This could have been beautiful

Je devais être au collège quand j'ai découvert Bleach. Comme la plupart des gens de ma génération, je pense. Aujourd'hui, je viensde terminer ma relecture. Plus mature, peut être moins facilement impressionnable qu'à l'époque, je dois quand même avouer que je n'ai pas boudé mon plaisir.

Mais commençons par ce qui ne va pas, histoire de terminer par une bonne note... Comparons Bleach à ce qui est comparable : pourquoi ses deux camarades du Big 3 (piédestal des shonens les plus populaires des années 2000 - 2010) sont devenus des monstres du Neketsu alors que notre sujet a été laissé pour compte ? Le parallèle est peut être simple, mais il me semble que les forces respectives de ces deux autres mangas constituent justement les principales faiblesses de celui de Tite Kubo...

Masashi Kishimoto (Naruto), pour commencer, excelle dans le rythme de son histoire. Son évolution est d'une linéarité plus que rare dans ce type de mangas. On sort presque d'un système d'arc, il ne s'agit plus d'entamer un récit, de le clore puis de trouver un nouvel élément perturbateur...

Eichiro Oda (One Piece), lui qui n'a plus rien à prouver aujourd'hui, va puiser son intérêt dans la cohérence de son univers et dans la suggestion des mystères qui l'entourent.

Tite Kubo, à l'inverse, souffre d'un problème de rythme qui saute aux yeux... Les arcs sont clairment découpés et investis de façon beaucoup trop inégale : intro / Soul Society (consolide assez bien l'univers) / Aizen (beaucoup trop long) / Fullbringers (expéditif) / Quincies (intervient assez tard pour me laisser incrédule). Une idée qui illustre assez bien se problème repose justement sur le dernier arc. Qu'est-ce qui justifie qu'il s'agisse du dernier ? N'est-ce pas qu'une histoire supplémentaire, au delà de son ampleur donnée comme supérieure, mais de façon ultra poussive...?

Le fait d'avoir des arcs très marqués n'est pas toujours un problème. Mais c'en est un pour Kubo. A chaque arc, il crée quelque chose, ajoute une idée à son univers. Soit. Dommage donc que chacune de ces idées soit là pour l'effriter plutôt que de le renforcer... Quant à la structure des arcs, elle est répétitive à souhait. Ichigo perd ses pouvoirs, les récupère en trouvant une nouvelle source, s'entraîne, se bat et sauve ses comapgnons.

L'univers de Bleach, c'est quelque chose... Ou du moins c'aurait pu être quelque chose, si l'auteur n'avait pas pris tant de soin à tuer la viabilité de ce qu'il avait créé. Trop de questions me trottent en tête pour ne pas tuer ma crédulité (Comment se fait véritablement la réincarnation au soul society ? Celle sur terre ? Comment les shinigalmis vieillissent ils ? Naissent ils enfants ? Certains indices nous indiquent que oui, d'autres nous laissent entendre que l'on conserve l'âge de sa mort..?) On dirait que je pinaille. Mais ces éléments sont à la base du concept de l'histoire. Difficile de créer un univers solide sur une base aussi fragile. Sans parler de cette tendance à expliquer les incohérences par des révélations poussives à l'excès... Je ne crache pas sur les auteurs qui n'écrivent pas la fin de leur histoire à la première ligne. Mais puissent-ils nous y faire croire. Je serai le premier à me voiler la face si l'occasion m'est donnée. Là, c'est impossible...

Pourtant j'aime Bleach. Sans doute la nostalgie parle-t-elle, dans une moindre mesure. Mais en y revenant, non sans en être d'autant plus frustré par ces échecs, j'ai quand même pris un sacré pied. Parce que Bleach, avec son écriture loin d'être fine, ne manque pas de charisme pour autant. Entre son charadesign et son esthétisme fascinants, ses introductions de chapitre et leur découpage incroyablement cinématographique, ses personnages féminins hauts en couleur, badass à souhait (bien que leur développement et leur nombre soit encore imparfait, c'est assez rare d'avoir de tels persos féminins dans des neketsu aussi populaires pour le relever...), ses tapes dragonballesques qui envoient les protagonistes percer des montagnes...

Ca se relira avec plaisir dans ma vie. En attendant, ça m'a tout de même mis l'eau à la bouche pour le développement d'une suite au dernier "Burn The Witch" de l'auteur...