Live at the Carousel Ballroom 1968 (Live) par bisca

Ce disque est un monument perdu du rock psychédélique. Sa parution (la première) après 44 ans de purgatoire dans les cryptes de Stanley Owsley Bear est une incroyable nouvelle pour les spécialistes blasés comme pour les amateurs de classic rock. Ce document de 71 minutes offre donc un autre concert de l’équipe rendue fameuse pour l’inoubliable “Cheap Thrills”. Qui a enregistré cette bande ? Un certain Owsley Stanley, surnommé Bear. Alias le petit chimiste de San Francisco. Arrêté une première fois en 1967 dans son laboratoire avec 350 000 doses d’acide, il plaide “la consommation personnelle” et part directement en prison. Dès sa sortie, selon la légende, il synthétise un acide surpuissant pour aider les Beatles à terminer le Double Blanc, devient soundman officiel du Dead, lui crée une sono JBL du feu de Dieu et enregistre sur son Nagra tous les concerts du Mort Reconnaissant, mais aussi les premières parties qui en valent le coup. Ce sont ses “journaux soniques”. Gram Parsons et les Flying Burritos, Allman Brothers, Quicksilver, font partie de ces enregistrements miraculeusement arrivés jusqu’à nous. Et revoici Janis Joplin...Le Carousel (salle mythique qui allait devenir bientôt le Fillmore) est alors autogéré par le Dead et l’Airplane. Janis et ses hommes sont gonflés à bloc et livrent une performance fulgurante dans le cadre de cette communauté hippie, la plus branchée de la Baie. Janis chante ! Oui, ce disque est son document définitif, son zénith. Etait-elle sous l’influence du White Lightning de Stanley ou de son Southern Comfort personnel ? Elle jamme, scande, secoue les mots et passe le répertoire de Big Brother au Kärcher. Sûre de son coup, volcanique sensualité, elle taille son chemin dans une jungle de guitares, avec James Gurley, hardi bretteur illuminé qui tire des chandelles fuzzy dans la nuit. Mais tout le groupe chante et on découvre Janis souvent en duo avec Sam Andrew, rugissant ses blues avec une conviction renforcée (“Light Is Faster Than Sound”, “Piece Of My Heart”). Exceptionnellement, les guitaristes ne sont pas trop désaccordés et la performance collective reste inexpliquée, magique, livrée à fond les pistons. Tout le monde est au sommet. La basse de Peter Albin étire le groove. Et le public s’enflamme, foule de beautiful people dont il n’est pas difficile d’imaginer tous les musiciens locaux, plus Hunter Thompson, Timothy Leary, Allen Ginsberg, Tom Wolfe... 1970 : Bear, 35 ans, est arrêté avec le Dead dans un hôtel de New Orleans. Il sera embastillé deux ans. Durant ce temps, quelqu’un utilise sans autorisation trois des titres de ce concert (dont “Summertime”) pour la compilation “Joplin In Concert”. Furieux, Bear attaque Columbia dès sa sortie de prison et gagne son procès. Mais plutôt que d’empocher des dommages et intérêts justifiés, l’incorrigible freak exige une publication 100 % à son idée de la mythique bande. Columbia accepte. Une pochette est commandée au génial Stanley Mouse et la bande historique mixée dans un studio numérique dernier cri de Sydney, Australie où Bear s’est exilé depuis 1996. Et là, autre choc: Bear mixait tous ses concerts comme les premiers Beatles stéréo: les voix et la batterie à gauche, toutes les guitares et la basse à droite. Bear s'en expliquait (jusqu'à ce maudit accident de voiture de mars 2011). La dynamique de son enregistrement reste fantastique et plus on rapproche ses enceintes l'une de l'autre, plus on entend le concert comme miraculeusement revenu de San Francisco 1968. Ah oui et aussi: le light show était fantastique. (rock and folk)

bisca
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le 13 mars 2022

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