Métamorphose
7.6
Métamorphose

Album de Sortilège (1984)

Premier album de Sortilège, Métamorphose est enregistré en Allemagne et produit par Peter Lat. Le son est équilibré, ce qui permet la mise en avant des guitares, sans pour autant laisser de côté la voix et la section rythmique. L’assise proposée par Bob Snake et Daniel Lapp est d’ailleurs impeccable, ce qui s’entend dès « D’ailleurs ». L’ensemble est bien plus professionnel que sur l’EP, que ce soit dans les arrangements, l’écriture des paroles qui s’est encore améliorée et le travail sur la voix. Christian Augustin y prouve toutes les qualités déjà entrevues l’année précédente. Cerise sur le gâteau, la pochette a été confiée au dessinateur Philippe Druillet (Lone Sloane, Salammbô ou les affiches de La Guerre du feu et du Nom de la rose).
Proposant une musique heavy, à la fois puissante et mélodique, Sortilège montre de réelles qualités de composition et une technique supérieure à la moyenne des groupes de l’époque. Chaque titre nous transporte dans un univers riche qui tient autant aux paroles qu’aux arrangements. « D’ailleurs » ouvre les hostilités sur un rythme rapide et sautillant qui donne envie de secouer la tête et de chanter en chœur. Les influences issues de la New Wave Of British Heavy Metal sont évidentes, mais le groupe y ajoute une puissance toute allemande. Plus complexe, « Majesté » est un mid-tempo, dont les riffs sont efficaces. Après la science-fiction lovecraftienne du premier morceau, c’est la fantasy qui est appelée dans les paroles. Ce mélange des genres est intéressant, car Christian Augustin s’inspire de ses lectures et de mythes, comme sur « Cyclope de l’Etang », une chanson pleine de nuances, dont le refrain est souligné par des chœurs originaux, plus proches du hard rock des années 1970 que du heavy metal.
Alternant riffs écrasants et accélérations, « Légende » s’appuie sur le mythe des sirènes évoqué dans L’Odyssée d’Homère, pour un titre qui fait la part belle aux guitares. Court, efficace, il entraine l’auditeur grâce à un entrain communicatif qui conduit à l’instrumental « Nuit des Limbes ». Plutôt à la mode à cette époque, l’instrumental servait surtout à montrer la technique des musiciens. Sortilège construit un vrai morceau, sur lequel les guitaristes se donnent à fond, alternant riffs et soli pour la plus grande joie de l’auditeur.
La face B démarre par le speed « Civilisation Perdue », un morceau bourré d’énergie, dont le riff principal reste lourd et ouvre sur un refrain très heavy. En un peu plus de deux minutes, la messe est dite, et c’est ce qu’on pourrait reprocher aux titres rapides du groupe. En concert, ils étaient rallongés, mais sur l’album, c’est un peu dommage de s’arrêter en si bon chemin. A l’inverse, « Délire d’un fou », sans doute l’un des morceaux préférés des fans, se développe sur plus de cinq minutes. Alliant paroles d’une rare finesse et harmonies de guitares soignées, cette fausse ballade narre la vision du monde par un homme psychotique.
L’album se clôt sur le mid tempo « Métamorphose », basé sur la nouvelle de Kafka, un titre complexe, qui alterne les rythmes et voit Bob Snake montrer toutes ses qualités de batteur. Ce beau titre, certainement un peu trop complexe pour beaucoup de fans de l’époque, est à réhabiliter et lorgne du côté du metal progressif.
Même avec le recul, Métamorphose se révèle être l’un des meilleurs albums de metal sorti cette année-là. Il présente un groupe à l’univers riche et captivant, qui sort de l’ordinaire. Afin de gagner de nouveaux marchés, une version en anglais est enregistrée. Si les paroles sont adaptées, et le mixage un peu différent, celle-ci ne rencontre pas un grand succès, à part au Japon semble-t-il. Il faut reconnaître que la prononciation n’est pas au top. A noter la sortie, en 2017, chez No Remorse d’un coffret contenant le CD (avec ces deux versions plus un nouveau mix), le vinyle, un t-shirt, le poster de la pochette et un patch. Il est épuisé dès les pré-commandes.

DenisLabbe
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs albums de metal

Créée

le 13 déc. 2020

Critique lue 101 fois

Denis Labbe

Écrit par

Critique lue 101 fois

D'autres avis sur Métamorphose

Métamorphose
DenisLabbe
8

Une légende française

Premier album de Sortilège, Métamorphose est enregistré en Allemagne et produit par Peter Lat. Le son est équilibré, ce qui permet la mise en avant des guitares, sans pour autant laisser de côté la...

le 13 déc. 2020

Du même critique

Lupin
DenisLabbe
3

Loupé : dans l'ombre d'Omar

Lupin (2021) Lancée à grands renforts de publicité, cette série Netflix s’appuie sur une distribution construite autour d’Omar Sy et une intrigue soi-disant basée sur des références à Arsène Lupin...

le 8 janv. 2021

20 j'aime

10

Tribes of Europa
DenisLabbe
5

Les 100 de l'Europe

Série allemande Netflix, tournée en allemand et en anglais, Tribes of Europa s’inscrit dans une mouvance postapocalyptique à la mode. A ce sujet, les Allemands ne font pas les choses à moitié : ils y...

le 19 févr. 2021

19 j'aime

Lovecraft Country
DenisLabbe
9

L'Appel d'Ardham

Nouvelle série sur OCS signée HBO, Lovecraft Country s’inspire de l’univers lovecraftien et d’une nouvelle de Matt Ruff pour nous dépeindre une Amérique en pleine déliquescence, gangrenée par ses...

le 17 août 2020

13 j'aime

3