Autant le dire dès le départ : les Dogs sont une anomalie temporelle.
Nous sommes en 1982. La variété française commence à se noyer dans les synthés, et Bashung va alors prendre à revers son public avec un Play Blessures très particulier. La musique "populaire" française va commencer son déclin si célébré aujourd'hui par les nombreuses émissions de variétés.
Pendant ce temps, des rouennais fraichement arrivés sur le label Epic sortent ce qui va devenir une pièce maitresse de rock français, chantée entièrement en anglais.
Ils se sont formés en 1973, et ont commencé à faire parler d'eux après un concert mouvementé auquel assistait un certain Philippe Manœuvre. (Oui, dès qu'il s'agit de rock français, nous sommes obligés de citer son nom au moins une fois par critique.)
Ce dernier écrira le premier véritable article sur les Dogs, et ne cessera jamais de les suivre pendant leur carrière. Celle-ci, malgré des succès critiques constants, n'auront jamais une véritable popularité. Jusqu'à la mort du chanteur, Dominique Laboubée, en 2002, après un concert où il s'effondrera sur scène, rongé par un cancer fulgurant.

Mais revenons 20 ans auparavant, à ce "Too Much Class for the Neighbourhood".
Un titre prétentieux certes, mais a-t-on déjà vu des rockeurs modestes ?
En plus, ils ont de quoi se vanter. Ce qui est impressionnant chez les Dogs, c'est le mélange parfait de simplicité et d'efficacité, ajouté à une aisance mélodique et rythmique imparable. C'est du rock 'n' roll tout ce qu'il y a de plus basique : une ou deux guitares, une batterie, parfois un piano, et un chanteur charismatique. Et ca suffit. Pas besoin d'y ajouter des artifices. Il n'y a rien de compliqué, et ça marche d'enfer.
Cela peut presque paraître dénué d'intérêt, étant donné la fluidité de leurs titres, assez courts de surcroit. Si bien qu'ils s'enchaînent sans qu'on ait vraiment le temps de les différencier. La voix du chanteur peut aussi prêter à sourire, tellement l'accent français est bien présent. Mais au final on en redemande, l'album possède une énergie communicative et addictive.
Même moi qui ne suis pas particulièrement branché rock, encore moins français, je suis assez bluffé d'apprécier cet album. C'est un très bon moyen de vaincre les clichés sur une mouvance souvent controversée.

Le problème, c'est que les anomalies temporelles plaisent rarement au public. Aujourd'hui presque tout le monde a oublié les Dogs. Les ventes ont toujours été très moyennes, ce qui peut se comprendre d'une certaine façon : un talent visionnaire comme ça, il y a de quoi être étonné. C'était vraiment pas la bonne période pour faire du rock classique.
Tant pis, les Dogs rejoindront les groupes méconnus. Mais au moins ils pourront toujours affirmer avec fierté qu'ils ont été les fleurons du rock français.

"The Most Forgotten French Boy" (titre prémonitoire !) : http://www.youtube.com/watch?v=smqzPnaOsHc
Le morceau éponyme : http://www.youtube.com/watch?v=HMZtFfh5sDw
Mellow-Yellow
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le 10 janv. 2014

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