Noise
7.3
Noise

Album de Archive (2004)

C'est cruel mais c'est ainsi : la célébrité est un métier et Archive n'a jamais, en son pays du moins, passé son CAP de prophète. Arrivé trop tard, trop tôt, pas assez de gueule, d'attitude ou les cheveux trop gras' Depuis son premier album Londinium, en 1996, Archive se bat sur ses terres. Le groupe ne surnage même pas, il plonge : ni culte ni réputé, Archive est en Grande-Bretagne un secret aussi bien gardé que l'emplacement de l'Atlantide. Le groupe, qui se déclare enfin heureux, est pourtant dorénavant à l'heure du combat. Car l'envie d'en découdre n'a cessé de croître, au gré des croche-pattes personnels, des efforts déçus, avec l'évanouissement presque complet du groupe dans l'ignorance crasse de l'époque. Archive a trouvé la formule magique, le défoulement cathartique qui transmute le dégoût de l'ère en création, la frustration en résistance. Et quelle meilleure manière de lutter contre la peur que de hurler plus fort qu'elle : Noise, toujours aussi floydien et envoûtant, brûle pourtant d'une autre flamme. Celle de l'instantané : l'album a été enregistré en quelques semaines seulement. Les morceaux de Noise conservent leur élégance racée, mais ne sont plus de longs fleuves tranquilles : les acrobaties temporelles, les structures aux mutations perpétuelles sont acidifiées par un son crasseux, teigneux. Si les morceaux restent longs, ils paraissent paradoxalement plus ramassés, efficaces : le vent de la colère a tassé les meringues du groupe.
C'est ainsi que l'heure de la revanche sonne : avec du sang chaud et de la hargne. Dès l'ouverture, un Noise revêche et nerveux, le groupe assène sa première claque sèche : le défi est lancé. Fuck U, l'un des meilleurs morceaux de l'album, tombe dans la crudité cruelle dont un Jarvis Cocker haineux s'était jadis fait le maître ("Tout ce que je désire est de te voir dans une douleur horrible", susurre Craig). Plus loin, le cœur de l'album fait parler les cordes, pléthoriques : Waste, slow endémique vite mis sous pression, lorgne vers le colossal. Conscience ou Sleep font rêver de grands espaces et Get out, superbe, oscille entre le moelleux du dehors et le piquant du dedans. Archive parle dorénavant aux viscères, et c'est sur scène que les Anglais veulent remuer les tripes, en grand : Noise est taillé pour les stades.(Inrocks)


Commençons par une mauvaise nouvelle : pour la première fois depuis les débuts du groupe, avec le magnifique et très trip-hop "Londinium", en 1996, Archive enchaîne deux albums de suite (voir trois, si l'on compte comme un album à part entière la Bande Originale du mauvais film "Michel Vaillant") sans se renouveler dans son son et ses compositions. On est quelque peu déçu de constater que depuis "You All Look The Same To Me", qui reste sans aucun doute le meilleur opus du trio, rien n'a changé. Ou presque..."Noise", c'est la même chose... mais en beaucoup moins bien. Tout le monde se souvient de l'envoûtant "Again" et de ses 16 minutes de rock psyché qui ouvraient en beauté "You All Look The Same To Me". Et bien ici, les morceaux s'étendent, toujours plus longs (plus de 9 minutes pour "Waste"), mais jamais la magie ne refait surface. Bien sûr, tout n'est pas à jeter, loin de là. "Fuck You", très rock'n'roll, est un excellent choix de single, de même que "Sleep", et ce malgré la voix de Craig Walker qui a tendance à flancher (une seconde prise eut été préférable).

Mais on ne retrouve pas là le chef d'oeuvre tant promis par le groupe lors de l'enregistrement, en partie effectué à Paris d'ailleurs. Certains titres comme "Pulse" ou "Me And You" n'ont pas grand chose à faire ici, alors qu'ils auraient ravis les fans en tant que faces B. "Me And You", par exemple, n'a pas de mélodie, pas de son particulier, chose rare chez Archive. Il s'agit d'une chanson banale. Quant à "Here" et "Wrong", il ne s'agit que d'interludes de quelques secondes sans intérêt.
On reste un peu sur notre faim, la déception est bien là, même si certains moments de bravoure (signalons tout de même "Get Out" et son côté rock'n'roll seventies à la Graham Coxon, ainsi que "Love Song", romantique à souhait pour ce qui est des deux premières minutes) nous font un peu mieux passer la pilule. (indiepoprock)

bisca
7
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le 10 mars 2022

Critique lue 71 fois

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