Ceux qui connaissent par l'intime l'horreur des crises de panique, celles qui jettent certaines de leurs victimes par la fenêtre, comprendront pourquoi ils devront avaler leur boussole, bien profond, en pénétrant Hissing Fauna : la peur en surchauffe, la raison nécrosée et les spirales paranoïaques sont tout aussi acides et psychédéliques qu'une bonne grosse poignée de champignons. Le déjà plutôt timbré Kevin Barnes, tête patraque et pensante des déjà anciens et trop discrets Of Montreal (d'Athens, Géorgie), a audiblement beaucoup souffert pendant la confection de son album. D'une effarante complexité, Hissing Fauna est ainsi à la fois un discret petit chef-d'œuvre de pop azimutée et une incroyable expérience psychiatrique, un peu effrayante (quelle chose, quel piège, au détour d'un refrain ?) et totalement excitante (idem). Dans sa schizophrénie multiple, Hissing Fauna et son concepteur vont autant paumer leurs repères chez des Beatles étranglés (Sink the Seine) que dans un glam livide et malsain, cherchent des poux pop à Prince (Faberge Falls for Shuggie) ou font semblant d'écrire de l'electro-pop pour bambins innocents (la très Bisounours Heimdalsgate Like a Promethean Curse, effroyable déclaration de dépression), et bâtissent, avec les douze minutes étouffantes du très kraut The Past Is a Grotesque Animal, impressionnante cathédrale stylistique. Ces ténèbres mentales laissent pourtant filtrer, et ce en permanence, une lumière irréelle, fantasmatique... d'incroyables mélodies, incongrues comme ces rêves étranges qui hantent des journées entières, et belles comme un homme en train de guérir. (Inrocks)


On ne parle que d'eux sur la blogosphère, mais Of Montreal n'a rien d'un groupe débutant soudainement porté aux nues comme Clap Your Hands Say Yeah. De fait, c'est l'une des formations les plus prolifiques venues d'Athens, Georgia, des années 2000. Hissing Fauna, Are You The Destroyer?, leur huitième Lp, pourrait pourtant bien leur valoir le même succès que le groupe précité de ce côté-ci de l'Atlantique. Piloté par le génial Kevin Barnes, Of Montreal signe ici ce qu'on appelle l'album de la rupture (amoureuse). Et si l'on y retrouve la même disco pop psychédélique et incroyablement mélodique qui les caractérise, l'atmosphère du disque n'est guère à la fantaisie, ce qui le rend inévitablement poignant et en fait, par la même occasion leur meilleur disque à ce jour. Si l'on se passerait bien du premier titre (Suffer For Fashion), Hissing Fauna... nous entraîne vite dans un univers évoquant une dépression nerveuse qui donnerait envie de danser. Le point d'orgue est sans hésitation possible The Past Is A Grotesque Animal, où Barnes chante à tue-tête en une impossible catharsis, sur un beat irrépressible, entouré de choeurs et de boucles de synthétiseurs vintage. Et l'on est content d'apprendre que cet album, déjà l'un des meilleurs de l'année, lui aura permis de reconquérir sa chérie. (Magic)
Plus ardu encore à négocier que le toujours difficile deuxième album, le concept album enregistré sans argent au sortir d’une dépression. Présenté sous une magnifique pochette vitrail dépliable, “Hissing Fauna...” est à tout la fois disque du mois perché, délirant, lysergique et œuvre fondamentalement introspective, émouvante. Natif d’Athens (Georgie, USA et pas Canada, donc), Kevin Barnes raconte ici, en jouant quasiment tous les instruments, ce qui s’est passé dans sa tête ces trois dernières années : son divorce, sa déprime, ses pilules, etc. Partant de cette thématique quelque peu usée, Barnes évite de saisir la guitare en épicéa de mise dans ces cas-là et choisit au contraire d’enregistrer cette chose luxuriante, synthétique, bidouillée. Si l’homme s’est parfois égaré dans des problématiques douteuses (un album sur les mérites comparés du coquelicot et du pavot en 2001, hum), le terme concept n’a rien d’abject ici. Les chansons, tout simplement, s’imbriquent parfaitement. Les trois premières plages s’écoutent comme une pièce de Brian Wilson jouée sur des instruments futuristes : synthétiseurs plastoc façon Cars, boîte à rythmes naïve, petit son de basse enfantin. Là-dessus, Barnes chante d’une étrange voix aiguë (pitchée ?) et superpose des strates de chœurs à l’hélium, sonnant tantôt comme les Beach Boys (“Gronlandic Edit”), tantôt comme Prince. La grande force de Barnes : faire passer les paroles les plus dures comme une comptine acidulée. “Hey, les médicaments, vous êtes nuls contre la douleur ! Hey, les médicaments, s’il vous plaît, ne me bousillez pas encore une fois !” (“Heimdalsgate Like A Promethean Curse”). Sommet des sommets : “A Sentence Of Sorts In Kongsvinger”, titre pop enjoué, à tiroirs, où l’auteur narre l’effondrement de sa vie amoureuse survenu en Norvège : “Je sentais l’obscurité des groupes black metal locaux m’envahir”. Empilant les couches, les bruits, les climats, “Hissing Fauna...” s’apprivoise certes difficilement. Plusieurs explorations sont nécessaires pour apprécier ces arrangements labyrinthiques. Ainsi le tunnel central “The Past Is A Grotesque Animal”, 12 minutes au compteur, menaçant au début s’avère vite le morceau indispensable. Insistons : malgré ces titres imprononçables — on dirait du Gorky’s Zygotic Mynci’s — “Hissing Fauna...” ne s’adresse pas exclusivement aux imbéciles heureux, amateurs d’omelettes aux champignons accompagnées de mouillettes à l’acide. Barnes est un architecte qui ne perd pas le fil. Les Flaming Lips ont souvent tenté d’obtenir le même résultat, mais Wayne Coyne et sa bande ne peuvent s’empêcher de charger la mule en nappes planantes. Ces 50 minutes sautillent en permanence et quasiment rien ne semble superflu (le morceau funky “Labyrinthian Pomp”, à la rigueur). Coup de chance, depuis l’enregistrement, la femme de Barnes est paraît-il revenue. Surtout, Of Montreal s’apprête enfin à jouer dans de grandes salles (tournée française en mai) face à des fans fous et ce après dix ans à publier des vinyles colorés en quantité dérisoire. Happy end, donc. Et victoire grandiose pour tous les freaks de la planète. (Rock n folk)
Autant l'annoncer tout de suite, "Hissing Fauna, Are You the Destroyer? " est sans nul doute l'album le plus intéressant de Of Montreal. Membre du collectif Elephant Six, cela fait plus de dix années que le groupe de Athens (Géorgie) nous offre une pop mélodique confondante de créativité et d'ingéniosité. Si un virage electro/dance/pop fut attaqué sur "The Sunlandic Twins", c'était pour mieux préparer nos oreilles à leur nouvelle sonorité pop/techno/glam (bien plus subtile que celle de Pop Levi). Ainsi cette dernière production s'écarte encore un peu plus de la pop lo-fi psyché des premiers albums (comme The Gay Parade) sans en abandonner ses fondamentaux.Ecrit entre la Norvège (patrie d'adoption de Kevin Barnes, leader du combo) et Athens, cet album se construit encore comme les précédents : textes autobiographiques souvent sombres sur des compositions entraînantes. Kevin expose encore ici des thèmes aussi réjouissants que le suicide, le sentiment d'isolation, la dépression, mais en restant amusant comme sur "She's a Rejecter" : "There's a girl that left me bitter, I want to pay some other girl to just walk up to her and hit her". Mais c'est sans conteste sur "The Past is a Grotesque Animal", que Of Montreal convaincra tout le monde. Il nous offre là un morceau généreux de plus de 10 minutes sur l'histoire d'un gars qui devient fou suite à un amour perdu avec cette réplique intello sans doute bientôt culte: "I fell in love with the first cute girl that I met who could appreciate Georges Bataille". Barnes relate cela sur un tempo basique de riffs de guitare, très tendu et progressif mais qui finalement n'éclatera jamais. Impossible de ne pas rester captivé par cette litanie angoissée, un vrai chef-d'œuvre. Oscillant entre approche funk "Gronlandic Edit" et approche punk sur "She's a Rejecter", les Américains englobent tellement de styles en y apportant une telle personnalité que "Hissing Fauna, Are You the Destroyer? " pourrait presque remplacer à lui seul l'ensemble d'une discothèque. Barnes nous offre un disque très important et le packaging créé par son frère David est sublime. A écouter et à acheter donc. (Popnews)
Derrière le projet Of Montreal se cache l’excentrique Kevin Barnes, (issu du collectif Elephant 6) qui sort avec "Hissing Fauna, Are You The Destroyer ?" son dixième album. Sur ce dernier opus, l’américain s’épanche de façon autobiographique sur un sombre sujet (sa profonde dépression causée par une rupture sentimentale), mais sur un ton déjanté et festif, rendant l’ensemble naturellement jubilatoire. Ces douze morceaux aux titres stupides transpirent d’un cocktail survitaminé de pop psyché, de disco-funk et d’influences glam. Avec "Hissing fauna, Are You The destroyer ?", l’auditeur saute sans filet et se laisse malgré lui entraîner dans ces histoires de névroses, touche du doigt une sorte de folie dévastatrice présentée de façon jouissive et très dansante. Of Montreal aligne ici tube sur tube, avec des mélodies fraîches et des arrangements bariolés. Comment résister au dévastateur Suffer For Fashion (morceau d’ouverture de l’album), aux sonorités kitsch et cosmiques de Heimdalsgate Like A Promethean Curse, véritable ode aux anti-dépresseurs avec ses refrains marqués par des "Come on chemicaaaaals!!!", au funky Gronlandic Edit, au sémillant A Sentence Of Sorts In Kongsvinger ?… Après ces chansons qui font tourner la tête surgit au milieu du disque le sombre The Past Is A Grotesque Animal, un superbe morceau de plus de dix minutes qui dévoile cette fois-ci le désarroi de son auteur dans une tension contenue mais intense. Sur la deuxième moitié du disque, l’ambiance fanfaronne reprend du service, mais cette fois-ci l’ensemble est un peu plus posé.Les personnes allergiques aux rythmiques disco-funk, aux boules à facettes et aux voix de fausset "élastiques" passeront leur chemin, ou au pire, tenteront avec mépris une comparaison de mauvais goût avec les Scissor Sisters. En revanche, les autres sortiront euphoriques de ce kaléidoscope musical, de ce bouillonnement de mélodies frétillantes, de ces claviers en rafale, de ces boîtes à rythmes catchy, de ces chœurs foutraques… les montagnes russes personnifiées sur un disque. (indiepoprock)
bisca
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le 11 avr. 2022

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