Tiurida
6.8
Tiurida

Album de Falkenbach (2011)

(Rédigé à l'origine pour le site Spirit Of Metal)

« Gloire ». Telle est sobrement intitulée la nouvelle œuvre de Vratyas Vakyas, tête pensante de Falkenbach, qui se résout à nous la proposer après six ans de silence. C'est donc après une attente interminable que l'amateur de Pagan-Folk peut enfin écouter ce « Tiurida ».

La première chose qui frappe est l'artwork. Une merveille de finesse. Ce coucher de soleil sur un paysage exotique (tiré de la toile "Sunset In The Yosemite Valley" (1868) du peintre allemand Albert Bierstadt) dépasse en beauté toutes les pochettes des précédentes sorties de Falkenbach. Heureux possesseur de la « deluxe boxset », j'ai en plus le droit à un poster, un coffret avec la cover « or » et un pendentif représentant le logo du projet.
Délicieusement mis en appétit, vient le moment crucial de l'écoute.
Les coups de cor de l' « Intro », devenus traditionnels, résonnent comme dans un rêve ; un retour dans le temps au cœur des terres nordiques où nos ancêtres païens vécurent, combattirent et moururent. La tempête fait rage ; je me prépare à l'assaut.

« ...Where His Ravens Fly... » ouvre l’album de la plus belle des manières. Ce morceau de plus de sept minutes emploie ce qui fait de Falkenbach le plus « glorieux » héraut de l'art scaldique : la fusion des instruments traditionnels et électriques porte un souffle épique d’une envergure sans pareille. Les vers sont extraits du Grímnismál, poème mythologique de l'Edda Poétique islandaise. Deux voix aériennes se répondent et s’enchevêtrent sur cette musique majestueuse. On retrouvera un peu de cette maîtrise sur la cinquième piste, « Runes Shall You Know », qui, quoique moins éminente, est très bien structurée dans les variations de son thème, appuyées par des breaks énergiques.
La musique de Falkenbach se fait toujours aussi lancinante, et l'emploi (parfois excessif, même si l’on demeure loin de l'abus Black de rigueur) de la répétition entraîne aisément l'auditeur dans ce voyage onirique et mélancolique. Cependant, ce procédé a ses travers ; le morceau « Time Between Dog And Wolf » en est le parfait exemple. Cet exercice de style à la Bathory s’éternise, et n’a pas grand-chose à proposer pour éviter le naufrage : un tempo lent, un thème bancal et des chœurs peu inspirés soutiennent le chant poussif de Tyrann, qui a perdu de sa finesse comparé à l’opus précédent. Ennuyeux constat, quand on évoque l’indéniable savoir faire Black Épique des morceaux de « Heralding – The Fireblade ».
C'est principalement au niveau des ambiances musicales que le travail est saisissant. Chaque nouvel opus de Falkenbach est l'occasion pour Vakyas de décliner sur plusieurs teintes une atmosphère. Ici, c'est presque un retour aux sources qu'il décide d'opérer tant les mélodies folkloriques de « Tanfana » ou la structure chaotique de « In Flames » (avec ce long pont clair au milieu cédant l'espace à la beauté des voix) nous rappellent le « … En Their Medh Riki Fara... » de 1996. Les sonorités de la houle marine contribuent à renforcer l'immersion de l'auditeur, comme un certain « Galdralag » sut le faire en son temps.

Un goût d'inachevé subsiste après la fin de « Sunnavend », la dernière piste. Elle aurait pu devenir une référence sans cette simpliste et lassante rengaine, heureusement soutenue par les envolées chantées qui, comme de coutume, sont splendides. Ce sont d’ailleurs ces lignes vocales mélodiques, n'apparaissant vraiment que sur trois titres, qui manquent cruellement à ce « Tiurida » ; de celles qui m'avaient persuadé du génie de Vakyas sur « Ok Nefna Tysvar Ty ». Le faible ré-arrangement d'« Asaland » en guise de bonus track, décevant en tout points, ne saura pas rehausser le niveau à la fin du disque. Le son trop propre et la rythmique à la double-pédale sur le pont démolissent la magnificence de la version d’origine (présente sur la démo « Laeknishendr » de 1995). Ce vain essai de 'fougue' se révèle être du plus mauvais goût pour clore l’album.
Certes, la note est sévère, mais elle reflète mon opinion sur cet album inégal, qui pâtit de la comparaison avec le reste de la discographie du « one-man band » allemand.

À noter tout de même que les musiciens de session assurent encore une fois une excellente prestation, en totale adéquation avec l'univers de Vakyas. Mention spéciale à Boltthorn, très professionnel derrière ses fûts, efficace de par la régularité, la précision et la sobriété de son jeu. Et surtout, chapeau bas à Patrick Damiani (qui officie également comme guitariste sous le pseudonyme d’Hagalaz) pour avoir offert à Falkenbach une densité de son sans précédent dans l’histoire du projet. Le passage sur l’influent label autrichien Napalm Records y a aussi joué pour beaucoup.
SwordChant
7
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le 28 août 2013

Critique lue 145 fois

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