Farm
7.4
Farm

Album de Dinosaur Jr. (2009)

Eminem vs Marilyn Manson, ou le grand match (un peu nul) du moment dans la catégorie “retour des figures emblématiques qui ont caressé le mainstream des années 2000 dans le sens du poil à gratter”. Mais en coulisses, loin des caméras, dans la catégorie poids plume et goudron, se joue un autre match : Dinosaur Jr vs The Lemonheads, ou le retour de deux groupes cultes de l’indie-rock des années 90. A ma gauche, Dinosaur Jr, sorte de croisement entre Neil Young et l’éthique hardcore du milieu des années 80. Ou Sonic Youth sans New York, avec une coolitude slacker toute provinciale. A ma droite, The Lemonheads : un peu pareil en blond, ou pour les filles, avec plus de guitare acoustique, de pop, et des poutres country-rock apparentes – on soupçonne Evan Dando, leader charismatique du groupe, d’être le fils caché de Gram Parsons. D’ailleurs, sur l’album Varshons, de reprises, il commence par une chanson de Parsons. La chanson dit “Je n’en peux plus” (I just can’t take it anymore), mais elle prouve qu’Evan Dando peut encore beaucoup. Varshons, c’est onze reprises éclectiques (de Townes Van Zandt à GG Allin, d’Arling & Cameron à Leonard Cohen), c’est deux duos avec Kate Moss et Liv Tyler, c’est une voix profonde et des guitares légères, c’est le jus des Lemonheads, et c’est une réussite inespérée.En face, Dinosaur Jr fait grise mine : tout en éboulis de guitares électriques, en pop-songs rétamées, Farm n’est pas mauvais, mais il se contente de répliquer, en pas mieux, d’autres disques du groupe, usant jusqu’à la corde une formule unique, qui n’excitera que les fans nostalgiques. Dans le genre, Sonic Youth les enterrera tous. (Inrocks)


Passée la reformation de Dinosaur Jr, accueillie avec un enthousiasme qui a fait chaud au cœur, peut-être même à celui de l’autiste Jay Mascis, le plus dur reste à faire : durer pendant que l’actualité s’entiche d’autres reformations. On trouve même une chanson baptisée Plans sur ce nouvel album, aussitôt infirmée par une seconde : I Don’t Wanna Go There. Même s’il s’est toujours fait un plaisir de jouer le sot, Mascis ne peut l’ignorer. Farm, comme son prédécesseur Beyond (2007), sera distingué aujourd’hui pour des raisons identiques à celles qui ont pourtant voué aux gémonies des disques comme Where You Been (1993) ou Without A Sound (1994) : beaucoup de soli et peu de chansons. Au détail près que ces albums jadis dépréciés avaient trouvé leur public, tandis qu’aujourd’hui, Dinosaur Jr récolte un bon accueil critique mais une certaine indifférence du public, fans exceptés. Ces derniers sont probablement les plus concernés par le toujours sonique Farm, dont l’intitulé hommage le fameux tee-shirt emblème du groupe, ce signe distinctif appelé “the classic purple cowhead Dinosaur Jr tee-shirt”. Dans cette ferme des non célébrités, la tête de veau se suffit à elle-même. Farm rappelle un autre Lp d’après l’éclat, The Sebadoh (1999), où le groupe de Lou Barlow, songwriter dont l’activité principale est désormais à nouveau celle de bassiste de Dinosaur Jr, ouvrait les hostilités en ces termes : “I can’t ignore, I can’t exist/This is good, It’s all we have”. Les nouvelles chansons de Jay Mascis et de ses acolytes survivants sont pourtant moins moroses, surtout lorsqu’elles essaient de tutoyer la beauté ascensionnelle des Byrds (Your Weather et surtout Imagination Blind). Pour le meilleur et pour le plus triste, le terme happy few convient donc bien à ceux qui écouteront cet album (Magic)
Autant vous prévenir tout de suite, écrire une chronique sur un nouveau disque de Dinosaur Jr est plus complexe que ça en a l’air. Le sens de la formule n’étant jamais très loin lorsqu’il s’agit de parler de ce trio de fossiles, il convient d’avouer qu’on est tenté de vous redire tout ce qui a déjà été dit sur ce groupe, tant leur dernier album "Farm" s’inscrit, avec excellence, dans la continuité de la discographie de Dinosaur Jr. Mais comme on est du genre à relever des défis, nous ne pouvions pas passer à côté de ce nouvel opus. Une fois n’est pas coutume, saluons tout d’abord l’immense talent d’écriture de Lou Barlow, qui excelle sur ce disque dans la réalisation de deux titres, Your Weather et Imagination Blind, où il réussit sans difficulté à voler la vedette à Jay Mascis. A l’évidence, Barlow sait chanter juste, et impose un supplément d’émotion dans ce disque rempli de bruit et d’électricité, en réalisant là deux morceaux qui retrouvent la hargne et le bouillonnement de son autre groupe Sebadoh. Il est d’ailleurs particulièrement intéressant de constater dans une vidéo circulant sur internet, que Lou Barlow reprend Imagination Blind seul avec une guitare folk, retrouvant là l’esthétique nu et acoustique du début de sa carrière. Pour le reste Jay Mascis demeure fidèle à lui même et enchaîne les titres remplis de riffs abrasifs et de solis saturés, appuyés par les lignes de basse chargées en fuzz de Barlow et la rythmique tatapoum de Murph. Sur des morceaux aussi efficaces que Pieces ou encore Over It, on retrouve l’inimitable voix nasillarde de Mascis ainsi que ce grand écart entre Black Flag et Neil Young. On décèle même une référence à Ohio ou encore Everybody Knows This Is  Nowhere sur le superbe I Don't Wanna Go There qui culmine sur la fin de "Farm". On y entend donc tout ce qui peut plaire aux fans de base de Dinosaur Jr, mais aussi quelques légères variations intéressantes, notamment lorsque Dinosaur Jr commence à ralentir le tempo. Plus bluesy et long en bouche qu’à l’accoutumée, Plans ou encore Said The People permettent au groupe de prendre en hauteur et de trouver là, n’ayons pas peur des mots, ses lettres de noblesse. Alors qu’on pensait que cela ne serait jamais possible, il faut bien reconnaître que Dinosaur Jr réalise avec "Farm" quelque chose qui ressemble presque à un album de la maturité. Et finalement quel autre groupe peut se targuer d’avoir aussi bien réussi sa reformation en réalisant deux très bons albums et une poignée de concerts qui font plaisir à voir ? (indiepoprock)
En pleine recrudescence de reformations le plus souvent pathétiques, celle de Dinosaur Jr, en 2004, n’allait pas pour nous rassurer. C’est même l’appréhension qui nous habitait trois ans plus tard, quand le groupe confirmait quelques concerts par un nouvel album qui sentait à plein nez un registre maîtrisé sur le bout des doigts, appliqué avec une telle facilité, de tels automatismes, qu’il cachait difficilement les velléités financières qui pouvaient en découler. Sauf que Jay Mascis, le premier, ne les a jamais contredites, et l’on avait presque oublié à quel point il était bon de s’écouter de nouvelles compositions de Dinosaur Jr, chose qui n’était plus arrivé depuis dix ans. En 2007, “Beyond” sonnait donc comme un plaisir retrouvé. Mieux, il effaçait littéralement le temps passé depuis son successeur “Hand It Over”, comme si le rock d’un des plus mythiques combos des années 90 était finalement inaltérable. C’est donc cette fois sans aucun à priori qu’on accueille “Farm”, deuxième opus depuis ce qui apparaît aujourd’hui comme une des reformations les plus réussies de ce nouveau siècle. D’autant que Mascis et sa bande n’ont toujours pas pris une ride, alignent une fois encore une multitude de tubes à l’efficacité incontestable, faits de mélodies à l’impact immédiat, de riffs à n’en plus finir (ceux qui poussent respectivement “Plans”, “Said The People” et “I Don’t Wanna Go There” aux alentours des sept, huit et neuf minutes), et de cette voix légèrement cassée qui fait toute la personnalité de son célèbre frontman. Pas véritablement de surprise donc, juste la déclinaison en douze titres d’un savoir faire un brin répétitif qui a toujours su s’imposer au travers des années et des modes. Car bien qu’ils transpirent définitivement les années 90, “Pieces”, “I Want You To Know”, “Over It” et “There’s No Here”, tous petits brûlots estivaux qu’ils sont, raviront une fois encore les nostalgiques comme les oreilles neuves désireuses de goûter à leur propre sang. Et pour cause, que Dinosaur Jr la joue uptempo (”Friends”) ou ballade électrique (”Ocean In The Way”, l’excellent “See You”, seule véritable originalité de cet album), les potards dépassent souvent les limites légales mais ne tombent jamais dans la cacophonie rebutante. Preuve encore avec le très dense “Your Weather” au refrain parvenant néanmoins à jouer des coudes et faire du titre un des meilleurs passages de ce disque. Fort de son expérience, le trio, bien qu’il ne s’invente rien, semble encore ici se libérer, livre à domicile des émotions encore chaudes, slalome entre les clichés sans chuter, et fait ainsi de “Farm” une pièce non négligeable de son indispensable discographie. (Mowno)
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le 27 févr. 2022

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