XEU
6.7
XEU

Album de Vald (2018)

Vald présente XEU, son deuxième album studio. L’occasion de découvrir une inflexion thématique et une personnalité un peu plus complexe.
Note : vous pouvez consulter la chronique et nos autres chroniques rap ici : https://thesaurap.fr/albums/vald-xeu//



La prise au sérieux de Vald



Personne ne nait clown. Les clowns, humoristes, comiques et trolls sont les personnes les plus tristes au monde. Surabonder sa vie de second degré n’est pas un trait de caractère mais souvent l’évidence d’un problème intérieur bien plus profond. Cependant nul ne peut pousser Vald à devenir sérieux. Il aurait très bien pu s’enfermer dans son personnage de théoricien du complot, de comique et ne proposer que ce type de contenu (voir la chronique de NQNT). Cela aurait bien entendu fini par épuiser tout le monde, mais nul n’est forcé de s’ouvrir et de présenter qui il est réellement.


Vald va pourtant prendre ce pari avec XEU, un album aux quasi-antipodes de tout ce qu’il a pu nous proposer jusque-là. En effet, Vald va se faire beaucoup plus sérieux dans le propos, les thèmes, et délaisser en grande partie le conceptuel un peu mongol (Bonjour, Lézarman et Selfie en tête). Ce choix est salvateur puisqu’il va lui permettre de pleinement démontrer sa palette technique, musicale et artistique. Devenir sérieux est également l’occasion d’être soi-même pris au sérieux et se faire une place parmi les artistes, l’égo de Vald ayant pu être piqué de voir ainsi érigée une barrière étanche entre les rappeurs sérieux type Damso, puis lui, éternellement renvoyé au statut de blague.



La fête est finie



XEU commence avec le morceau Primitif, son très moyen mais qui sonne la fin de la récréation. Le flow est posé, loin des extravagances auxquelles nous étions accoutumés, le delivering est beaucoup trop scolaire et la production est très sobre. C’est avec Seum que le style Vald-Xeu va commencer à émerger et déteindre sur plusieurs morceaux (DQTP, Chepakichui, Rituel, Jentertain). Il se caractérise par une violence dans les termes, dans la production, très agressive, bercée de mélodies minimalistes et dans le flow. Les intonations et le ton employés apportent également une amplitude au son. Cut d’instru, flow hachuré et rimes multisyllabiques, tout semble être fait pour faire ressortir une violence et une impression brute. Dans cette combinaison Vald est très efficace, ces morceaux étant des points forts de l’album.


Malheureusement ceci ne va pas durer longtemps, les morceaux chantés autotunés passant à l’écoute mais sans grande transcendance. Possédé est bien organisé, Désaccordé est écoutable mais dans les deux cas les refrains insupportables diminuent le niveau. Clairement des morceaux dispensables.



Artiste triste



Le meilleur morceau de l’album est Réflexions basses, où Vald délivre un regard amer sur la célébrité et ses conséquences. La boucle de piano cristalline, à peine audible, est parfaitement calibrée au morceau. Pas de grandiloquence, juste un piano, des drums et un homme, légèrement alcoolisé.


En nous laissant pénétrer dans ses pensées, on réalise que Vald se cache en fait derrière une façade de rappeur second degré et ironique pour mieux se protéger. Si les réflexions sont basses, c’est justement parce qu’elles sont entre Vald et lui-même et que personne ne peut réellement les entendre. Lorsque nous en avons un court aperçu de ses réflexions, comme avec ce morceau, on réalise que Vald est en réalité bien plus tourmenté et indécis qu’on ne le pense.
Des rechutes et du remplissage inutile


Quelques morceaux inutiles : Offshore, Ne me déteste pas et Rocking Chair, qui au niveau technique est toutefois intéressant mais vite gâché par un flow qui devient vite agaçant et un refrain extrêmement mauvais. Il y a quelques éléments de mongolerie restants (Rocking Chair, Ne me déteste pas, Désaccordé, Dragon) mais ils ne sont pas si étouffants que ça, et Dragon peut même s’apprécier à l’écoute, la combinaison Sofiane-Vald étant très efficace. Sofiane semble avoir capté le délire Vald, pas sûr que ce soit bon signe cependant.


L’album se termine sur Deviens génial, véritable hymne à la réussite qui n’est pas sans rappeler l’injonction au succès de l’American Dream. Ce sera d’ailleurs l’occasion pour Seezy de sortir de sa zone de confort en proposant une véritable production festive, en véritable crescendo, et qui finira en feu d’artifice.


Un effort considérable a été apporté sur le fond, mais cela demeure toutefois léger sur l’entièreté de l’album, les efforts de contenu étant disparates. La technique est elle toujours au rendez-vous et l’artisan Seezy, qui produit l’intégralité de l’album, montre une polyvalence salvatrice en production. En proposant XEU, Vald accouche de son meilleur projet à date.


Pour plus de chroniques rap et d'analyses rap :
https://thesaurap.fr

Thesaurap
6
Écrit par

Créée

le 2 août 2019

Critique lue 310 fois

Thesaurap

Écrit par

Critique lue 310 fois

D'autres avis sur XEU

XEU
Chinasky
5

Le temps détruit tout

Vald c’était un petit con insolent, futé et talentueux. Vald, dans sa piaule d’ado, en mode branleur, un petit sourire en coin, il éclatait bon nombre de rappeurs labélisés, comme ça sans forcer...

le 4 févr. 2018

40 j'aime

3

XEU
DomToretto
9

Xeu le 2.

Dans un premier temps, il faut analyser le titre du nouvel album de Vald pour lequel il a lui-même laissé une libre interprétation. Donc l’album se nomme « Xeu » aka #XeuLe2. Il sort le 2 février...

le 4 févr. 2018

33 j'aime

2

XEU
ibbn
7

Valentin cherche sa place

Retour au jeu pour Valentin, un an après le très bon mais inégal Agartha, certifié disque de platine. Fort d’un nouveau statut - surprenant, mais mérité - d’acteur majeur du rap français, le rappeur...

Par

le 2 févr. 2018

21 j'aime

4

Du même critique

Projet Blue Beam
Thesaurap
9

Classique quasi-instantané

C’est le 13 novembre que Projet Blue Beam, dernier projet en date du rappeur Freeze Corleone fait son apparition. Loin d’être le fruit du hasard, cette journée est la date anniversaire des attentats...

le 2 août 2019

6 j'aime

Destin
Thesaurap
5

Tu peux pas contrôler ta destinée

Après une année 2018 marquée des featurings brillants de Ninho, le rappeur du 91 revient cette fois-ci avec son 2ème album studio pour lequel il nous promet de grandes choses. Avec Destin de Ninho,...

le 2 août 2019

5 j'aime

L'Affranchi
Thesaurap
2

Un album raté de bout en bout

Seulement 6 mois après VII, son premier album, Koba LaD revient avec L’Affranchi, un deuxième album plus élaboré que le précédent, mais toujours très faible. S’il est en nette progression, il ne faut...

le 2 août 2019

4 j'aime

1