FORGET
7
FORGET

Album de Xiu Xiu (2017)

Xiu Xiu (dites chouchou) sortira son quatorzième album le 24 février. Loin de coller au style du groupe (qui s’est fait connaître pour ne justement pas en avoir), il est considéré par son penseur comme le plus pop de leur discographie. Le penseur, c’est Jamie Stewart, cerveau auquel se greffe de manière très variable d’autres membres.
Leur dernier album en date était une reprise de la BO de Twin Peaks. Une reprise sépulcrale qui aura rappelé au bon souvenir des fans l’album Nina, 13 reprises des morceaux emblématiques de Nina Simone. A l’aise dans tous les styles, Jamie nous sort là son album le plus pop selon lui, mais surtout le plus intéressant de ce début d’année.


D’entrée de jeu la noirceur du compositeur nous saute au visage avec The Call, à mi-chemin entre Joy Division et David Bowie. Efficaces synthés et salaces guitares, la voix perchée et torturée finit de nous achever. Nous n’en sommes qu’au premier morceau. Certains s’arrêteraient même dès lors. Mais viens Queen of the Losers, ses chants prophétiques, ses lasers sidéraux et sidérants. Épique à souhait. L’heure est au questionnement avec le morceau suivant, Wondering, et la véritable entrée dans la pop susmentionnée, un morceau plus abordable qui laisse respirer les inspirations du groupe américain, l’écoute se fait plus agréable, plus mélodique, on perçoit petit à petit le cheminement de l’oeuvre. Un sentiment confirmé par Get Up, magnifique ballade électronique empreinte de mélancolie suicidaire. Magistral.


Tout le génie du groupe tient dans le track suivant, Hay Choco Bananas. Grosse basse et mélodie claire, le morceau attire l’oreille jusqu’au basculement, la seconde partie du morceau prônant la cacophonie ordonnée du groupe, un bref passage dans le calme avant la tempête et ce break joliment orchestré par les cowbells, et le morceau part vers les sommets du noise cher à Stewart. Culminant. On croit entrevoir la fin lorsque se termine le larsen au même titre que le morceau. Sonne alors le vent du murmure de Jenny GoGo , sixième morceau du dix titres. Des chants d’outre tombe proférés au rythme de la caisse claire, on ne retiendra que la langueur du désespoir qui s’y repaît. Ne vous y méprenez pas, At Last, At Last n’est pas le dernier morceau du disque. Le plus calme et le plus mélodieux, oui. Mais seulement au début, car dès le premier couplet passé, Jamie joue encore sa vie et chante du haut de la montagne de son talent assaillie par un chœur de zombies et de scies musicales. Flippant.


Vient le morceau titre, Forget, on cherche le faux pas. Les instruments rebondissent autour de la basse, la voix y glisse, épique. L’appel à l’oubli prend tout son sens, l’album tient ses promesses, on veut bien signer pour l’oubli si Jamie insiste. On se met à danser.


Les premières notes de guitare sèche de l’album, et les seules, se font entendre sur le magnifique Petite, Jamie y dévoile sa voix de tête, le fantôme de David Bowie y apparaît, Ian Curtis jouxtant son épaule. On comprend enfin ce que Jamie Stewart cherchait : il invoque les morts, il les rappelle à la vie. Car la vie est faite d’oubli, assurément, et ça l’américain l’a compris. Il nous délivre alors de façon magnanime de cette culpabilité, celle si blessante d’oublier.


Faith, Torn Apart clôture l’album en 8 minutes, et nous dit au revoir sobrement, d’un geste nonchalant de la main. Ou plutôt dit-il adieu, j’ai encore oublié.

JakobRajky
8
Écrit par

Créée

le 9 janv. 2019

Critique lue 119 fois

1 j'aime

JakobRajky

Écrit par

Critique lue 119 fois

1

D'autres avis sur FORGET

FORGET
JakobRajky
8

A Dieu

Xiu Xiu (dites chouchou) sortira son quatorzième album le 24 février. Loin de coller au style du groupe (qui s’est fait connaître pour ne justement pas en avoir), il est considéré par son penseur...

le 9 janv. 2019

1 j'aime

FORGET
YasujiroRilke
6

Critique de FORGET par Yasujirô Rilke

Xiu Xiu n'est pas Aphex Twin ou Panda Bear, mais son goût "à-la-Badalamenti" pour les profondeurs musicales, les vortex spirituels et les dimensions planantes en font un ténor du genre. FORGET séduit...

le 7 mai 2017

1 j'aime

FORGET
CashMiguel
7

de la Pop dystopique ?

très bon point d'entrée dans l'épaisse discographie du groupe. Sonorités très pop, avec une ambiance assez lourde tout de même. L'album ne laisse personne de marbre. En réalité, c'est sans doute...

le 18 sept. 2020

Du même critique

Hunter
JakobRajky
8

To hunt and to be hunted

Quand on se penche sur le manifeste qui accompagne Hunter, troisième album studio de Anna Calvi - rédigé de la main de cette dernière, on est d’emblée frappés par la justesse et la ferveur du propos...

le 9 janv. 2019

2 j'aime

Negro Swan
JakobRajky
8

Le chant des sirènes

Il est une voix de sa génération. Devonté Hynes, dit Blood Orange ou encore Lightspeed Champion, artiste pluriel et roi de la métaphore, revient avec un énième opus (le quatrième sous le nom de Blood...

le 9 janv. 2019

2 j'aime

Rap Album Two
JakobRajky
9

Retour d'enfer

Après une descente aux enfers dans les tréfonds de l’alcoolisme, l’américain revient avec une ode à la sobriété. C’est avec une lettre ouverte que l’homme a mis un terme à cette sombre période dont...

le 9 janv. 2019

1 j'aime