Ce tome regroupe 2 miniséries consacrées au début de l'organisation BPRD.


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- BPRD 1946 de Joshua Dysart et Mike Mignola, avec des dessins de Paul Azaceta, initialement paru en 2008


L'Allemagne nazie n'est plus, Berlin est tombée et a été partagée en 4 zones : une pour les français, une pour les américains, une pour les russes et une pour les anglais. Trevor Bruttenholm débarque dans le secteur américain pour mener une mission pour le compte du BPRD (Bureau for Paranormal Research and Defense) qui vient tout juste d'être créé. Son objectif est de recueillir le maximum d'informations sur les armes surnaturelles développées par le troisième Reich, à partir des archives recueillies dans les décombres. Il reçoit l'aide de 5 soldats peu commodes qui ne comprennent pas pourquoi ils ne peuvent pas rentrer chez eux maintenant que la guerre est finie. Heureusement pour Bruttenholm, l'un d'eux été présent lors de la première apparition d'Hellboy à East Bromwich en décembre 1944 (dans Seed of Destruction). Malheureusement les russes ont commencé cette opération de déminage (et récupération) des armes de sorcelleries avant et Bruttenholm se retrouve à éplucher des dossiers sans intérêts. Il tente un rapprochement avec les russes et se casse les dents sur leur chef : une jeune demoiselle prépubère jouant à la poupée. Le travail de paperasse finit cependant par mettre au jour des livraisons de nitrogène liquide pour un asile d'aliénés en théorie fermé depuis plusieurs années. Bruttenholm découvre les restes encore très vivants de l'opération "Project Vampir Sturm".


Ce tome constitue donc une coupure dans l'histoire générale de la guerre contre les monstres grenouilles. Mike Mignola a bâti les bases de l'histoire avec Joshua Dysart, et il l'a laissé terminer le récit et écrire les dialogues. Dès les premières pages, la patte de Mignola est aisément reconnaissable : des nazis, une vampire, des expérimentations de savant fou, etc. Pour cette histoire particulière qui ne s'inscrit pas directement dans le fil de la série, il a choisi de travailler avec un autre scénariste que John Arcudi. Joshua Dysart est un scénariste à part entière, plus connu pour son travail sur la série Unknown Soldier. Ce monsieur très compétent doit faire face à 2 difficultés majeures : (1) c'est sa première incursion dans l'univers d'Hellboy + (2) seul Trevor Bruttenholm est un personnage déjà établi. À mon goût, Dysart n'arrive pas à faire exister les personnages au-delà d'un ou deux traits de caractère peu nuancés. Bruttenholm pourrait être remplacé par n'importe quel autre agent versé dans les arts occultes, ça ne ferait pas beaucoup de différences. Seul surnage son intérêt pour Hellboy. De la même manière, le personnage de Varvara perd tout intérêt une fois que sa vraie nature est révélée. En fait, les indications et les créations de Mignola apparaissent clairement comme morceaux de choix au milieu d'un brouet peu appétissant concocté par Dysart pour lier les éléments de Mignola entre eux. Il faut dire que Dysart n'est pas aidé par une distribution de personnages sans aucune épaisseur et en l'absence d'une dynamique d'équipe. Oubliez les relations complexes qui unissent Liz Sherman, Abe Sapien, Johann Kraus, Ben Daimio et Kate Korrigan ; ici 3 personnes qui sont des inconnus les unes pour les autres collaborent tant bien que mal sans vraiment créer de lien entre elles.


Les illustrations ont été confiées à Paul Azaceta, lui aussi un nouveau pour les aventures du BPRD (déjà vu dans des épisodes de Spider Man et de Daredevil). Le premier épisode commence plutôt bien : Azaceta singe avec un peu de personnalité le style mangé par les à-plats de noir de Mike Mignola. Et puis page après page, les visages perdent en précision pour se limiter à des esquisses à gros traits ayant perdu toute sensibilité, toute nuance. Il devient impossible de distinguer une émotion sur ces visages figés. Les monstres voient leurs caractéristiques fondre au soleil pour être de plus en plus génériques et insipides. Seuls les décors conservent une identité marquée du début jusqu'à la fin. Comparé au travail du dessinateur habituel du BPRD (Guy Davis), ces pages manquent de nuances et précision. Même Nick Filardi (le metteur en couleur) applique des couleurs sur de grandes surfaces à la truelle, sans aucune nuance. Les teintes sont agréables et se marient bien à l'histoire, mais le travail est grossier et il noie chaque page dans une boue uniforme peu plaisante à l'œil.


Après les 5 épisodes de la minisérie, le tome se clôt par une histoire quelconque d'objet magique possédé avec Trevor Bruttenholm, parue à l'occasion du Free Comics Book Day. Cette histoire est réalisée par la même équipe que le reste. Une histoire manquant cruellement de finesse.


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- BPRD 1947 de Mike Migola & Joshua Dysart pour le scénario, avec des dessins de Fabio Moon & Grabiel Bá, initialement paru en 2009


Un train de prisonniers allemands arrive à la gare de Nuremberg en 1947. 2 soldats américains ouvrent le fourgon où ils étaient parqués et découvrent un carnage sanglant. Trevor Bruttenholm est installé dans une base militaire au Nouveau Mexique et il épluche ses dossiers lorsque Varvara l'interrompt dans ses pensées. Ils connaissent l'un et l'autre le coupable : le baron Konig. Dès le lendemain, Bruttenholm demande à Margaret (sa secrétaire) de lui amener les fiches des agents pressentis pour intervenir sur le terrain : Jacob Stagner, Simon Anders, Frank Russell et Gabriel Ruiz. Ils sont donc envoyés en mission à Annecy, au bord du lac, pour effectuer des recherches à la bibliothèque et enquêter au château Konig. Parmi les 4 agents, il y en a un qui est plus consciencieux que les autres ; il commence l'enquête tout seul pendant que ses camarades passent une bonne soirée au bar local avant de se mettre au travail le lendemain. Le surnaturel ne tarde pas à faire son apparition et à emporter les agents dans son sillage.


Mike Mignola et Joshua Dysart continuent de narrer les débuts du BPRD. Suite au carnage du tome précédent, Bruttenholm doit composer une nouvelle équipe. Mais cette fois-ci, il n'intervient pas sur le terrain ; il donne des ordres depuis la base aérienne du Nouveau Mexique, tout en gardant un oeil plus ou moins distrait sur Hellboy encore enfant (mais déjà avec un goût prononcé pour les pancakes). Dysart fixe en 1 page les traits de caractère principaux des 4 agents de terrain. Puis il développe la personnalité de Simon Anders par petites touches au fur et à mesure des situations auxquelles il est confronté. Cette façon de procéder aboutit à un résultat très organique (par opposition à artificiel) qui permet au lecteur de découvrir petit à petit cet individu remarquable. Il y a donc une nette amélioration en ce qui concerne la psychologie des personnages (par rapport à "1946")


En ce qui concerne l'histoire globale, il est facile de percevoir la patte de Mignola, au-delà des simples monstres rencontrés. En particulier, il explique dans une page de texte comment il a pensé visuellement l'enlèvement de Simon Anders dans la réalité surnaturelle. Le lecteur retrouve à plusieurs reprises le talent exceptionnel de Mignola pour conjurer des monstres traditionnels dans des situations et des formes qui le sont moins, tout en respectant leur nature. Là encore, ce tome fait plus que mettre quelques ingrédients dans la marmite, il propose un scénario construit avec plusieurs retournements des situations inattendus.


Paul Azaceta a été remplacé par les frères Grabiel Bá et Fabio Moon (ayant également illustré Daytripper & Casanova). Les 2 frères se partagent les séquences entre les 2 mondes. Ils ont un style assez proche ce qui évitent les hiatus entre les 2 types de séquences. Pour les passages dans le monde réel, il y a une utilisation des à-plats de noir qui évoque celle de Mignola, sans pour autant les singer. Les séquences dans l'autre monde sont plus aériennes. Bá et Moon ont le sens du détail juste. Ils personnalisent chaque individu et chaque élément de décors grâce à plusieurs détails précis, sans encombrer les cases. Les pages bonus montrent qu'ils ont effectués des recherches pour que les éléments historiques soient justes et authentiques. Ce que j'ai moins apprécié, c'est l'aspect un peu lâche, un peu trop esquissé des séquences dans l'autre monde. Ce mode de représentation m'évoque plutôt des bandes dessinées humoristiques que des situations à mi chemin entre l'horreur et le fantastique. Néanmoins ce style graphique installe une ambiance très particulière et pas désagréable.


Le tome se clôt avec une aventure de jeunesse de Bruttenholm en 1938, en 8 pages, écrite par Mignola et Dysart et dessinée par Patric Reynolds. Comme d'habitude avec les histoires courtes de Mignola, le lecteur reste sur sa faim et ce n'est pas cette nuit passée dans une église qui me fera changer d'avis.


Globalement, le lecteur retrouve ici les éléments qui rendent les séries d'Hellboy et du BPRD uniques, à commencer par un amour évident pour les monstres et les créatures surnaturelles qui transparaît à chaque page. Le scénario est assez élaboré et bien structuré et les dessins offrent une forte personnalité, avec un fort pouvoir d'immersion. À mon goût, cette aventure ne m'a pas permis de me familiariser assez avec les personnages pour que l'empathie soit prenante.

Presence
6
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le 24 oct. 2020

Critique lue 50 fois

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