Necrobreed
7.4
Necrobreed

Album de Benighted (2017)

Le label Season of Mist ne s’arrête jamais et sort en février 2017 le huitième album de Benighted, formation française bien connue officiant dans le Death bien gras tirant bien souvent sur le brutal, avec quelques touches grind. Actif depuis 17 ans maintenant, le groupe déçoit rarement. Que ce soit avec ses sorties d’albums ou ses performances live, Benighted c’est une valeur sûre. Alors, bien sûr, lorsque “Necrobreed” a été annoncé, avec comme remplaçant au génial Kévin Foley, le non-moins génial Romain Goulon, j’ai un peu fait la fête dans mon salon. Romain Goulon, c’est la brute qui a (entre autres) enregistré la batterie sur le cultissime “Epitaph” de Necrophagist. Autant dire que la relève est assurée derrière les fûts.


Vous avez aimé “Carnivore Sublime” ? Parfait, vous tomberez immédiatement amoureux de “Necrobreed” tant l’album est dans la continuité de son prédécesseur. Même production en béton armé, mêmes riffs musclés et mêmes blasts stroboscopiques. Mais, pas le même album. Bien que la patte Benighted soit immédiatement reconnaissable pour tous ceux qui sont familiers de "Asylum Cave" et "Carnivore Sublime", on remarque que le groupe a pioché dans ses galettes les plus anciennes.


Samples malsains et guitares dissonantes font partie de ce "Necrobreed" aux multiples facettes, toutes plus brillantes les unes que les autres. D'une durée de trente-huit minutes, l'album ménage l'auditeur avec quelques pauses ou mid-tempos (Monsters Make Monsters, l'intro de Reeks of Darkened Zoopsia) qui restent d'une efficacité indiscutable. "Necrobreed" a le temps de proposer des riffs intéressants mais ne tourne jamais en rond grâce à des guitares sous stéroïdes et une batterie pertinente. Tantôt groovy, d'autres fois d'une vélocité qui frise la surenchère, Romain Goulon réalise un sans-faute. Et puis, il y a Monsieur Truchant.


J'ose le dire sans honte : je pense que ce gars est un des meilleurs chanteurs de la scène metal française. L'étendue de son registre vocal est impressionnante, de même que la facilité avec laquelle il jongle entre ses différentes vocalises. Gros pig squeal gras, scream, growl profond qui vient tacler les grands de la scène death scandinave : tout est maîtrisé, y compris en live. J'avais fait un reproche à Colossus il y a quelques temps par rapport à l'omniprésence du chant dans leurs compositions ; Julian est lui aussi très bavard sur "Necrobreed". Mais la diversité de sa performance fait passer la pilule sans aucun problème.


Je dis souvent que Benighted sont les Dying Fetus français tant les deux formations sont proches dans leur essence : compositions ultra-efficaces aux tempos élevés, flirt régulier avec l'univers hardcore et grindcore, et monstres de technique. La différence notable entre les deux groupes est le choix des thématiques abordées. Alors que les Américains nous parlent de guerre et de politique, Benighted a développé son "Necrobreed" autour de la maladie mentale. Sans parler de concept album, il s'agît là d'un fil rouge dont s'est inspiré le groupe pour l'écriture des paroles. Mais de toute façon, on ne comprend rien hormis les refrains hyper catchy.


Je résume : un chanteur possédé, un batteur alimenté à l'uranium et des cordes sous amphétamines. Qu'est-ce qui manque à "Necrobreed" ? Qu’est-ce qui pourrait vraiment sublimer cet album ? Le rendre encore plus jouissif, plus lourd, plus puissant ? Une prod' en acier trempé. Et ça, "Necrobreed" l'a aussi. Les fûts de M. Goulon sont naturels, faisant la part belle à la dynamique et à la précision de son jeu. La basse est bien lourdingue, avec une bonne grosse disto qui salit le mix général. Et ces guitares, bordel. Chaque accord est un seau de plomb en fusion versé droit dans les esgourdes, et c'est vraiment trop bon. Ce grain épais et moderne à souhait me ferait presque chialer tant il est beau et riche en harmoniques, tout en restant précis. La magie de la modélisation d'amplis.


Rien ne manque à ce "Necrobreed" pour devenir une référence en matière de brutal death. Signe avant-coureur : on a très envie de casser des trucs (ou des personnes) au bout de cinq minutes d'écoute. J'écris dans le TGV, et je dois faire des efforts colossaux pour ne pas envoyer la pauvre femme assise en face de moi à travers la fenêtre du train, avant de me jeter sur son cadavre pour la démembrer et dévorer son cadavre. Loin d'une haine froide et profonde comme peuvent l'instiller les bons albums de black, Benighted insuffle un besoin de violence primaire qui grandit à chaque coup de grosse caisse. Une seule écoute de "Necrobreed" vous change en psychopathe invincible sorti du plus débile des slashers. Mise en garde donc : veillez à ne pas écouter ce brûlot si vous êtes proches d'objets pointus, tranchants ou contondants !


Catharsis parfaite, cette sortie de Benighted saura convaincre tous les amoureux du genre, et sans doute ceux qui sont moins familiers avec un metal aussi extrême tant l'exécution est sublime, autant dans la forme que le fond. Aucun morceau n'est à jeter dans ce "Necrobreed" d'une intensité presque douloureuse. Je me risque à citer Forgive Me Father comme étant le titre le plus réussi de l'album. Interdiction absolue de passer à côté de ce nouvel album des fous furieux de Benighted. À voir en live un peu partout en France, y compris au Motocultor en cette belle année 2017. Même en live (surtout ?), les gars sont capables d'infliger une sévère correction.

Holy_Rillettes
9
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le 26 juin 2017

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