Celle qui parle par Christine Deschamps

Une BD qui a priori a tout juste mais peine à déclencher mon enthousiasme. Du côté des qualités, il y a bien sûr le choix du sujet et l'angle d'approche féminin : une jeune mexica est trahie par sa propre famille, avec l'assentiment contrit de sa mère, et vendue comme esclave à une autre tribut, alors qu'elle est la fille d'un cacique. Commence alors un destin hors du commun, malgré la banalité de la domination masculine, toutes civilisations confondues. D'abord esclave, elle devient petit à petit, grâce à son don pour les langues et à l'intercession de quelques hommes moins bestiaux que les autres, une personne ressource dans l'entreprise de conquête des Indes par les espagnols. Déjà, ça suffirait à faire saga. Mais l'autrice parvient à rentrer discrètement dans la sphère secrète des femmes, celle que leur solidarité, pas toujours exemplaire, a toujours été soustraite à la sagacité des hommes (pour beaucoup parce qu'ils s'en foutaient royalement). Malgré tout, en dehors de la conscience de leurs oppresseurs, les soumises ont souvent maintenu à flot l'humanité par leurs alliances invisibles et la dignité de leurs sentiments. Et ça, c'est plutôt palpitant. Pourquoi alors, une fois refermé le livre, il reste si peu des émotions qu'il tente de susciter ? Je dirais que le dessin, assez plat, n'y est pas pour rien, mais on a vu d'autres styles aussi épurés parvenir à marquer davantage. Un découpage un peu poussif par endroits ? Certains poncifs dans l'histoire, malgré de très bonnes idées ? Je ne saurais trop dire. Au final, une lecture plutôt agréable, mais qui ne transporte pas vraiment. Après, c'est question de goûts.