Je vais vous dire un secret : il est venu le temps où l’époux couronnera son épouse.
Où est la couronne ? demande-t-on
Au Nord parait-il.
Et où se trouve l’épouse ?
Au centre, où la chaleur porte la lumière.
Malheureusement éloignés, l’amoureux s’est endormi et réveillé dans la tempête, il est resté effrayé jusqu’à la mort.
Je crois que Laylow n’a pas su apporter la couronne.
Il ne s’agit pas pour nous de nous leurrer, ni de nous bercer d’illusions, ni de nous détourner de ce qui résulte d’une vision objective de la réalité : l’album est une tiare sans éclat.


La façon dont l’esprit humain se comporte à l’égard de l’imaginaire, le plus ou moins de confiance qu’il accorde à la fiction et au rêve, sont toujours en relation étroite avec une attitude générale face à la réalité de la vie. Laylow s’était justement positionné en défenseur des facultés sensitives et oniriques, en négateur du réel, portant au dos l’oriflamme de ses chimères. Il affirmait la toute-puissance du désir et ainsi la primauté de l’univers intérieur sur le monde extérieur.
Sur Trinity, le Lay réalisait l’éclosion des sens et des mondes subjectifs, il investissait la création de simulacres matériels car précisément son artifice permettait à la vie de se déployer.
La vision du Lay était précisément d’évoquer et d’accentuer le facteur individuel, de mettre en évidence ce que chaque vision du monde a de spécifique et d’irremplaçable.


L’ensemble de ces affirmations est invalidé par l’Etrange histoire de M.Anderson c’est pourquoi le projet ne plaira qu’aux :



  • Simiesques fans de Laylow, toujours plus impurs que leur modèle.

  • Goblinoïdes ordures dont le « génie », rongés par de tristes helminthes, peine à croitre.

  • Crânes spongieux, lourds de références et de bavardages, prêt à voir la lumière pour peu qu’elle réponde au vide de leurs iris laiteux.
    A ces phocomèles tristes, iront toute la lourdeur du projet, leurs chicots abrutis claquent déjà de joie car l’agitation répond toujours au vide.


L’artifice boit la faible intériorité.
Si la nature a fait son temps, si elle nous a lassés, dégoulinante de ciels et de paysages sur les instagrams du monde, l’ingéniosité humaine peut en pallier les manques. Il ne s’agit pas de l’embellir mais bien de proposer une autre beauté, une contre nature différente et victorieuse.
L’album échoue, s’écrase sur cette vérité : les images du court métrage, les dialogues des interludes, les flows et les instrus parent la vie de babioles ennuyées.


Au lieu d’être ravi, l’auditeur est écrasé. La construction du projet sur laquelle ne manqueront pas de chanter les oiseaux aux becs remplis de pisse et aux plumes de plastique, plonge ses doigts dans les plaies d’un propos fade. Elle se traine comme un boulet d’ennui, empêche l’auditeur de s’écarter, écrase sa tête dans la trivialité des basses besognes quotidiennes. Aucune place pour nous, il faut avancer, tête baissée, pieds et poings liés dans la banale soirée de l’artiste. Tout ce qui faisait la liberté de Trinity est anéanti par une succession d’interludes grises, bétonnées, par des bavardages incapables et bornés.


Laylow a joué contre lui. Il a retourné la vie contre le songe. Lui qui avait les mains chargées de vérités, les a troqué contre quelques restes de rouilles. La banalité de l’histoire sous couvert d’ « étrange » n’a pas le caractère vaporeux des œuvres géniales. Il a préféré se cacher derrière sa narration pour éviter d’avoir à assumer la faiblesse de ses sons. Pour éviter de voir qu’une minorité pathétique de sons est à la hauteur du précédent opus


Et M.Anderson, piteux personnage qui vivait à peu près dans le court métrage, vient jouer sur le thème de la dualité cher à Laylow. Un homme de paille utile simplement à l’avancement du projet qui déroule son calvaire et ses poncifs sur le génie, l’excès et l’art.
Rien d’un fatal dédoublement, une partie censée éprouver douloureusement les impressions de la vie, les traduire même n’est, ici qu’un perroquet intérieur ânonnant « rêve » et « étrange » sans savoir qu’on répète un mot quand est moins sûr de sa valeur, de sa réalité.


J’espère qu’il reste quelques lyres sanglantes sous le diorama triste qu’il a livré.

ChatDeMontaigne
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le 16 juil. 2021

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