So It Goes
7.8
So It Goes

Album de Demoniac (2020)

Je me confesse : à l'écoute des premières secondes de 'So It Goes', j'ai pensé à un énième revival nostalgicothrash sans intérêt. Puis est arrivé ce premier solo avant le terme de la première minute, puis ce chorus, et puis, et puis...tant d'idées, tant d'arrangements, de sauvagerie, ce bassiste doué, ces solos inspirés, ce batteur énervé, etc... J'ai donc quitté cette posture de type blasé et suis devenu très attentif. Bien m'en a pris.


Le groupe chilien Demoniac a manifestement été biberonné au thrash allemand du milieu des années 80. Plutôt que de s'adonner à du copier/coller comme bon nombre de ses camarades, il intègre les dogmes du thrash pour mieux se les approprier. Et nous voilà en présence de 5 titres en 42 minutes (dont un de 20) qui plient le game du thrash avec un propos engagé, complexe, sauvage et tranchant.


Beaucoup de groupes de musiques dites "extrêmes" vont vite, tapent fort, et souvent, je ne ressens aucune intention. Je suis juste complice d'un exercice bien maîtrisé, paresseux et rabâché. Avec ce disque, Demoniac me rappelle les premiers disques de thrash/punk/hardcore. Cette frontalité avec laquelle un besoin d'exprimer une rage émerge naturellement en mode "in your face" ("dans ta face mon coco" en vf). 


Côté musiciens, nous avons un batteur qui sonne comme le Igor Cavalera des premiers Sepultura (souvenez-vous, quand Igor était encore motivé par ce qu'il faisait), avec un son roots (bloody roots) et une frappe puissante, abrasiveLe bassiste, lui, surgit régulièrement dans le mixage, jusqu'à être en lead sans devoir justifier sa place par un délire jazzicofusionregardezcommejesuistechnique. Les guitaristes affûtent de longs riffs généreux, des solos travaillés, des chorus inspirés.


On se retrouve une nouvelle fois à humer ce confortable parfum old school, avec un album scindé en son milieu par une troisième piste déconcertante. L'instrument vedette y s'avère être une clarinette (oui, je me débrouille pas mal en rimes). Et cela fonctionne à merveille, alors que l'on vient de se prendre 11 minutes de sauvageries dopées aux amphétamines trafiquées. 


Cette clarinette, on la retrouve dans le titre de 20 minutes qui conclut le disque (20 minutes, c'est le temps que prend par exemple Full Of Hell pour placer 12 titres). Demoniac, ce groupe dont j'ignorais totalement l'existence il y a encore une semaine, est décidément magique, car ce tiers d'heure (oui, je suis aussi bon en math) fonctionne. Ça tabasse sec, ça transporte, ça ondule, c'est mouvant. La chanson est découpée en plusieurs mouvements sans que cela nuise à sa fluidité, ni alourdit l'ensemble. Les solos de guitare sont possédés, les riffs frénétiques dialoguent, nous sommes face à une proposition généreuse, fouillée et pensée. Elle nous prend par la main, et elle n'est pas moite, on ne la lâche pas. 


Voilà un disque audacieux, sensible, imprévisible qui ne cherche pas à séduire l'auditeur. Sans concession, libre, il mérite de sortir de sa relative confidentialité. 

Gil-les
8
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Créée

le 11 févr. 2022

Critique lue 22 fois

Gilles Rammant

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