Qu’est-ce qui distingue, en 2007, un bon groupe de rock « à l’ancienne » d’une banale bande de bourrins fidèles au sempiternel boogie blues de leurs aînés ? Le pedigree, le parcours étrange, l’histoire atypique, tout ce qui définit, au-delà d’un format et d’un son qui ne brillent pas de prime abord par leur originalité, une identité, une singularité. De ce point de vue, les Kings of Leon sont un cas d’école. L’attrait de leur southern rock tendance garage aurait pu se limiter au rugueux et enlevé Molly’s Chamber, titre phare de leur premier album paru en 2003. Sauf qu’il était impossible de ne pas s’intéresser de plus près à ces sales gamins retors, honte de leur ville, Nashville, capitale de la country bon teint. Mieux, le groupe se composait de trois frères et un cousin – Nathan, Caleb, Jared et Matthew Followill –, rejetons d’un pasteur défroqué bien allumé qui les trimbalait, gamins, de prêche en prêche. C’est dire si la musique de ce quatuor de rockers mal dégrossis déclenchait notre imagination, sonnait subitement différemment à nos oreilles. Mieux, le groupe, loin de se répéter, a affiné un style propre, oscillant entre un inquiétant croisement de Lynyrd Skynyrd et du Gun Club ou bien des Black Crowes rejoints au chant par Randy Newman ! Because of the times, troisième album, confirme cette évolution. Non pas que les Followill aient beaucoup changé de sujet d’inspiration pour leurs chansons : il y est question de femmes, toujours, tentatrices, séductrices, pécheresses qui entraînent inévitablement des pauvres types comme eux à leur perte. C’est dire si l’héritage du père (Leon, c’est lui) a laissé de lourdes traces chez nos pauvres garçons dépravés. De la longue et tendue balade sauvage, Knocked up, qui monte en puissance dès l’ouverture du disque, Because of the times maintient jusqu’au bout son cap rêche, avec ses riffs de métal décapé soulignant les jappements éraillés, comme possédés, de Caleb. Un album cru dans lequel on ne pénètre pas forcément avec facilité. Mais dont on peine à ressortir. Hugo Cassavetti


Because of the Times est un disque métallisé, surpuissant, avec des guitares stridentes, une charpente rythmique en acier, des chansons pour faire chavirer les foules et une production panoramique. Le son du groupe s'est durci et assombri, la musique est moins brouillonne, plus directe, tendue, acérée. Les Kings Of Leon ont pris du poids, mais c'est du muscle. Parfois, on croit entendre les descendants des Replacements ou d'Hüsker Dü, ou les Kings Of The Stone Age. La force est avec eux, côté obscur. Because of the Times est un troisième album beaucoup plus ambitieux que les deux premiers, un grand pas en avant pour les Kings Of Leon. Pour comprendre l'évolution musicale du groupe, on peut prendre l'exemple de Jared, qui était âgé de 15 ans quand le groupe s'est formé. Entre 15 et 20 ans, le corps du jeune homme change. La pilosité faciale apparaît. La masse musculaire se développe. Les traits du visage se durcissent. Le doux enfant devient un homme, fort et épanoui, son corps et son caractère s'affirment.Les Kings of Leon est un groupe qui a su grandir tout en gardant la ligne, prendre de l'ampleur sans verser dans l'emphase inutile. Chapeau bas. Et ce n'est pas un Stetson. (Inrocks)
La basse haletante de ce Knocked Up inaugural en dit long : les fils de pasteurs Followill ont viré leur cuti. Si ces sept minutes d'ascension tantrique, aux guitares ombrageuses et à la rythmique quasi-cold wave, fissurent ainsi dangereusement le carcan "blues-rock enragé" dans lequel on avait fini par confiner les Kings Of Leon après deux albums plutôt bien troussés, l'intro "pixienne" d'un Charmer ébouriffant le désintègre sans peine. Et cela semble faire un bien fou à Caleb, qui en profite pour s'y arracher littéralement la glotte en hurlant tel un damné. Un revirement revendiqué par la formation sudiste qui, après quelques tournées en compagnie de Dylan, U2 et Pearl Jam, dit "n'avoir plus peur de rien". On veut bien la croire, surtout à l'écoute des riffs acides de ce Mcfearless hanté, furieux et décomplexé, ou du déluge de guitares qui s'abat sur le refrain de l'immense Black Thumbnail. Malheureusement, si la merveilleuse voix d'ébène de Caleb sied parfaitement à ces éructations supra-électriques salies (le trépidant et dantesque My Party), elle ennuie simplement sur les compositions mid-tempo inabouties ou boursouflées qui parsèment la deuxième moitié du disque (On Call, Ragoo, The Runner ou True Love Way, taillés pour faire chavirer les stades). Finalement, quelque soit les ambitions du groupe et les albums concernés, une chose reste immuable : les Kings Of Leon ne sont jamais aussi jouissifs que lorsqu'ils font saigner leurs instruments. (Magic)
Que leur père prêcheur s’inquiète pour de bon : "Because Of The Times", troisième album des frères et du cousin Followill, passe du joyeusement bourrin à la colère glaciale. Ou comment traverser la route d’un rock sudiste timbré sur les bords à de froids arrières plans industriels. "Because Of The Times", c’est donc cet au-revoir à Nashville, pour ce plonger dans la réalité. Les compositions se font plus ambitieuses, et, contrepartie regrettable, invendables.Ouverture rouillée, lame de rasoir tailladant sans relâche pendant plus de sept minutes, Knocked Up n’est guère rassurant quant à l’enthousiasme du trio vis-à-vis de la paternité. On est très exactement dans l’anti- Red Morning Light. Après deux bonnes minutes d’intro à écouter à l’aube en se promenant au bords des docks, réfléchissant à ce que l’on va faire de ce foutu rejeton, la brève explosion est elle-même terrifiante de désenchantement.Charmer repart sur les mêmes bases, avant qu’On Call ranime les Pixies. Seulement voilà, après ce coup de génie originel, les Kings Of Leon ont la dépression (ou maturité, appelez ça comme vous voulez) répétitive. Courage à celui qui entreprendra de différencier les pistes trois à onze…Camaro revient donner un peu de sang neuf à tout cela, mais sans réellement déclencher la machine. Ce d’autant plus qu’Arizona vient plomber la sortie de route… A priori courageux, brandissant ce Knocked Up qui reste un de leurs morceaux les plus aboutis à ce jour, ce nouvel opus apparaît surtout bâclé dans sa majeure partie…On croyait le second souffle trouvé avec cette ouverture levant le majeur à l’industrie musicale, après un premier album remarquable et un second en retrait. Il va pourtant falloir se rendre à l’évidence : les quatre compères excellent avant tout lorsqu’il s’agit de faire rugir leurs influences barrées et poussiéreuses du Tennessee. (indiepoprock)
bisca
7
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le 3 avr. 2022

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