Tes chansons résonnent dans mes oreilles, ta poésie ne cesse de me conquérir.


Homme incompris à l'âme torturée, Serge Gainsbourg s'est présenté à nous comme un provocateur sans limites et sans tabous et, loin de nous déplaire, nous nous sommes attachés à ce personnage d'un cinglant cynisme et d'une perverse ironie.
Provocation rimant avec création, Gainsbourg en a usé et a abusé, revêtant le "masque du cynique" comme il l'a si bien dit. Ce masque, Gainsbourg l'a façonné et a fini par l'embrasser pour mieux dissimuler son âme si sensible. Mais impossible de passer à côté de ce poète hors pair qui a su séduire et ensorceler par ses textes puissants et parfois décalés, car Gainsbourg fut bien celui qui avait la capacité de créer la surprise, d'aller là où personne n'osait s'aventurer. Audacieux à souhait, Gainsbourg a su s'entourer des plus belles femmes et plus particulièrement d'actrices insufflant un soupir de sensualité à ses créations les plus intimes.
De son idylle courte et intense avec la femme la plus désirable qu'il soit, Brigitte Bardot, ses plus belles chansons sont nées: Bonnie & Clyde, Je t'aime moi non plus ou encore Initials BB.



Une nuit que j'étais



A me morfondre



Dans quelque pub anglais



Du coeur de Londres



Parcourant l'Amour Monstre



De Pauwels



Me vint une vision



Dans l'eau de Seltz



(....)



Jusques en haut des cuisses



Elle est bottée



Et c'est comme un calice



A sa beauté



Elle ne porte rien



D'autre qu'un peu



D'essence de Guerlain



Dans les cheveux



Hymne à l'amour aussi bien poétique que sensuel, Initials BB incarne parfaitement la recherche d'esthétisme de Gainsbourg mais aussi l'amoureux désenchanté qu'il fut.
Si Gainsbourg n'éprouvait aucune difficulté à exprimer la sensualité, l'érotisme ne lui faisait guère froid aux yeux comme le prouve sa chanson Je t'aime moi non plus, à l'origine destinée à Brigitte Bardot puis qui fut chantée par Jane Birkin. Le texte de Gainsbourg débordant d'érotisme est pourtant teinté d'une pudeur raffinée. On retrouve d'ailleurs ce raffinement chez l'artiste lui même qui est parvenu à faire oublier sa supposée laideur. La poésie innée mais aussi la sublime sensibilité qui émanaient de l'homme "à la tête de chou" l'ont revêtu d'une élégance exquise, d'un charme troublant. Pourtant, derrière le dandy avant gardiste aux mocassins blancs, se cachait un homme certainement incompris voulant fuir le bonheur avant qu'il ne se sauve. Gainsbourg était avant tout un éternel pessimiste et était bien conscient que la chute est d'autant plus douloureuse lorsque le bonheur est à son paroxysme. Cette chute inéluctable, Gainsbourg cherchait à l'éviter en prenant de l'avance sur son destin, fuyant ainsi une certaine fatalité. La chanson Je suis venu te dire que je m'en vais est l'allégorie même de son renoncement à un amour qui serait éternel.


Provocateur professionnel mais poète délicat, misogyne affirmé mais amoureux des femmes, audacieux mais pessimiste, Gainsbourg a entretenu tout au long de sa carrière une dualité délicieuse qui ne cesse de nous fasciner.

Ayso
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le 9 mai 2015

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