"Une balle de Smith & Wesson dans la tête, je vous dis!"
Battle Royale est un manga d'une quinzaine de tomes, tiré d'un roman qui a aussi été adapté en film, et qui met en scène des collégiens (des 3èmes) d'un pays sous dictature tirés au sort pour s'entretuer sur une île. Dans l'hypothèse où ils refuseraient de se prêter au jeu, une bombe sous forme de collier est accrochée à leur cou, et donc s'ils ne s'entretuent pas : boum.
La première chose qui me laisse perplexe est que ces collégiens ont pour la plupart la carrure de jeunes adultes d'entre 20 et 30 ans. La deuxième chose qui me laisse perplexe c'est la fascination morbide qu'a le dessinateur pour les yeux. C'est vrai, il n'y a pas un tome qui n'a pas son Gros Plan sur un œil crevé, arraché, sorti de son orbite pour pendre mollement sous le nez de son propriétaire...
B.R. dépeint une jeunesse qui n'a pas forcément besoin d'une mission de survie sur une île perdue pour être violente, comme l'illustrent les nombreux flash-backs associés aux différents personnages : une grande partie d'entre eux se battent dans la rue (face à des gangs "mafieux" même, me semble-t-il) ou se prostituent. De fait, toute la série traite avant tout et d'un point de vue pour le moins cynique les thèmes de violence et de sexe : chaque mort est donc dessinée avec un souci du détail qui veut nous prouver qu'on n'est rien d'autre que des morceaux de bidoche, mon pote, et gorgés de sang prêt à gicler à la moindre entaille s'il te plaît. À titre d'exemple, si une balle t'érafle le gras du bide, c'est tous tes intestins qui vont jaillir, alors garde ton rouleau de scotch dans la poche, on sait jamais. Côté sexe, c'est à peu près le même discours. Il y a cette adolescente (?) qui couche avec ce gamin (ils ont théoriquement le même âge mais...) qui est mourrant, et l'acte terminé elle lui plante une serpe dans la tête, mais vous savez au départ elle voulait l'aider, c'est juste que voilà, ses instincts primaires ont eu le dessus, et puis après tout on est que des hommes, on a tous nos moments de faiblesse...
À côté de ça, il y a quelques personnages bien niais, qui eux croient en la justice, l'amitié, tout ça. Ils ne sont certes pas très nombreux mais ils existent, et ne se font même pas tous tuer dès le début. Un contraste qui laisse lui aussi perplexe avec cette majorité d'individus apparemment avant tout motivés par leurs pulsions meurtrières et sexuelles.
Dans B.R. il y a trois instances : le réalisme cru (les morts, le sexe, les bas instincts...) ; la morale niaise qu'on se demande ce qu'elle fout là, style faites l'amour pas la guerre (amour n'étant donc pas prostitution, viol, etc), qui apporte déjà un double discours assez gerbant à la série ; et enfin tous les trucs action/WTF avec pêle-mêle : les 3èmes qui ont des corps d'adultes, le type qui se relève sans les mains après s'être pris une décharge de fusil à pompe (dans son gilet pare-balles, soit) et une balle de smith & wesson dans la tête (une balle de smith & wesson bordel, c'est un magnum! D'autres se sont vus arracher la tête pour moins que ça!), et surtout le champion d'arts martiaux qui crée des tornades avec les mains et a l'agilité d'un chevalier du Zodiaque, champion dont l'adversaire imite et améliore les techniques en les ayant simplement observées une fois (là encore comme dans les Chevaliers du Zodiaque, ou Dragon Ball Z, j'hésite. Les deux peut-être.).
Bref, je ne sais pas ce que valent le roman et le film, mais le manga de B.R. me semble clairement destiné à des ados, potentiellement intéressés par le gore et le sexe. Et encore, ça me fait mal de réduire les ados à ça. Il me semble que j'étais encore ado quand je l'ai lu, et déjà je trouvais que B.R., c'était un peu nawak...
