Dans la foisonnante discographie de Ben Harper, il nous est arrivé à plus d’une reprise de perdre le fil… surtout lorsque celui-ci reliait une guitare à un amplificateur. En rocker, Harper n’a jamais convaincu. “Wide Open Light” est d’une tout autre trempe, comme la continuation de ses deux premiers albums parus au milieu des années 1990, avant le virage électrique du troisième qui lui permit d’asseoir sa notoriété dans son pays, les Etats-Unis, quand le blues folk des débuts avait essentiellement conquis la France. Tout ici est acoustique, et il est difficile de ne pas penser que c’est dans ce contexte que le talent de l’homme de Claremont, Californie, s’épanouit le plus. L’album s’ouvre et se termine par deux instrumentaux de toute beauté, le premier faisant la part belle à son fingerpicking, le second, tout en tressaillements, évoquant une ville de l’Ouest où voletteraient les tumbleweeds poussés par les vents. Entre les deux, Harper hisse son songwriting à un niveau qu’on ne soupçonnait pas : la pureté mélodique de “Wide Open Light”, un “Trying Not To Fall In Love With You” ressuscitant Nina Simone, où il s’accompagne au piano, le duo très Everly Brothers “Yard Sale” avec son pote Jack Johnson, “One More Change” et ses choeurs gospel qui transcendent en finesse le refrain, “Giving Ghosts”, où la guitare slide double la mélodie à la manière des blues ancestraux... La plupart des chansons reposent sur le duo guitare acoustique/ voix, mais Harper s’autorise les enluminures, une guitare slide, hispanique, une contrebasse, une section rythmique sur “Love After Love”... Un travail d’orfèvre pour un album qui a tout d’un aboutissement. (R&F)