Drunk
6.9
Drunk

Album de Thundercat (2017)

« I do what I want », tiré du morceau A Fan’s Mail, pourrait servir à lui tout seul pour un brin résumer l’album Drunk, de Thundercat. L’œuvre s’assimile en effet à un chemin boisé uniquement connu par ledit artiste, reliant nos contrées et le monde des merveilles d’Alice. Si cet univers particulier semble parler au virtuose et blagueur de la 4-cordes, qui paraît connaître la route sur le bout de ses doigts, force est de constater que l’épreuve est ardue pour l’auditeur.


Thundercat, artiste prolifique par ses collaborations avec Flying Lotus ou Kendrick Lamar, s’offre alors le luxe de s’écouter et de laisser parler ses ardeurs artistiques. Le style est reconnaissable, sans doute inimitable, et doit être soulignée la force créative de l’exubérant compositeur. On ne se trompe pas, l’homme est le même que celui de Apocalyspe, sorti 4 années plus tôt. Face au constat de la grande régularité stylistique de Thundercat au niveau de ses projets solo, le talent de l’artiste éclate aux oreilles de l’auditeur, tant les possibilités mélodiques qu’il exploite sont nombreuses, mais l’effet de frustration arrive vite aux tympans : les morceaux, qui possèdent un indéniable sens musical, s’apparentent et font naître l’envie d’un dépassement des frontières du royaume de Thundercat. Le bassiste ne se met ainsi à aucun moment en danger, retranché dans son univers, alors que c’est précisément là qu’on pourrait l’attendre. Dommage, vraiment.


Hormis de rares morceaux où l’univers s’ébouriffe un tant soit peu, à l’instar de Friend Zone, les sonorités invoquées par le Californien peinent à se renouveler, tout comme ses placements de voix. L’inventivité, qui semble pourtant lui coller à la peau, ne transparaît pas le long des morceaux. Thundercat crée de fait un étonnant paradoxe : bien loin de rimailler, il compose avec qualité mais cela ne nous stupéfait guère et ne nous emporte que peu. Son entreprise chimérique pâtit d’une musique qui n’atteint pas le but escompté de rallier l’auditeur à son arche de Noé enchantée. Les mélodies, reflet des prédispositions du musicien, se confondent souvent et souffrent finalement d’un manque de variation et de diversification dans les ambiances. L’univers singulier de Thundercat est au bout du voyage suffocant pour l’auditeur. Le cabinet de curiosités enchantée se révèle, en n’étant toutefois loin d’être vide, insatisfaisant au regard de la qualité de son créateur. Désormais, tâche est de se demander si la boîte de Pandore était ouverte, ou si elle demeure encore fermée. En espérant votre retour prochain de votre univers Mr Thundercat.

Débruit
5
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le 11 juin 2018

Critique lue 403 fois

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