L’album live est un exercice curieusement incontournable, dont la nécessité nous échappe souvent : pour une poignée de brûlots, combien d’enregistrements sans flamme, qui se rangent au mieux sur l’étagère à souvenirs (“Ecoute ça, j’étais dans la salle ce soir-là !”), au pire sur l’immense pile des disques tièdes ? Dominique A, lui, a patienté quinze ans avant de sacrifier à cette coutume. Guetteur exigeant, il a attendu la bonne formule instrumentale, l’alchimie collective idéale. L’éclatante réussite de Sur nos forces motrices est d’abord celle d’un groupe :soudé et mobile, l’équipage du Nantais accompagne l’épanouissement d’un homme dont la plume et le chant ont à la fois gagné en netteté et en ampleur. Ce que Dominique A touche ici du doigt, et surtout de la voix, est rare dans la tradition boursouflée de la chanson française. C’est le lyrisme sans les postillons (La Relève, L’Horizon), la violence sans l’exhibition de muscles (Le Courage des oiseaux, Antonia), le volume expressif sans la surenchère sonore (La Mémoire neuve, Music Hall), l’ardent désir de dire sans la pénible volonté de tout souligner (Bowling, Tout sera comme avant). C’est cet équilibre précaire, entre fureur poétique et sens de la nuance, que même de grands funambules comme Ferré ou Brel n’ont pas toujours su trouver. Sur nos forces motrices enfonce le clou planté par les deux albums qui l’ont précédé : il consacre un musicien d’envergure, dont les ailes claquent librement dans un ciel totalement dégagé.(Inrocks)


Fermez les volets, éteignez les lampes, allumez des bougies à la place, installez-vous bien au fond d'un fauteuil douillet et relâchez tout besoin de contrôler vos émotions : Dominique A vient chanter chez vous ce soir. Enfin presque… En tout cas, en fermant les yeux, on y croirait. Car ça y est, M. Ané nous a fait l'honneur d'un album "live". Mais attention, il ne s'agit pas du "live" syndical dont nous font "cadeau" pas mal d'artistes pour couronner une belle tournée promo. Ce disque-là est d'une qualité rare, autant pour la setlist (qui couvre les 15 ans de carrière du monsieur), que pour le son et les arrangements (subtils et très inspirés). Et je ne mens pas, on a vraiment l'impression que M. A est là, chez nous. Pas de cris de fans intempestifs, juste la sensation d'avoir été invité à un voyage fascinant, comprenant caresses (les cuivres et les claviers enchanteurs) et coups de griffes (des guitares tranchantes parfois), explorant la vie d'un homme. La voix est posée à la perfection et pleine d'humanité (les envolées ou les tremblements ne sont pas surfaits). Certains pourraient reprocher un côté très propre à la performance, mais cela semble être plutôt dû au perfectionnisme de l'artiste qui voulait offrir à son public les meilleures versions possibles de ses chansons. Il a d'ailleurs fallu quatre concerts pour satisfaire son exigence ; d'où peut-être une impression d'entendre plus des vignettes qu'un concert à part entière. Mais le disque semble davantage nous raconter une histoire. Chaque étape de sa discographie est représentée au moins une fois (avec une préférence pour les 3 derniers albums), avec l'ajout de deux nouveautés, et que ce soit pour les titres les plus anciens ("L'Amour" aérien ou "Le Courage des oiseaux" électrisant) ou les plus récents ("La Relève", bouleversant, ou "La Peau", renversant), on ne ressort pas indemne d'une telle écoute. Le final est très bien choisi, le rare "Empty White Blues", rappelant les influences anglo-saxonnes du chanteur. Les émotions sont très, parfois presque trop, fortes. Mais elles sont pures et authentiques. Alors oui, il faut utiliser nos forces motrices pour avancer (comme Dominique A l'a toujours fait et surtout à partir du torturé "Remué"), mais pas besoin d'être sur nos jambes pour apprécier ce disque, car les forces nécessaires ici sont celles du cœur. "Il n'y a plus rien autour", ce n'est "que" de l'amour. (Popnews)
D'abord, écarter tout romantisme : la tournée marathon dont est issu cet album, ainsi que sa publication, répondent en partie à des impératifs financiers. A l'époque de la crise du disque, tout artiste qui jouit d'une certaine notoriété sans vendre par millions doit faire beaucoup de scène et publier de nombreux albums pour continuer à vivre de son art. Ce n'est ni honteux ni cynique, au contraire cette situation nouvelle permet de faire ressortir ceux qui aiment ce métier avec une passion viscérale. Il ne faut donc pas bouder son plaisir à l'écoute de "Sur nos forces motrices". Si Dominique A et ses musiciens n'ont pas toujours convaincu au cours de cette tournée, certaines salles poussant parfois le groupe à "bétonner" , cet album peut aisément apparaître comme la substantifique moëlle de leurs meilleurs concerts. Le phrasé à la fois puissant et sensible de Dominique A ressort avec éclat sur Bowling, Marina Tsvétaeva ou La Mémoire Neuve. Ailleurs, on assiste à une belle relecture du Courage des Oiseaux, et Antonia est gorgé d'énergie positive avec ses cuivres qui se mêlent aux riffs de guitare. On navigue donc avec bonheur parmi l'oeuvre de Dominique A, et on en mesure toute l'importance. Il est également très intéressant de sentir le groupe capable de mener ces chansons tambour battant puis de se faire discret sans être effacé. Music Hall et son chant presque chuchoté devient ainsi encore plus beau et émouvant que dans sa version originale, même constat pour Le Commerce De l'Eau. Cet album live vient donc à point nommé pour nous rappeler ce que devrait toujours être la scène : une rencontre entre un artiste et son public, mais aussi une rencontre de l'artiste avec lui-même et son répertoire. (indiepoprock)
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le 22 mars 2022

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