Ces jours qui disparaissent de Timothé Le Boucher propose un postulat intrigant : son héros découvre qu’il perd des jours de sa vie. Il se réveille le matin, et une journée entière est passée sans l'avoir vécue. Ces jours disparus, c'est son « double » qui les vit, un même physique mais la personne n’est plus la même, au sens premier. Une autre personnalité habite son corps.
L’entourage amical et familial se trouve fortement remué par la situation, le doute s’installe. Un choix doit vite s’opérer : s’adapter ou non. Cette forte perturbation d’un repère qu’on pensait inaliénable amène des conséquences diverses. La tragédie opère. Un foisonnement de questions et de situations se révèle, et le héros comme son environnement naviguent dans un tourbillon existentiel.
Un soupçon fantastique habille le scénario, sujet à de surprenantes révélations, mais l’ensemble reste ancré dans une réalité tangible, suffisamment pour qu'on se rapproche au plus près du personnage principal.
Notre rapport aux temps est questionné, la valeur que l’on attribue à chaque instant de notre existence aussi. L’effet miroir est saisissant. L’introspection s’opère naturellement chez le lecteur, poussant ce dernier dans une quête de soi intime.
Malgré une première partie plus faible, et un dessin simple, les 200 pages s’enchaînent. Voilà notre propre rapport au temps chamboulé. La lecture devient une expérience personnelle. On ne peut que penser à la magistrale série Six Feet Under, pour les thématiques abordées, mais aussi lorsque que l’on découvre les surprenantes dernières pages. Un coup dans l’estomac puis dans le cœur, on se retrouve hébété. Et c’est aussi perturbant qu’agréable.