La source asséchée

Tout comme Machine qui rêve, Aux sources du Z, bien qu'il conserva le droit de figurer sur le quatrième de couvertures de chaque album de Spirou et Fantasio depuis Franquin fut déclaré "non-canonique" tant il fut haï à sa sortie.

Personnellement, qu'une oeuvre soit bien ou nulle, je n'aime pas du tout qu'on déclare les histoires d'une saga "non-canoniques" simplement parce qu'une bande de haiteurs pseudo-fans de nombreuses sagas disent de certains opus "C'est de la merde, on n'en veut pas!". Déjà parce que la "décanonisation" n'empêche pas les opus en question d'exister et ensuite parce que, contrairement à ce qu'ils croient, les haiteurs refusent de s'imaginer que certaines personnes puissent aimer des opus qu'ils n'aiment pas. Résultat, quand il existe des fans d'opus impopulaires, ils sont tristes et peuvent être méchamment traités comme des "intrus" au sein des fandoms alors qu'ils sont censés y être pour s'amuser.

(De plus, étrangement, alors que, pour l'instant, la pire ère de Spirou et Fantasio est objectivement celle de Nic et Cauvin, personne n'a jamais demandé à ce qu'elle soit "décanonisée".)

Pour moi, ce qui compte, ce n'est pas le concept de canon et non-canon mais de se pencher sur les oeuvres qu'on aime et les savourer encore et encore avec plaisir peu importe qu'elles soient canon ou pas; et, surtout, de ne pas imposer ses goûts aux autres.

Sur ce, revenons à Aux sources du Z.

Si cet album n'est pas catastrophique, ce n'est, toutefois, pas le meilleur de Spirou et Fantasio. Pourtant, il y avait du potentiel avec une idée de voyage dans le temps très périlleux intéressant à la Retour vers le Futur 2 où il faut accomplir un acte vital pour sauver l'avenir tout en évitant de croiser son soi du passé pour ne pas mettre en péril le présent et le futur.

Sauf quand ça part d'une intention très discutable. En effet, l'histoire de cet album consiste à sauver cette chère Miss Flanner (une méchante BIEN PEU REPENTIE) d'une maladie mortelle qu'elle a attrapé à cause d'un accident scientifique. Comment? En évitant qu'il se produise dans le passé.

Et voilà! Rien qu'avec ce scénario, tout le message sur les sept étapes du deuil et le fait qu'il faut accepter que le mort est inévitable ayant été dit dans L'Homme qui ne voulait pas partir est foutu en l'air dans cet album. Et même, encore pire, dans Paris-sous-Seine, Miss Flanner elle-même avait accepté sa mort imminente et Champignac avait accepté qu'il ne pouvait rien y faire. Alors pourquoi ne plus être dans l'acceptation par la suite. C'est complètement incohérent!

Ainsi, ce récit peu réfléchi n'est qu'une succession de passages fan-services des adorateurs de Franquin pour les caresser dans le sens du poil. Tout ça pour trouver un objet précis à une certaine époque dans une suite de pages n'étant que du remplissage sans aucun sens avant d'arriver à l'objectif final.

De plus, les auteurs continuent dans leur misogynie avec une pauvre Seccotine se faisant embrasser de force par Spirou faisant juste ceci pour la déstabiliser et lâchement se tirer car elle lui fait "perdre du temps". GROS DEGUEULASSE!

Et pire encore, Zorglub et Champignac habituellement si charismatiques se comportent comme des adolescents immatures alors que leur confrère est mourante. RIP le respect!

De plus, la cohérence temporelle elle-même n'a aucun sens. Comment le trio Champignac, Zorglub, Flanner peuvent-ils être jeunes durant l'ère Franquin alors que Champignac est déjà censé être âgé à cette époque?

Comment le Spirou du passé et Miss Flanner peuvent-ils être tous les deux jeunes à la même époque alors que Miss Flanner devrait déjà être âgée, également, à cette époque?

Bref, cet album n'est rien de plus que du grand n'importe quoi et du fan-service totalement irréfléchi. De plus, le fait qu'il n'y ait que des références à Franquin montre un grand mépris injustifié envers les fans des autres périodes comme pour imposer aux fans d'ignorer les autres auteurs qui ne font pas du "vrai Spirou" alors que l'ère Tome et Janry a eu bien plus de succès que l'ère Franquin.

Certes, il y a quelques bons gags donnant le sourire mais ça n'est pas suffisant pour faire un album plaisant et intéressant.

À éviter!

Ce fut sur ce tome majoritairement détesté, à juste titre, que s'arrêta l'ère Morvan et Munuera. La place fut laissée à Yoann et Vhelmann réputés pour ne pas avoir créé les meilleurs albums de Spirou et Fantasio mais pas les pires non plus. Mais ça, c'est une autre histoire.