Alcachofa
7.2
Alcachofa

Album de Ricardo Villalobos (2003)

De la minimale qui dépasse l'entendement, on adore ou on déteste

Clairement c'est l'un des albums les plus perchés que j'ai écouté, et que j'admire pour son étrangeté et son originalité qui a repoussé les limites de la musique électronique. Avant de connaître cet album j'avais beaucoup de mal avec les prods de Villalobos, à cause des sonorités si abstraites, loin des styles classiques que j'aimais habituellement en électro, leur aspect très répétitif et leur longueur souvent démesurée. Bien qu'étant un peu curieux de comprendre sa musique au départ, je décrochais toujours au bout de 2 minutes, ne comprenant ni comment ce type pouvait être aussi populaire ni comment les gens pouvaient danser là-dessus et apprécier du premier coup cette musique sans avoir pris je ne sais quelle drogue. Par exemple "Dexter", son morceau le plus connu, que je trouvais alors particulièrement vide et ennuyant ("tout ça pour ça ?!" fut ma première réaction).
Ce n'est qu'en abordant l'artiste avec le format album que la révélation m'est arrivée et que j'ai mieux saisi l'intérêt de son style. Si bien qu'à la fin de ma première écoute, j'ai eu l'impression d'avoir en face de moi un vertigineux chef d'oeuvre de musique minimaliste expérimentale avant-gardiste, tellement il n'y a aucune trace de structure musicale déjà vue à laquelle se raccrocher. Le mec se démarque de la différence classique entre - pour schématiser très rapidement - la house plutôt joyeuse et la techno plutôt sombre pour créer un nouveau truc, certes dans la minimale comme beaucoup font à l'époque, mais en extrêmement mental, énergique et infernal, tout en étant capable par détours de, comme on dit, retourner un dancefloor.
Difficile de décrire précisément son style. Pourquoi l'album s'appelle Artichaut, j'en sais trop rien. Je me demande avec quelles machines il a composé tout ça. N'écoutez pas cet album d'une seule oreille, sous peine de manquer toutes les subtilités et de trouver ça interminable. Enfermez-vous dans une pièce, fermez les yeux et laissez-vous enivrer par l'atmosphère tantôt hypnotique, tantôt très nerveuse, dans tous ses détails, en particulier ce fond sonore fait de bruitages de bulles, courants d'air, de tourbillons et je ne sais quoi d'autre, ses rythmes feutrés extrêmement complexes et mélodiques à eux tout seuls, ses petites voix rêveuses, ce son de basse à la fois pâteux et vaporeux...C'est très osé, ça peut rendre fou mais rien n'est là par hasard.
Bon, le seul morceau qui ne me tient pas à coeur c'est celui d'ouverture, "Easy Lee", la voix vocodée m'accroche pas trop mais la deuxième moitié du morceau, plus instrumentale, constitue une bonne introduction dans son univers. A partir de "YGH" on rentre vraiment dans le vif du sujet. "Bahaha Hahi" c'est la folie furieuse. "Waiworinao" est le moment le plus chaleureux de l'album, un bon petit répit avec les guitares aux sonorités latines. "Quizas" passe très bien et "What You Say Is More Than I Can Say" est un parfait banger qui s'enchaîne direct avec le célèbre "Dexter".
Classé meilleur album des années 2000 par Resident Advisor, c'est le premier album et la consécration pour Ricardo Villalobos qui avait déjà quelques EP à son actif mais débarquait de presque nulle part quand c'est sorti en 2003. Depuis, ça a été copié un nombre incalculable de fois. Une bonne partie du style microhouse découle directement de cet album. Et Villalobos est devenu une superstar.


NB : y'a 2 versions différentes de l'album
- la 3*vinyle, celle sur SC
- la CD que j'ai écouté et que je préfère car on y retrouve les tracks "YGH", "Waiworinao" et "What You Say Is More Than I Can Say"

ThomasOussar
9
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le 28 févr. 2018

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Thomas Oussar

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