La dernière fois que Thee Silver Mt Zion a convoqué son orchestre, c’était en 2008, lorsqu’il était encore affublé de son Tra La La Band pour un mémorable “13 Blues For Thirteen Moons“. Deux ans plus tard, il lui aura suffi de se débarrasser de trois musiciens, de recruter un nouveau batteur, pour amputer un peu de son identité sans que sa musique en paye les pots cassés. En effet, dans la plus pure tradition montréalaise, “Kollaps Tradixionales” file une nouvelle fois rencard au punk, au blues, au psyché et au folk, pour un sixième salve qui ne vole toujours pas le terme “orchestration”. Revenant à un format plus classique pour qui connait Constellation - soit une poignée de longs titres - Efrim Menuck et sa bande prennent le temps de développer chacune de leurs idées, celles qui échouent généralement au sein de langoureuses ballades électriques, ou passages minimalistes et intenses (voire bruitistes) se passent le relais mélancolique. Bien sûr, Thee Silver Mt Zion Memorial Orchestra a toujours ses airs d’intellos préférant se pencher sur les conséquences psychiques d’un 21ème siècle oppressant plutôt que sur quelques considérations nombrilistes; ceux aussi de bureau d’études refroidissant instantanément les réfractaires à une musique plus “poussée”. Peu importe, les fidèles retrouveront intacte cette façon de marier comme personne les cordes et cuivres à la guitare de Menuck (désormais seule), tout en évitant le piège d’une cacophonie sans nom. Pour preuve, la suite “Metal Birds” qui s’en va même flirter ici ou là avec le stoner ou le krautrock. Ainsi, TSMZO mérite plus volontiers l’appellation de symphonie - électrique de préférence - celle qui éclate par exemple lors des deux quarts d’heure qui cadrent un disque finalement peu surprenant tant il souligne la constance de ses géniteurs. Pas de Constellation sans étoile… (Mowno)
Qui a déjà assisté à un concert de Thee Silver Mt. Zion Memorial Orchestra connaît toute la puissance explosive de ce groupe, qui mâche la misère du monde pour la lui recracher à la figure sous forme d'hymnes vindicatifs. S'éloignant des chants larmoyants de Horses In The Sky (2005) pour se rapprocher de la tension hypnotique de ses performances scéniques, la troupe canadienne signe avec Kollaps Tradixionales son album le plus direct mais aussi le plus lumineux – toutes proportions gardées. Peut-être parce que la bande d'Efrim a fait peau neuve en 2008, délaissant trois de ses membres en même temps que son encombrant suffixe de Tra-La-La Band. Sans doute parce que plusieurs titres sont nés en tournée et y ont mûri, pour être finalement polis dans les studios du hotel2tango. Le diptyque I Built Myself A Metal Bird/I Fed My Metal Bird The Wings Of Other Metal Birds, déjà entendu en live, ne perd rien de sa violence cathartique (chœurs égrenant leurs complaintes, guitares maintenues dans une tension permanente), mais gagne en précision, avec ses entrelacs de violons et son rythme trépidant. Les agressions à base de guitare de Kollaps Tradicional (Bury 3 Dynamos) ont la même netteté et manquent rarement leur cible. Malgré ces exactions noisy, ce disque s'oriente nettement vers une lumière lointaine mais présente. Certes, les poings restent levés pour dénoncer un quelconque dysfonctionnement dans la machine du monde. Mais cette fois, There Is A Light, et le titre d'ouverture s'attache longuement à le prouver. Son blues humble et gracieux, ses violons apaisés sonnent une trêve dépourvue d'aigreur ou d'ironie. Et comme pour montrer que l'optimisme ne dure pas que le temps d'une chanson, Efrim commente la prise de son à la fin du morceau : “I thought that was really good”. Ça tombe bien, nous aussi. (magic)
Il serait facile d'imaginer que les albums de Silver mount zion, tant ils défient les lois des formats de composition, soient conçus au cours de séances de labeur épuisantes et interminables. Pourtant, c'est sur la route, entre les concerts, que le groupe forge la majeure partie de ses disques. D'ou en 2005 l'ambiance "pastorale" par instants de "Horses in the sky", composé au cours d'une tournée dans les vastes espaces américains. "Kollaps tradixionales", lui, s'ouvre avec There is a light, que ceux qui ont vu les canadiens en concert en 2008 auront sans doute déjà entendu. Pourtant, cette ouverture est un peu en trompe-l'oeil. Car si There is a light est un beau morceau, même si honnêtement on lui retirerait bien quelques unes de ses quinze minutes, il s'apprécie davantage en aparté du reste de l'album. Son ambiance solennelle, épique et grave étant un peu hermétique. On peut y voir un écueil ou une raison de plus de s'offrir le double vinyle, le morceau occupant une face entière à lui seul. C'est en effet, à partir du diptyque I built myself a metal bird / I fed my metal bird... que le ton véritable de l'album et la nouvelle configuration du groupe apparaissent clairement. Car Silver mount zion joue désormais en formation serrée, amputé de deux membres. Loin d'en prendre ombrage ou d'en souffrir, le groupe trouve ici l'opportunité d'offrir un canevas sonore plus dense, où chacun joue sa partition en même temps sans aucune cacophonie. La batterie est plus présente et assure le tempo, la guitare suit le mouvement sans états d'âme, les cordes s'emballent, la voix d'Efrim, plus braillarde et atypique que jamais, s'en donne à coeur joie. Premier constat, ceux qui avaient trouvé que sur "13 blues for 13 moons", la clique avait évolué vers un son plus classique en sont pour leurs frais, on pourrait même dire que le clou est enfoncé. Cependant, "Kollaps tradixionales" sans regarder dans le rétroviseur, renoue également avec le lyrisme qui a fait la réputation du groupe. Les violons sont ainsi à l'honneur sur la complainte Kollapz tradixional, ce sont eux aussi qui ouvrent le bal sur Kollaps tradicional avant qu'une nouvelle déflagration dévastatrice vienne tout faire voler en éclats. Enfin, comme une synthèse merveilleuse de tout ce que ce groupe hors-normes, dans tous les sens du terme, est capable de nous offrir, 'piphany rambler clôture le disque de manière magistrale. Un départ recueilli, mélodique, un crescendo léger qui s'installe, un chant qui petit à petit nous serre à la gorge, un final où cordes, guitares, batterie et voix ne font plus qu'un pour un final insensé. A n'en pas douter, on tient là un des sommets du groupe. Bancal juste ce qu'il faut, tout à la fois chaotique, mélodique et intense, "Kollaps tradixionales" est un album bien à l'image du groupe, intransigeant, sans compromis ni surenchère, inimitable. Avec eux, la route est toujours ouverte, et de nouvelles aventures dans quelques mois nous promettent déjà de beaux frissons. (indiepoprock)