Sur le marché des matières premières alimentaires comme dans le domaine musical, tout ce qui est rare est cher, il convient d’apprécier à son immense valeur le retour sur le devant de la scène du grand escogriffe islandais au talent bien plus délicat que son patronyme “siffredien” ne le laisse entendre. Après une année 2003 bien remplie (deux albums de Bang Gang et Lady & Bird ; une couverture de magic en prime), Bardi Johannsson s’était éclipsé quelque temps, préférant se consacrer au septième art (réalisation d’un court-métrage et d’une bande originale pour Haxan, un film de 1921). Cinq ans plus tard, on ignore s’il peut être considéré comme un concurrent potentiel de Martin Scorsese et autres Kusturica de ce monde. Les onze titres de Ghosts From The Past prouvent, en revanche, qu’en matière de composition, il ne possède toujours pas beaucoup de rivaux. Entre mélancolie éthérée (Don’t Feel Ashamed, toujours en duo avec sa Lady française préférée) et grandes envolées mélodiques (Black Parade), Bardi Johannsson affiche une maîtrise toujours aussi déconcertante de l’évidence pop et des arrangements contrastés. N’hésitant pas à flirter avec ses vieilles amours rock’n’roll, il se permet même, au passage, de truffer ce troisième Lp de quelques tubes radiophoniques potentiels (I Know, digne de s’aligner, pour l’Islande, à l’Eurovision en face du Divine de Sébastien Tellier) avant de ralentir le rythme pour mieux revenir, dans la deuxième partie du disque, à des crescendos climatiques à la dynamique imparable. Finalement, il demeure sans doute une irréductible différence entre la musique et les produits agricoles : si, à l’avenir, Johannsson se fait moins rare, il n’en deviendra pas pour autant moins précieux. (Magic)


Qu’un musicien aussi raffiné que Bardi Johannsson ait choisi un sobriquet aussi pendable que Bang Gang pour évoluer en solitaire est une énigme. Mais ce n’est un secret pour personne, le flacon peut être des plus douteux, ce qui compte c’est que l’ivresse du Grand Nord soit au rendez-vous, comme sur Ghosts from the Past. Ce troisième album sous cette identité confirme en effet que question songwriting polaire, ce grand blond en costume noir est si habile qu’il peut se permettre bien des fantaisies, quitte à mettre un peu de temps à retrouver son chemin. Au terme d’un hiatus de cinq ans, on découvre donc que Bardi Johannsson a rangé une partie de ses alambiques et s’est orienté vers une écriture plus concise, plus directe, pour le meilleur comme pour le pire.

Limite vulgaire, la première moitié de l’album fait pour ainsi dire honneur au patronyme grivois, du solo de guitare chevelu qui abat en plein vol l’élégance chagrine de One More Trip aux conventions radiophoniques de I Know You Sleep. Sans parler des crispantes rodomontades électriques de Black Parade, qui aurait pu sonner le glas de cet effort s’il n’avait était défloré par The World Is Gray, un petit bijou d’évidence pop et de mélancolie, léger et immédiat comme un flocon se posant sur une langue.
Chassez le naturel et il revient au galop : c’est bien lorsqu’il délaye et opte pour la légèreté que Johannsson gravit des sommets. Sur Lost in Wonderland pour commencer, titre instrumental au lyrisme angélique, puis sur le morceau titre, qu’on préfèrera écouter à faible volume de crainte que ses mélodies de poche ne se fêlent.
L’on redécouvre alors pourquoi on s’était pris d’affection pour cette grande gigue : sa délicatesse vocale, ses arrangements cristallins… et sa complicité avec la toute aussi humble Keren Ann, qui vient raviver l’heureux souvenir de Lady & Bird le temps d’un Don’t Feel Ashamed spectral comme il se doit. De quoi faire passer, au final, ses compatriotes de Sigur Rós pour des habitués du Fury Fest.(Inrocks)


Sous l'âpre sobriquet de Bang Gang ne se cache nullement un gros rappeur aux dents plombées d'argent, mais le doucereux Bardi Johannsson, artiste pluridisciplinaire (producteur, réalisateur de courts-métrages, compositeur de bandes son…) qui, une fois tous les lustres, nous fait l'honneur de nous livrer la facette pop de son champ d'activités polymorphe. Cinq ans après "Something Wrong", tout de même entrecoupés de quelques apparitions de-ci de-là (album de Keren Ann), le spectre islandais revient pour nous hanter quelques temps, avec un troisième opus qui porte doublement bien son nom en regard de l'ambiance sombre et fantomatique qui s'en dégage (la pochette parle d'elle-même). Au menu on retrouve, sur fond de guitare / basse / batterie / piano et voix réverbées, de jolies mélodies pop vaporeuses (le tubesque "The World Is Gray"), forcément tristounettes ("One More Trip", "Every Time I Look in Your Eyes", "Forever Now"), aux arrangements soignés (nappes de cordes frottées, orgue, chœurs, programmation...) ; des titres plus rock, comme le très (voire trop) radiophonique "I Know You Sleep", l'électrique "Black Parade" ou encore l'obsédant "Lost in Wonderland" ; une sorte d'hymne funèbre ("Ghosts From the Past") qui finit sa course dans une symphonie céleste ; un magnifique duo coécrit avec sa fidèle complice Keren Ann ("Don’t Feel Ashamed") qui, à lui seul, vaut le détour ; et pour finir, deux titres coécrits avec Anthony Gonzalez, qui explorent les atmosphères propres au Grand Nord (cf. Sigur Rós…). En conclusion, on peut dire qu'on est en présence d'un sympathique petit geyser dont les effets bienfaisants risquent, toutefois, de s'évaporer assez vite.(Popnews)
Bardi Johannsson, sous son pseudo de Bang Gang était apparu en 2000 avec un premier album d'électro-pop sympathique, petit plaisir immédiat auquel on ne cherchait pas forcément de lendemains. Et puis en 2002, il avait sorti un album d'une toute autre facture, sur lequel il ne ménageait pas ses effets mais se posait en arrangeur hors-pair, pas maladroit qui plus est dans l'écriture. Son album l'année suivante en compagnie de Keren Ann sous le nom de Lady and Bird, petit traité de pop lettrée et discrète, nous laissait entrevoir que notre homme avait la trempe pour se faire une place dans le paysage musical. Et puis...plus rien, jusqu'à ce "Ghosts from the past" qui paraît aujourd'hui. 

Sauf que cinq ans, lorsque l'on a pas une notoriété susceptible de faire naître une attente fébrile, c'est un gouffre. Les enjeux ne sont plus les mêmes et il s'agit surtout de ne pas passer inaperçu alors que plus grand monde ne vous attend ou se rappelle seulement de vous. Très rapidement, deux constats s'imposent : Bardi Johannsson n'a rien perdu de son goût pour les arrangements alambiqués, bien marqués, qui risquent toujours de vous faire sortir du disque très vite tant ils semblent clinquants. Ensuite, il a eu la sagesse de recentrer son propos. Lui qui déléguait souvent le chant à des voix féminines, assure ici l'ensemble du chant et le disque révèle une unité sur la forme. Base instrumentale assez classique, ballades en mid-tempo, on sent l'intention de livrer un album concentré sur l'écriture, simple et direct. 
Le résultat, c'est que ça prend. Petit à petit, comme à chaque fois, l'oreille finit par passer le cap des parti-pris sonores et on se laisse bercer par les mélodies. La première moitié de l'album n'est pas bouleversante, mais on retient quand-même One More Trip. C'est à partir de l'instrumental Lost in Wonderland que le disque prend de l'épaisseur et révèle tout le talent de son auteur. Une capacité à écrire des mélodies évidentes, en structures circulaires, qui s'incrustent gentiment dans le cerveau. En point d'orgue, on retiendra Don't Feel Ashamed avec la participation de sa chère Keren Ann, et surtout Ghost From The Past, sur laquelle la voix de Bardi Johannsson n'est pas sans rappeler celle de Stuart Murdoch de Belle and Sebastian, pour un titre à l'émotion étudiée qui va crescendo.
Bang Gang réussit donc un joli retour, qui n'est ni un nouveau départ, ni un disque qui la ramène. Juste l'oeuvre d'un type soucieux de démontrer que pour continuer à faire des disques, il faut d'abord montrer qu'on sait écrire des chansons. A une époque toujours avide de sensations, il n'est pas sûr que la formule séduise plus que cela. C'est pourtant essentiel. (indiepoprock)

bisca
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le 13 mars 2022

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