(Je précise que je n'ai pas lu les tomes précédents ou suivants. Je n'ai aucune idée s'ils forment une série cohérente ou non. Je juge donc cet album pour lui-même).


Berlin, début des années 1980. Un homme, Ardeur, arrive de Varsovie. Il navigue au milieu de différents personnages étranges : des Français qui mijotent des choses étranges dans les sous-sols du Bode Museum (un des principaux musées d'art de Berlin) ; Jack Ventress, un agent britannique à la dérive qui, bien que constamment alcoolisé, à des ressources étonnantes et se montre très philosophe ; Gladwyn, un auteur britannique auteur d'un roman, The last wind ; une femme, Ida, une mystérieuse jeune femme. Lindell, et toute une série d'agents plus ou moins identifiés.


J'aime beaucoup le graphisme, qui rappelle les vieux celluloïds : il faut avoir connu les vieilles pellicules photos pour comprendre ce qu'a voulu faire l'auteur. La composition n'est pas exempte de défauts (notamment dans le placement des bulles pour faciliter la lecture, mais on s'y fait), mais j'aime beaucoup ces perspectives étirées et déformées, ou au contraire très froides.


Il est fait mention au détour d'une case de Stig Dagerman, journaliste qui a documenté l'Allemagne post-seconde guerre mondiale, et ce n'est pas un hasard. Il y a la même volonté de plonger dans les entrailles d'une société marquée par des événements historiques profonds. De fait, ce livre est profondément ancré dans Berlin : les déambulations d'Ardeur, qui passe de Berlin-ouest à Berlin-est, se suivent facilement pour qui connaît la capitale, et si l'itinéraire est facile à suivre, on apprécie d'autant plus la manière dont le héros se perd. Il s'agit d'errer, j'ai presque envie de dire d'apprendre à errer. Et tant pis si une histoire d'amour et un meurtre se mèle de la partie sur la fin : on aura vu Berlin, sa profonde cicatrice marquée par le mur, ses couloirs souterrains où s'entassent les clodos que des flics viennent déloger, ses bars sélects où les tantes se déchaînent, ses avenues bordés de monuments morts, son sentiment de déchéance, son atmosphère de recherche d'identité mystique.


C'est un livre fait à l'ancienne, sans calculer, sans tricher. C'est un livre décousu, imparfait mais habité.

zardoz6704
7
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le 5 mai 2024

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zardoz6704

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