Le fameux troisième album. Celui qu’on qualifie toujours de « l’album de la maturité », celui qui « confirmera ou infirmera le groupe », le « défi » de chaque formation. On craint qu’il soit de l’ « autoplagiat », « creux et sans intérêt », ou que l’ « originalité du groupe soit perdue ». On le comprendra, l’exercice de l’album post succès n’est pas évident. Et effectivement, après l’immensité de « Common Dreads », on peut se dire qu’il n’a pas dû être facile de se remettre au studio… Mais c’est en oubliant ceux qui font de la musique parce qu’ils ont des choses à dire et/ou les grands groupes. Et ouïesiblement, Enter Shikari est dans les deux cas.

Pour l’exprimer de façon complètement nuancé « A Flash Flood Of Colour » n’est pas bien loin de la perfection. Entre rupture et continuité, il garde l’énergie et l’éclectisme qui étaient déjà présents dans « Common Dreads », tout en poussant le mélange encore plus loin, et en ajoutant de nouvelles touches.
Contenant breaks rythmés ; parties riches en instruments ; chœurs criés et chantés ; neo metal ; post rock ; hardcore ; screamo ; punk rock ; balade ; électro ; (dubstep ?) ; hargne ; colère ; espoir ; sarcasme et même mises en scènes, chaque mot est porté avec conviction, et exprimé avec les tripes. Les paroles ont toujours une place centrale. On ne crie pas parce que l’on veut avoir l’air méchant, on crie parce que ce que l’on exprime nous énerve, ou parce qu’on veut appuyer tel ou tel mot.
Chacune des onze pistes de cet album pourrait illustrer le fait qu’Enter Shikari pioche ses influences vraiment partout et les assemble de façon cohérente, sans pour autant faire du « sous ‘Machin’ », ou « sous ‘Truc’ ».

Par exemple sur « Arguing with Thermometers » on retrouve un gros riff de guitare qui tache juste avant un autre riff de guitare sautillant qui, lui, précède un passage électronique assez poisseux. « Rou » chante, crie, rappe, laisse place aux instruments, balance sa hargne, seul puis avec des cœurs criés, puis chantés. Et bien sûr, c’est un peu les montagnes russes, l’intensité ne cesse d’augmenter avant de s’écraser d’un coup sur des breaks qui font bouger la tête.
Et pour rajouter une couche d’éclectisme déroutant, le morceau qui suit, « Statemate » est très calme, commençant telle une balade, et rappelant peu à peu un bon vieux morceau de post rock, ajoutant au fil des mesures des instruments, des voix, des percussions jusqu’à une partie piano chant sur laquelle on se rend compte que Rou a un petit quelque chose de Thom Yorke dans la voix.

« A Flash Food of Colour » contient aussi des morceaux plus accessibles comme « Warm Smiles Do Not Make You Welcome Here », qui pourrait être sur la fin une piste punk rock, ou « Meltdown » et son refrain entêtant.

On remarque aussi « Constellations » qui clôture l’album de façon inattendue. On a peur au début que ce soit la piste noire, celle qu’on feindra n’avoir pas entendue lorsqu’on nous l’évoquera en contre argument de la perfection de cet album. C’est un peu mielleux, ça colle un peu aux doigts tellement c’est sucré (même si « Rou » ne peut s’empêcher d’esquisser un cri). Et puis, on attend la suite. Alors, on se rend compte que comme sur « Statemate », le groupe s’inspire d’une structure de morceau post rock, où on l’on rajoute des couches et des couches d’instruments jusqu’à la fin. Le morceau file une métaphore plutôt réussie, et toujours avec cette idée d'espoir et de besoin de renouveau.

Pour conclure, le mot qui résumerait cet album est « riche ». « A Flash Flood Of Colour » est riche. Très riche. Mais pas le riche qui est mauvais pour la santé et qui fait trop grossir. Plutôt le riche qui fait à chaque fois du bien, et dont on peut abuser sans culpabiliser (sauf si les voisins ne sont pas de notre avis).

En même temps que j’écris, j’écoute l’album, et à chaque parties je me dis « ah mais oui, ça aussi c’est énorme, faudrait en parler !!! » mais je vais plutôt vous laisser entre les mains expertes des quatre anglais givrés, armés de leur troisième opus éblouissant et haut en couleurs (il fallait bien que je la fasse celle-là) : A Flash Flood Of Colour
CcileGuillemat
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le 14 juil. 2013

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CcileGuillemat

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