Cast of Thousands
7.2
Cast of Thousands

Album de Elbow (2003)

Sur ce deuxième album d'Elbow, Cast of Thousands, rien n'a vraiment changé, et pourtant on se laisse une seconde fois happer sans résistance par ces chansons comme modelées dans la vapeur d'eau, sculptées dans les nuages, traversées d'éclairs soudains, constamment en lévitation au-dessus des agitations mondaines du rock anglais. Prog ou pas prog, on s'en moque désormais, puisque Elbow prouve qu'il a suffisamment de recharge d'énergie et d'émotions dans le coffre pour prétendre à toutes les ascensions : le ciel est désormais sa limite.Toute la réussite de Cast of Thousands repose sur l'équilibre impressionnant entre la nudité et la surcharge instrumentale qu'Elbow est parvenu à créer, sans jamais faire dans le remplissage de pistes. On y entend ainsi une chorale gospel, ou plus loin la foule de Glastonbury, invitée par le groupe à reprendre en chœur un drôle de mot d'ordre antiguerre ("We still believe in love, so fuck you" sur Grace under pressure) sans friser l'emphase gratuite et démago. Cast of Thousands révèle surtout des milliers de détails qui s'aimantent aux chansons de manière quasi subliminale, tandis qu'à l'opposé des turbulences imprévisibles traversent comme un supersonique un morceau comme Snooks, hommage cinglant au bluesman de La Nouvelle-Orléans Snooks Eaglin. On y note aussi une forte empreinte du folk anglais, de Nick Drake à John Martyn, sur les ballades ailées et tourmentées de l'album. Autre exemple des nouveaux territoires de chasse d'Elbow, I ve Got Your Number est basé sur un passage furtif du Electric Ladyland d'Hendrix, avec en plein milieu une averse d'orgue à faire trembler jusqu'aux parois de la tombe du flambeur de guitare. Moins progressif, plus agressif, rarement régressif, Elbow n'avait pas intitulé pour rien son premier single Newborn : depuis qu'on le fréquente, ce groupe est en perpétuelle renaissance.(Inrocks)
Accouchement difficile pour ce deuxième album d'Elbow qui méritait bien une telle attente. Il faut dire que les Mancuniens savent s'entourer. Le producteur Ben Hillier, déjà présent sur Asleep In The Back, reste aux manettes. On peut lui faire confiance les yeux fermés, puisqu'il a récemment produit un petit bijou, nul autre que le Think Tank de Blur. Outre Hillier, les membres d'Elbow ont fait appel à leurs voisins de Doves et Alfie, et à un bon millier d'autres personnes (d'où le "thousands" du titre...). Bien plus d'un millier en réalité si l'on compte la foule de Glastonbury reprenant en choeur "We still believe in love/So fuck you" sur Grace Under Pressure. Un casting impressionnant donc, pour ce disque où l'empreinte des Doves est cette fois franchement perceptible, autant au niveau de l'éclat que de la puissance mélodique (les superbes Fugitive Motel et Switching Off). La voix de Guy Garvey, quelque part entre celles de Jimi Goodwin (Doves) et de Chris Martin (Coldplay), sert à merveille une atmosphère sombre, ponctuée de lueurs d'espoir. Recette déjà épuisée ? Même si Elbow peut donner l'impression de se complaire dans l'émotion facile, la formation se révèle en définitive particulièrement inventive. Le quintette possède avec Radiohead la même appétence pour la recherche de nouvelles sonorités, qui s'illustre notamment sur Snooks (Progress Report). Mais cessons d'étouffer Elbow par de sempiternelles comparaisons, et laissons-le parvenir à maturation, ce qui ne saurait tarder. (Magic)
La première écoute m'a laissé quelque peu indifférent, il faut l'avouer. Mais paradoxe, l'indifférence, ça finit par intriguer, alors j'y suis revenu. C'est bien, Elbow. Ce deuxième album en clair obscur contient tout ce qu'il faut de mélancolie, d'intensité mais ne force pas à l'abus de Kleenex. Les mélodies ne sont jamais faciles, les structures des morceaux sortent des sentiers battus et l'ambition manifeste du disque ne fait pas le lit de l'emphase. La production est à la fois aérée, sans surcharge et riche, parsemée ça et là de quelques petites touches plus expérimentales qui retiennent l'attention au fil des écoutes et fait montre d'un soin du détail enviable (exemples parmi d'autres : le côté orientalisant de "Snooks", un des titres marquants à la première écoute, le choeur gospel du morceau introductif, "Ribcage", et du grandiose "Grace Under Pressure", l'émotion touchante de "Fugitive Motel" et de sa rythmique très Talk Talk). Guy Garvey, chanteur rouquin et auteur barbu des textes de son état, célèbre avec retenue ce mariage entre profondeur et immédiateté, entre confort et dépaysement et ne déparerait pas, vocalement parlant, en Peter Gabriel du XXIème siècle, impression renforcée par la légère coloration world de certains titres. Mais voilà : "Cast of Thousands" a beau être exactement aux antipodes d'une quelconque hype superficielle, et malgré tous les compliments sincères énoncés plus haut, il ne provoque chez moi qu'indifférence polie et, malgré quelques moments plus intenses, à peine plus d'excitation que le nouveau Sting. Irréprochable, "Cast of Thousands" fait figure d'ultime album romantique pour les gens qui ont passé l'âge de l'être à l'excès. Bienvenue dans l'âge adulte.(Popnews)


Un disque d’Elbow, c’est un peu comme un bon vieux dimanche de novembre sous la grisaille. Derrière l’ennui, qui semble inéluctable, se dissimulent des petits riens qui font tout. En écoutant Cast Of Thousands d’une oreille distraite, il y a bien peu de chance d’y trouver un quelconque charme...Et pourtant, un soupçon d’attention et les compos du quatuor de Manchester prennent une toute autre dimension. Les mélodies, presque abstraites dans un premier temps, se découvrent d’avantage dans un deuxième puis se révèlent totalement enfin. Des harmonies tenues secrètes se dévoilent au grand jour. La voix de Guy Garvey qui semblait si banale prend des accents singuliers et fascine l’auditeur. La brume épaisse se dissipe donc au fil des écoutes estompant le mystère et laissant place à un disque d’automne audacieux, parfois même brillant, auquel on reviendra fatalement.(liability)  
bisca
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le 27 févr. 2022

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