Oracular Spectacular
7.2
Oracular Spectacular

Album de MGMT (2008)

Par Matthieu Clervoy

Le cerveau d'un jeune journaliste est une drôle de petite chose qui ne connaît pas grand chose à la musique, et se montre en conséquence très sensible au buzz. Pour preuve, il ne lui faut pas beaucoup plus que deux-trois références fumeuses (The Sleepy Jackson, Mew, Dave Fridmann), un titre qu'aurait pu pondre Mercury Rev et une comparaison à l'héroïsme de Muse chez Pitchfork pour qu'il manque d'avaler sa salive, se bouche les oreilles sur un concert de louanges (Auréliano Tonet de Chronic'art - Chronic'art #44) et Hianta des Fluokids sont tous deux allés de leur compliment) et prenne la fuite. Un mois plus tard, tout le monde a déjà écouté, tout le monde écoute encore, « mais POURQUOI ? » s'interroge le gamin toujours en retard (ne rigolez pas, ça me le fait tout le temps). Il écoute Time to pretend, et entend Marc Bolan susurrer avec la plastique pupute des Raveonettes tous ses rêves de rock star. Claque, MGMT vient d'entrer dans sa vie.

En même temps, c'était pas bien difficile, cette dernière ne ressemble à pas grand chose (« Get jobs and offices and wake up for the morning commute »), lui aussi rêve de Paris, d'héroïne et de mannequins pour femmes - sinon pourquoi écrire sur la musique - et les VanWyngarden et Goldwasser ne lésinent pas sur les clins d'oeil à son ennui, sa liberté ou le temps passé tout seul. Et puis il y a le souffle avec lequel tout ceci est projeté : quoiqu'en disent les plus sceptiques sur ses plumes et paillettes glam, il est pure lévitation quand il compresse les lignes de synthés jusqu'à saturation, déploie les lasers, les choeurs et les cordes alors que les mêmes matières étouffent chez Arcade Fire ou Flaming Lips.

Le lendemain, le garçon part à la plage avec Oracular spectacular pour digérer la nuit passée à écouter ce seul Time to pretend, sans possible repos toutefois alors qu'un défilé d'icônes paradent dans le sable. Ziggy Stardust en maillot de bain lui chante sa guerre du week-end à travers un tuba, sur des entrelacs de guitares, carillons et glockenspiel (Weekend wars), Todd Rundgren étage les harmonies vocales léthargiques (The Youth), Kevin Barnes déchaîne un funk en mode falsetto tout sourire après colossale ingestion d'antidépresseurs (Electric feel) et les Kids dans la flotte hurlent du mieux qu'ils peuvent un nouvel hymne de stade. La suite voudrait l'entraîner dans une quatrième dimension avec des surfs volant sous des ciels psychédéliques, il crie « oui » avec la foule, la vérité c'est que la pilule peine à prendre effet avec les ersatz de Nada Surf (Of Moons, birds & monsters) et The Verve (The Handshake) alors que secrètement il fantasmait sur un trip Loop ou Spacemen 3. Piètre came, mais bon le plagiste veut bien refaire la même chose toute la semaine et il a eu sa réponse au « POURQUOI ? ». Bah oui, il n'est pas tout seul, et son époque a très certainement autant besoin de MGMT que lui, même si elle en a déjà tout entendu. D'ailleurs moi aussi, je l'ai trop écouté ce disque.
Chro
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Chro : Top 10 musique 2008

Créée

le 28 août 2014

Critique lue 431 fois

1 j'aime

Chro

Écrit par

Critique lue 431 fois

1

D'autres avis sur Oracular Spectacular

Oracular Spectacular
EricDebarnot
9

Réconciliation

Il y a des disques comme ça, qui vous tombent dessus alors que vous ne demandez plus rien, pourtant, à la musique. Et qui vous étonnent, vous réjouissent, et qui au final rendent vos jours et vos...

le 7 août 2014

4 j'aime

Oracular Spectacular
MarcPoteaux
8

Critique de Oracular Spectacular par Marc Poteaux

La musique, c'est comme le vélo, une fois assimilée, elle revient toute seule. Ainsi, les New Yorkais de MGMT ont du puiser leurs influences dans la discothèque de leurs parents, de Bowie à T-Rex en...

le 20 févr. 2013

3 j'aime

Oracular Spectacular
Angie_Eklespri
5

Vanity tweety SpectacularS

      Mais je connais ce morceau ! Time To Pretend. Tout le monde va reconnaître ce titre, passé mille fois à la radio. Souvenir.  Dans la playlist de ma...

le 23 nov. 2016

2 j'aime

Du même critique

Les Sims 4
Chro
4

Triste régression

Par Yann François « Sacrifice » (« sacrilège » diraient certains) pourrait qualifier la première impression devant ces Sims 4. Après un troisième épisode gouverné par le fantasme du monde ouvert et...

Par

le 10 sept. 2014

42 j'aime

8

Il est de retour
Chro
5

Hitler découvre la modernité.

Par Ludovic Barbiéri A l’unanimité, le jury du grand prix de la meilleure couverture, composé de designers chevronnés, d’une poignée de lecteurs imaginaires et de l’auteur de ces lignes, décerne sa...

Par

le 10 juin 2014

42 j'aime

Broad City
Chro
10

Girls sous crack.

Par Nicolas Laquerrière Girls sous crack. Voilà la meilleure façon de décrire Broad City, dernière née de Comedy Central (l'historique South Park, l'excellente Workaholics, etc), relatant les...

Par

le 4 août 2014

30 j'aime

1