Si je faisais dans l’uchronie, je dirais que si Kashiwa Daisuke était né en 1900, on aurait parlé de sa musique comme de la musique classique. Ni plus ni moins. Sauf qu’à l’époque, les instruments électroniques n’existaient (exception faîte des ondes Marteneaux et du thérémine si on veut être précis) et Daisuke en use. D’où l’uchronie. La musique classique faîte aujourd’hui s’appelle de la musique contemporaine avec tous les sous-entendus d’expérimentations et de difficulté d’écoutes que cela induit. Or, la musique du Japonais est grand public, parfois un peu pompière d’ailleurs mais touchantes. Ce qui n’aide donc pas pour mettre une classification. L’essence même de sa musique est faîte de toute la panoplie des instruments classiques, du piano et des cordes. Mais outre les programmations electronicas qui viennent mettre un peu de désordre (on est proche de l’école allemande de City Centre Office ou Büro), il utilise aussi une guitare électrique que l’on aurait pu retrouver dans le progrock. Program music 1 comporte donc deux pièces musicales de 30’ environ chacune (là, encore, on sort du cadre de la pop), chacune inspirée par son auteur par une histoire. Et non un film, ce qui aurait permis une classification aisée de Kashiwa Daisuke en compositeur de BO.


Ce qui n’est pas le cas, même – et ce n’est pas un hasard, le Japonais s’est fait connaître en participant au programme de radio de Ryuichi Sakamoto. C’est vrai que Stella, bâti sur différents mouvements, aurait pu orner des images d’un film. Et même plusieurs, car le Japonais, suivant le fil de sa narration, articule son morceau sur différents mouvements, passant d’une partie au piano romantique à une partie inquiétante de cordes digne du Kronos Quartet ; d’une partie plus japonisante avec un solo de violon qui semble chanter à la lune des chœurs sur une musique symphonique qui n’est pas sans rappeler Scala. Le deuxième instrumental (Write once, run melos…parfois justement un peu mélo) a, sur la longueur, la même sensibilité que le premier. Mais il s’en distingue en débutant par un piano à la Keith Jarreth passé à la moulinette de programmations « cut and clic ». Preuve Daisuke aime aussi introduire une touche de jazz dans sa musique globale. On n'est pas au bout de nos surprises car sur la fin, une frénésie électronique vient prendre tout le spectre musical dans une folie Krautrock. Le cinéma, friand d’instrumentaux émotifs, va bientôt s’emparer des talents de compositeurs de Kashiwa Daisuke et bientôt on le verra au générique d’un film de Kitano, de Kyuichi Kurosawa ou de Darren Aronofski pour un Réquiem for a Dream II.

denizor
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le 4 sept. 2015

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