glaçantes. (la visite de la maison de retraite)
Le dessin aéré et doux convient très bien au récit, et certaines scènes sortent vraiment du lot (le dialogue entre le pompier et la mémé sous l'orage à la fin est très réussi) un joli clin d’œil à Alain Bashung que j'ai trouvé moins forcé que celui sur Daredevil.

Un album que j'aurai aimé apprécier et défendre un peu plus mais qui m'a laissé un petit goût de déception malgré de belles idées et une réalisation visuelle impeccable.

PS : Qu'on m'explique pourquoi Bruno Duhamel dessine toutes ses respectables petites vieilles avec des chaussures à talons si hauts !! Madeleine, 95 balais et ces escarpins rouges et dans la maison de retraite il y'a carrément une petite vieille avec des plateformes-shoes dignes de Lady Gaga. Un petit fétichisme à confesser ?