Flammes de démons

Ce récit très lovecraftien (Musées, objets maléfiques, franchissement de mondes, intellectuels effectuant d'horribles découvertes dans l'obscurité d'un cabinet de lecture, envoûtement, démons sanguinaires, religions antiques et maudites, sorciers...) confirme les qualités des auteurs.

Côté scénario, Mosdi enracine son imagination dans la mythologie aztèque: Xipetotec, "Notre Seigneur l'Ecorché", existe vraiment dans cette religion. Mosdi coordonne assez habilement les quêtes des différents protagonistes (Occultistes, police, Xoco, sorciers...). Les longues narrations descriptives sont largement émiettées, sur fond d'images qui font progresser l'action par ailleurs.

Côté dessin, Ledroit accentue l'obscurité nécessaire à l'action par la mise en scène d'un hiver rigoureux new-yorkais, où le blanc sale et le bleu glacé de la neige mettent en valeur le squelette des objets, tout en appesantissant l'atmosphère. Dans cette nuit-crépuscule quasi perpétuelle, le flamboiement d'yeux écarquillés par la surprise ou l'effroi apporte une note de peur qui se révèle durable. L'ordonnancement des vignettes dans la page prend le parti de superposer les références: assez souvent, plusieurs vignettes, plus ou moins juxtaposées, se superposent à un dessin de plus grandes dimensions qui constitue un arrière-plan. Cette déstructuration, cette multiplicité de lectures contribue à donner le sentiment de la complexité de l'intrigue. De très beaux fondus-enchaînés sont présentés: page 13 et page 31.

Le dessin joue sur les contrastes entre les bleus glacés, les ocres lumière d'enfer, et les verts sombres marmoréens. Lorsque l'action se précipite, les traînées et les éclaboussures de couleurs forment un contrepoint dramatique avec la netteté des décors.

Très réussi, même si la complexité de l'action nécessite parfois un surcroît d'attention pour identifier les personnages et leurs motivations.