The Reminder
7.1
The Reminder

Album de Feist (2007)

En 2004, après un premier album passé inapercu ? Monarch (1999) ?, Feist sort Let It Die. Un deuxième album solo à la classe folle, sur lequel elle promène avec une élégance déconcertante sa voix voilée dans le jazz, le folk, la soul, la pop. Un de ces disques qui changent tout. Propulsée par le single pétillant Mushaboom, elle passe des squats berlinois aux studios sur-éclairés de Taratata. D'un coup, Feist se voit comparée à Rickie Lee Jones, Billie Holiday ou Dionne Warwick. Des références qui auraient pu facilement lui faire tourner la tête, la faire s'aventurer sur des terres riches et ornementales qui n'étaient pas les siennes. Mais Feist n'a jamais oublié les leçons de Dry. Aussi intemporelle et classique qu'elle soit, sa musique refuse de toutes ses forces l'apparat, le superflu, le compromis. Dans ses moments les plus pétillants, graciles, elle garde ? et c'est ce qui la rend si bouleversante ? ce côté rugueux, dépouillé, jamais lisse. Son nouvel album, The Reminder, franchit un pas de plus dans ce dépouillement, cette volonté de passer la soul et le folk à l'épreuve du minimalisme. Pour l'enregistrer, elle s'est enfermée quelques semaines dans une bâtisse vieille de deux siècles, dans un petit village du Val-d'Oise, La Frette-sur-Seine, en compagnie des complices de toujours, Gonzales, Mocky, Jamie Lidell, et aussi du producteur Renaud Letang (Manu Chao, Jane Birkin'). Une expérience intense, faite d'engueulades, de discussions sans fin. Le résultat, à l'instar du riff de piano infernal de My Moon My Man, premier single redoutable, qui évoque les meilleurs titres de Goldfrapp et enivre avec la légèreté des meilleurs millésimes, est à la hauteur des espérances. Feist virevolte entre pop, torch-song, gospel rock (la très réussie reprise de Sea Lion Woman popularisée par Nina Simone) et réussit, dans ce disque presque oppressant tant il est intense, habité, à reproduire la magie de Let It Die. On est en 2007. Certains tentent de surfer sur la new-rave, mettent des polos fluo, d'autres se raccrochent au retour du rock. Feist se fout des modes, elle a choisi son camp depuis longtemps : l'éternité. (Inrocks)


Attendue au tournant du troisième album par ses thuriféraires comme par ses contempteurs, Leslie Feist n'a pas ménagé ses apparitions vocales depuis le succès hexagonal et international de l'inusable Let It Die (2004), qui faisait suite à un premier Lp tiré à compte d'auteur en 1999. À l'exception peut-être de Camille, la Canadienne est actuellement la seule interprète féminine capable de briller dans des répertoires aussi artistiquement éloignés que Kings Of Convenience et Teki Latex, Readymade FC et Hypnolove, Mocky et Jane Birkin. Mais la chanteuse temporaire de Broken Social Scene (Past In Present pouvant apparaître comme un clin d'oeil irrésistible) n'a peur d'aucun défi, prête à abattre les murs des chapelles avec un mélange de grâce jamais hautaine et de décontraction naturelle qui a beaucoup contribué à sa réputation, particulièrement scénique. Avec sa voix cassée héritée de sa jeunesse punk, Feist a reconduit l'équipe gagnante de Let It Die, à savoir les courtisés Renaud Letang et Gonzales, auxquels elle s'est naturellement adjointe pour cosigner la production d'un disque plus varié et ouvert, qui parvient à jeter un grand pont temporel entre PJ Harvey (I Feel It All) et Nina Simone (dont elle s'est inspirée pour sa reprise sensuelle du traditionnel Sea Lion Woman). Si des titres imparables comme So Sorry, Limit To Your Love, Brandy Alexander ou My Moon My Man le single que tous les auditeurs masculins jalouseront forcément, faute d'en être la cible reprennent avec brio la veine explorée par le précédent disque, d'autres morceaux témoignent de l'évolution d'une chanteuse affranchie comme jamais. Si elle s'accorde une berceuse vespérale (The Water) et deux pauses bucoliques (The Park, Intuition), qui n'auraient pas dépareillé sur Speaking For The Trees (2004) de Cat Power, Leslie n'hésite pas à entamer une valse vocale avec ses amis Brendan Canning et Kevin Drew de Broken Social Scene (Honey Honey). Ou à danser sous nos yeux ébahis sur le bien nommé 1.2.3.4, entraînant hymne cuivré qui pourrait l'entraîner au sommet des charts internationaux. En conclusion somptueuse, Feist invite le Norvégien Eirik Glambek Bøe, l'autre Kings Of Convenience, à duettiser sur une ballade absolument poignante (How My Heart Behaves). On ne le répétera jamais assez : Feist est la chanteuse de la décennie. N'en déplaise à ses homologues et à la gent féminine. (Magic)
Feist a l’éclectisme éclatant. L’insaisissable canadienne - passée par la relais Broken Social Scene on ne sait guère où exactement dans son parcours, à moins que le collectif ne soit le point de départ, ou même l’arrivée - a peaufiné un quatrième album solo polymorphe, à l’image de ces lignes brisées prenant forme sur la pochette.Jazz, folk, pop, rythmes bossa nova ensoleillés ou notes tombant légèrement comme de fines gouttes de pluie, la chanteuse transporte, arrête, agite dans une grâce tout en contrôle (The Park, suivi de The Water, laissent sans voix). Peu étonnant de la part de celle qui fait le pont entre Peaches et les Kings Of Convenience. Et puis, c’est bien pourquoi on aime Feist, celle-ci ne se perd pas dans une facile utilisation de ses cordes vocales les plus tristes. Sealion feint de s’élever entre rock, gospel et le "killa-killa-killa" du Caroline’s A Victim de Kate Nash. Feist se révèle parfaite interprétatrice d’une pop aux légers accents country ou piano bar de 20 ans d’âge (1234) ; c’est pourtant dans un océan écrasant d’étendue que les quatre dernières pistes, tragique errance nautique, mettent fin à un parcours audacieux. Des torrents martelés de My Moon My Man à ce vertigineux estuaire, seul le passage par Past In Present est délicat à négocier, son énervement mielleux venant plomber quelque peu une ambiance de franc majeur levé en direction des conventions. Fort heureusement, le tir est vite rectifié (The Limit To Your Love, simple et sublime). Il n’avait réellement dévié de toute façon. (indiepoprock)
bisca
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le 27 févr. 2022

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