« Construction Time Again » est essentiel pour plusieurs raisons dans la discographie des Modes... d'ailleurs, il est rare qu'un seul de leur album ne soit pas intéressant, surtout dans les 80's. Tout d'abord, il est le premier album où l'on peut entendre le claviériste Alan Wilder, celui-ci ayant rejoint la bande durant la tournée précédente. Il nous gratifie même de deux compositions, plutôt réussis que sont « Two Minutes Warning » et « The Landscape is Chaning » ; il suffit d'écouter les deux une après l'autre pour reconnaître d'emblée sa touche, touche qui sera déterminante pour la suite de leur carrière puisque c'est avec ce quatuor que la formation connaîtra ses plus grands chef d'oeuvres et heures de gloires.

Deuxième fait important, le changement de direction du song-writer principal Martin Gore qui, après un concert d' « Einstürzende Neubauten » se met à s'intéresser fortement à la musique industrielle. Et ça s'entend ! Armé d'un Synclavier, le groupe importe des samples de différentes usines et cela donnera la performance « Pipeline », entièrement composé de sons réels... bien que cette expérimentation de six minutes ne m'enchante guère plus que ça. Mais cette technique sera utilisée sur une bonne partie de l'album pour servir une synthpop se mettant enfin à être audacieuse. Le travail sur le son des beats plus « métalliques » nous permet de nous imaginer sans problèmes l'ouvrier et sa pioche de la pochette, donnant le rythme à l'album.

Malgré une naïveté encore présente, Gore commence d'ailleurs à s'intéresser à la politique, au capitalisme, ce qui donne des textes (à demi) engagés. De leur tournée quasi-mondiale, le groupe a aussi apporté des sonorités et des accords typiquement asiatiques, ambiance qui influencera sans doute Alphaville pour leur « Big in Japan » un an plus tard. Toutes ces nouvelles idées, toute cette reconstruction donne forcément un ensemble plus convaincant que sur « A Broken Frame ».

Il suffit d'écouter les trois singles que sont « Everything Counts », « Love, in Itself' » et « Told You So » pour s'en rendre compte, la variété sonore, le bricolage de bruitage et la dynamique marchent ici à merveilles. On sent juste Dave Gahan encore un peu en retrait. Sur les refrains, la star n'est pas lui mais les synthés et tous les petits effets autour faisant ressortir les mélodies. Mais bon, sa voix fait de mieux en mieux le boulot et il est irréprochable à plus d'un titre. L'énergique « More Than a Party » ainsi que « Shame » et « And Then... » sont plus anecdotiques, du remplissage d'une certaine qualité. La reprise en fin d'album est elle aussi un peu inutile, si ce n'est qu'elle nous rappelle la réussite qu'est ce troisième essai.

Deuxième partie de la trilogie de la Reconstruction, premier de la trilogie Industrie, un Amour qui se ressent de Berlin au Japon en quittant Basildon, Depeche Mode montre qu'ils peuvent jouer dans la cour des grands, et ça ne va que se confirmer par la suite.
Strangeman57
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le 9 déc. 2014

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