Depuis 2008, sortie de leur précédent effort studio, Metallica n'a certes pas chômé. Nous avons eu le droit à plusieurs tournées, une flopée de témoignages live (audio et vidéo), un EP, un semi side-project avec Lou Reed, un film, j'en passe et des plus absurdes.
Les fans rongeaient leur frein, et les diverses déclarations du groupe quant au temps que demandait la conception d'un nouvel opus, surtout connaissant leurs nouvelles méthodes de travail, ne tendaient pas à les rassurer plus que ça. Puis, au printemps, coup de théâtre avec l'annonce que le disque sortirait à la fin de l'année. Et depuis, grosse machine promotionnelle en branle, avec clip du 1er single, de suite joué en live.. Apparition d'un second puis troisième clip, découverte de l'univers visuel, annonce des premières dates... Le monstre se réveille pour de bon, jusqu'à son arrivée dans les bacs, le 18 novembre 2016.
Le single ouvre ce double (ou triple, selon les versions) album. Une première droite dans la gueule, d'une durée parfaite pour ne pas nous foutre KO dès le début. Le poil se hérisse, le sourire fend le visage, les frissons parcours l'échine... Metallica est vivant et semble en pleine forme. On se retient de pas relancer cet "Hardwired" immédiatement pour pouvoir découvrir le reste.
On a raison, "Atlas, Rise !" déboule tout aussi puissamment et ne baisse pas le niveau qualitatif. Ce pont.. Ce refrain.. Le chant n'avait pas été aussi riche, aussi varié depuis une vingtaine d'année. On s'éloigne de la caricature qu'il avait eu tendance à devenir depuis le single "I Disappear" de 2000. Hetfield abat un boulot titanesque au fil des titres.
"Now That We're Dead" est un sommet tant au niveau des paroles que de la musique. Le groupe a révisé son patrimoine de ces deux dernières décennies avec ce morceau, avec son atmosphère typée Load-era et ses soli aux sonorité Death Magnetic. Mais le résultat ne vire pour autant pas dans l'auto parodie, et demeure très intéressant.
"Moth Into Flame", qui décrit les méfaits que la célébrité peut apporter, est tout aussi géniale. Le refrain entre directement en tête et ne veut plus en sortir. Le solo est un peu plus brouillon que le reste, mais ce n'est pas dramatique pour autant. Encore une fois, la palme revient à la ligne vocale, originale, variée et prenante. Mais Lars n'a pas non plus à rougir et sa frappe écrasante est tout autant jouissive.
On retourne dans l'univers lovecraftien avec "Dream No More", et son bel hommage à Cthulhu. Le rythme se veut lourd, menaçant et le chant légèrement trainant afin, sans doute, de simuler le réveil menaçant de cette déité, les paroles aidant en cela. Ce n'est pas le plus accessible des titres, mais il n'a pas à rougir de la comparaison avec ses petits frères.
Dernière plage de ce premier CD, "Halo on Fire", est un nouveau bijou. On se laisse facilement happer par cette intro relativement douce, puis ça accélère, ça explose et le morceau 100% metal mais teinté de blues par endroit nous laisse à genoux.
Il n'y a aucun temps mort, aucune déception sur cette galette d'une variété absolue. On peut parfois penser à du Slayer, de Maiden, du Priest mais il est indéniable que c'est du Metallica pur jus. Le sourire ne nous a pas quitté, et on enfourne le second disque dans la foulée, désormais totalement confiant.
"Confusion" démarre, avec son faux air d"Am I Evil". Il narre l'histoire d'un soldat revenu de la guerre traumatisé. Le rythme est plus lent, plus heavy, mais l'intensité, elle, n'a pas baissé d'un iota. Encore une fois la guitare sonne Load, mais la rythmique a un petit je ne sais quoi de "Breadfan". Metallica explore réellement toutes ses facettes dans ce disque, sans jamais se répéter de manière trop voyante, juste en parsemant ses nouveaux titres de clins d'œil relativement subtil.
"ManUNkind" débute par une intro maidenienne avant de donner irrésistiblement envie de taper du pied. Ce pourrait être un titre moins évident à assimiler, mais il n'en est pas moins intéressant. Sa structure sonne un peu moins naturelle que les autres, comme si ils avaient pioché dans différentes bases de données pour construire ce titre. Pour imager, on peut sentir les traces de colles en promenant son doigt dessus, alors que les précédents morceau sonnent d'un bloc. Mais laissons la chance à ce titre, le tout premier co-écrit par Trujillo. Et la façon qu'à Hetfield de chanter son "Quest to find" me fout la patate de manière inexpliquée.
"Here Comes Revenge", rien que le titre montre qu'on aura pas à faire à un slow. Ca ne sera pourtant pas le morceau le plus thrash de l'album. Le titre se veut menaçant, mais pour la première fois, Hetfield se révèle légèrement crispant dans sa façon de chanter "revenge", qui revient un peu trop souvent. Le solo demeure quant à lui efficace et bien rehaussé par la rythmique. On ne voit pas forcément les 7min15 passer, ce qui montre que le morceau n'est pas non plus à jeter. Ca ne sera assurément pas un classique, mais l'album en aura bien assez pour leur en tenir rigueur.
"Am I Savage ?" est lui aussi bien heavy et menaçant, avec son ambiance qui lui ait propre et son pré-refrain aux sonorités quasi Megadeth. Les couplets font quant à eux penser à du Sabbath morderne. Le solo de la 4ème minute fait de nouveau penser à du Load dopé. Ce titre relève le niveau de ce second disque de fort belle manière.
"Murder One" est donc la chanson hommage à Lemmy Kilmister. Alors certes, la musique n'a rien à voir avec ce qu'aurait pu faire Motörhead, mais je pense que le but est ailleurs. Il s'agissait de rendre hommage à une personne les ayant inspiré et étant devenu leur ami au fil du temps, et non pas de le pasticher. En ce sens, les paroles sont on ne peut plus parlantes, et débordent de références à l'homme aux bubons. C'est une belle preuve d'humilité de la part d'un groupe qui n'a jamais caché sa fanitude. Rares sont les groupes de ce standing à faire ce genre de geste, même si, évidement ce ne sont pas les premiers.
"Spit Out The Bone" finira d'achever vos cervicales dès la 1ere minute. Elle promet de faire très mal en live, y'en a qui risque de perdre des dents. Les couplets sont crachés à la gueule tandis que les refrains prennent un léger contre pied qui fait tout leur intérêt. Le solo accélère encore un peu avant un pont à la "Master Of Puppets", puis un autre solo. On fini cette fois bel et bien KO.
Avec cet album, Metallica passe en revue chacun de ses précédents disques sans aller jusqu'à l'écœurement. Entre deux riffs, on se dit "tiens, ça me fait penser à du Kill'em All" ou "Tiens, ça sonne comme sur Justice". Certes, mais cela est beaucoup plus subtile que sur Death Magnetic, et surtout, bien mieux produit. Les erreurs du passé n'ont pas été refaites, et l'écoute est bien plus fluide ici. Et il y a évidement énormément de variétés, de nouveauté sur ces titres, sur tous ces titres. Il ne faut pas voir l'album comme une repompe du passé, Metallica innove toujours, en assumant son patrimoine, voire ses influences (également de nombreux clins d'œil à la NWOBHM sont distillés ici et là). Sitôt le disque fini, on a envie de se le repasser, preuve de sa solidité.


A noter que le 3ème disque, bonus, contient une version finale de "Lord Of Summer", qui vaut son écoute et aurait mérité d'être inclus dans l'album, le groupe préférant sûrement ne proposer que du matériel totalement inédit. Ce titre est excellent.
Trois nouvelles reprises sont aussi disponibles, "Ronnie Rising Medley", "When A Blind Man Cries" et "Remember Tomorrow". La 1ere est à mes yeux la moins bonne. Celle de Deep Purple déborde de feeling mais a pas si bien vieillie que ça. Celle d'Iron Maiden est très intéressante mais n'atteint évidement pas l'originale, tout en s'en approchant.
Le reste est le concert donné cette année à l'occasion du "Discaire Day" dans un magasin, et la 1ere live d'"Hardwired".
Un disque bonus plein à craquer qui satisfera pleinement les fans.


Ce sera assurément pour moi, et pour beaucoup d'autres, le disque de l'année. Une réussite absolue.


Chronique faite après 5 écoutes, donc amenée à évoluer.

Shubby
9
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Créée

le 19 nov. 2016

Critique lue 990 fois

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Shubby

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