Into the Infernal Regions of the Ancient Cult par Draly

Certes la pochette est dégueue, mais Inquisition c'est pourtant du black sympa ; y a de la mélodie, des riffs accrocheurs, une prod propre et chaude à mille lieux d'un Darkthrone, et même un clavier qui pointe le bout de son nez de ci de là. Honnêtement, et malgré un chanteur qui ferait même marrer Abbath, le groupe est plutôt accessible pour qui ne serait pas féru de Black Metal.

C'est un premier album, les références du groupe y sont logiquement assez claires. On retrouve un peu de punk, beaucoup de Heavy, Celtic Frost en tête, et bien sûr les classiques de la deuxième vague, notamment Immortal et Burzum. Peut être un soupçon Dissection et Rotting Christ aussi ? Le groupe n'a pas encore réellement trouvé son style mais est finalement assez mature et parvient déjà à se démarquer grâce à quelques éléments caractéristiques qu'il continuera de mettre en avant tout au long de sa carrière, la 4e piste me semble d'ailleurs assez représentative de ce qu'on pourra trouver par la suite.

Commençons naturellement par "l'éléphant dans la pièce" : ces vocaux, principale source de controverse autour du groupe, qui m'évoquent la grenouille asthmatique. Dagon ne chante pas, ni ne hurle comme la plupart de ses camarades norvégiens, il déclame d'une façon robotique qui me rappelle parfois Vorphalack de Samael. Cela dit son timbre se rapproche bien plus de celui d'Abbath d'Immortal, la neurasthénie en sus. Le résultat est plutôt inégal et si je trouve Dagon risible sur les titres les plus dynamiques, cette approche me paraît pertinente dans les morceaux lents, voire atmosphériques, comme texture... une sorte de déclamation incantatoire qui se superpose aux autres nappes instrumentales.

La guitare se démarque du gros de la production Black Metal par un son chaud et rond. Les riffs se placent dans un registre plus grave que la moyenne - la plupart des groupes européens de l'époque privilégiant plutôt les hauts médiums - groovent parfois, et n'emploient le trémolo qu'avec parcimonie. A la batterie le blast est loin d'être omniprésent et n'est clairement pas un choix par défaut. L'album respire, on y trouve de nombreux changements du tempos (à défaut de parler de cassures rythmiques), le groupe sait quand agresser mais aussi quand ralentir et développer une ambiance. J'apprécie assez cette construction d'album en decrescendo, les derniers morceaux tendant progressivement vers le rituel. Question lyrics, en revanche, on retombe dans les clichés et on nous parle évidemment de Lulu le grand cornu. J'ai pas été consciencieux au point d'aller lire les paroles en détail mais, de ce que j'ai compris au fil des écoutes, ça va pas bien chercher loin et tout ça tient plus du folklore qu'autre chose... à l'image de la durée de l'album artificiellement rallongé pour atteindre les 66 minutes et 6 secondes.

Bien sûr, malgré une certaine originalité et toute la bonne volonté du monde, rien de tout ça n'est parfait. On pourrait reprocher à l'album ses quelques longueurs, son manque de cohérence ou ses quelques maladresses lorsqu'il s'agit des transitions. L'utilisation de samples de vieux films de la Hammer ne me semble pas toujours bienvenue non plus. Il reste malgré tout un bon petit album de Black Metal et, j'ai beau l'avoir découvert sur le tard, je ne peux pas m'empêcher de me dire qu'il ferait une bonne porte d'entrée dans le style, car moins abrasif que les classiques norvégiens.