Invaders Must Die
7.1
Invaders Must Die

Album de The Prodigy (2009)

Honneur au Firestarter, hommage au fantasque Keith Flint

J’ai eu la chance, que dis-je, l’honneur d’assister par deux fois à un concert de The Prodigy. J’en ressortis à chaque fois épuisé, luisant d’un mélange de sueur et de salive provenant respectivement de ces corps et de ces mâchoires, usés, balancés d’un bout à l’autre de la salle, transformée pour l’occasion en arène, une heure et demie durant.


L’expérience Prodigy ne s’adresse pas à tous les publics. A l’image de l’impact de leur musique sur la scène britannique, les enfants terribles d’Essex sont connus pour leurs spectaculaires débauches d’énergie lors de lives endiablés, frénétiques, prodigieux.


Exit donc, les épileptiques et autres claustrophobes, ceux-ci risqueraient d’y perdre bien plus que les quelques milliers de calories et de neurones que chaque spectateur s’accorde implicitement à délaisser. Mais au-delà même de la claque audio-visuelle, aller voir The Prodigy en concert, c’est avant tout assister à un morceau d’histoire, pan tout entier de la culture britannique des années 90, marquée par la popularisation des rave parties et la montée en puissance du breakbeat, pour le plus grand bonheur de la jeunesse d’un pays encore marqué par les séquelles laissés par les années Thatcheuriennes.


Hélas, en ce bien triste lundi 4 mars 2019, Keith Flint, chanteur, danseur et figure emblématique du légendaire groupe anglais, a décidé de se mettre fin à ses jours à l’âge de 49 ans. Son corps fut retrouvé sans vie à son domicile, quelques semaines seulement après avoir achevé une tournée australienne avec ses collègues de toujours, Maxim et Liam Howlett.


Cette critique se veut être un hommage bref, modeste, mais néanmoins passionné, au visage et à la voix du mythique « Firestarter », ainsi qu’à mon album préféré de The Prodigy, Invaders Must Die.



So long, Firestarter



Pour être tout à fait honnête, cette critique vient également compenser, plus égoïstement, les mots durs que j’ai eu à l’égard de leur dernier album, No Tourists (que vous pouvez consulter ici). Non pas que le dégoût que me suscite cet album se soit apaisé : je le trouve d’autant plus mauvais et irritant qu’il constitue à présent la dernière œuvre laissée par le regretté Keith Flint et sa bande, parmi une discographie jusqu’ici pourtant riche et reconnue.


Toutefois, l’idée d’avoir seulement partagé toute cette négativité, sans m’étendre un seul instant, écrire ne serait-ce qu’une seule ligne, sur tout le bien que je pense de ce groupe, m’était insupportable. Il en allait de mon honneur de rétablir l’équilibre, et d’apporter une vision plus raisonnée et raisonnable.


Parmi toutes les raisons qui ont façonné mon amour pour Invaders Must Die, deux reviennent régulièrement :



  • Avec le morceau titre Invaders Must Die d’un côté et Stand Up de l’autre, cet album possède l’un des plus puissants couples de morceaux d’introduction et de clôture jamais entendus. Aussi inattendus que fédérateurs, ces titres s’inscrivent dans le panthéon musical des années 2000.

  • Un flot d’énergie brute, pure, ininterrompue. Des tubes fabuleux s’enchaînent pendant 45 minutes, pour notre plus grand plaisir auditif.


Publié en 2009, cet album marque le retour du groupe britannique à son style original, après un Always Outnumbered, Never Outgunned qui avait vu Liam mettre de côté Keith et Maxim pour un résultat, somme toute, mitigé. Plus orienté dance que ses prédécesseurs, sans renier toutefois ses racines breakbeat faites de percussions frénétiques et de synthétiseurs stridents, cet album est probablement le plus accessible de leur discographie.


Des guests de renom se sont invités au jeu de l’écriture et de la production : Dave Grohl et Jeff Mills sur Warrior’s Dance, ou encore Kim Deal sur World’s on Fire. Le tout forme un ensemble de morceaux survitaminés, où les ambiances apocalyptiques (Omen, Thunder) côtoient des paysages sonores plus colorés et délirants (Colours, Take me to the Hospital), avec de nombreux renvois au thème de l’affrontement et de la guerre (Run with the Wolves, Warrior’s Dance), avant de s’achever sur le glorieux Stand Up, véritable hymne fédérateur clôturant avec brio cet album.


Pour de nombreuses personnes comme moi, nées dans les années 90 et qui n’ont pas pu connaître l’âge d’or des rave parties et l’apogée du mouvement breakbeat/big beat, Invaders Must Die s’est révélé être un point d’entrée, certes décalé, mais déterminant dans ce courant musical et culturel. Et comme moi, elles se souviendront encore longtemps des premières lignes de basse du morceau titre, du fracas assourdissant des synthétiseurs de Omen, du changement d’instrumentation génial de World’s on Fire, des cuivres épiques de Stand Up


Avec la mort de Keith Flint, c’est toute une partie de l’histoire musicale des années 90 et 2000 qui s’en va. Fort heureusement, l’héritage laissé est conséquent, et le Firestarter n’a pas fini d’embraser les rave parties et dancefloors du monde entier, pour de longues années encore.



  • En quelques mots : Hommage à Keith Flint

  • Coups de cœur: Invaders Must Die, Omen, Run With The Wolves, Stand Up

  • Coups de mou : Warrior’s Dance

  • Coups de pute : RAS

  • Note finale : 8

JLTBB
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le 4 mars 2019

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