On a retrouvé des bandes magnétiques, dont on ignorait même qu’elles fussent perdues. On en retrouve souvent, il suffit d’aller farfouiller dans le cabanon « bandes perdues avec étiquettes illisibles, pour disques inédits » à l’entrée du canyon Donnie Darko Ambiento, juste derrière l'hacienda de Stevie. Une fois entré dans l’appentis, y’a qu’à se baisser pour en ramasser, le bazar est pire que dans la buanderie de Frank Zappa, dont les successeurs s’arrachent les cheveux et les sous-vêtements depuis 30 ans en découvrant des palanquées de masters improbables derrière des piles de linge sale.
Pour en revenir à The Ancestor Circle, ces bandes retrouvées en 2014 furent enregistrées en 2000 par Steve R. et Jorge Reyes, une semaine avant leur concert de Tucson, dont les bandes sont elles définitivement fichues comme nous l’avons vu dans « Une année 2011 », et se situent dans la veine ethno-chamano-ambient avec une bonne rasade de mauvais trip à l’ayahuesca, mais c’est un peu un passage obligé dans les cérémonies initiatiques, y’a toujours un moment où on tourne de l’oeil quand le chaman nous ouvre le sternum psychique à l’opinel rouillé pour libérer nos énergies. Mais la brochure promotionnelle met plutôt en avant « un rinçage cathartique non filtré du monde technologique et moderne d'aujourd'hui, qui aide à appuyer sur le bouton de réinitialisation de la perception. »
L’apport de Jorge Reyes, comme sur Vine ~ Bark & Spore (2001) et antérieurement sur les deux disques du groupe éphémère Suspended Memories, ce sont les voix de sorcier de caverne électronique, propre à pétrifier le plus endurci des newagers, et son exotique bataclan de flûtes préhispaniques, ocarinas et petites percussions sud-américaines, bien sûr tout cela passé à la moulinette dark ambient prend un aspect un peu angoissant, voire menaçant et chairdepoulogène, quand le vieux sorcier yaqui vous balance ses incantations trafiquées par des chambres d’écho analogiques, sépulcrales et vaudouisées par notre duo de dealers d’absolu sonique, on peut arrêter la drogue, c’est bon, on a trouvé mieux.
Pour peu qu’on se le colle entre les oreilles devant un bon feu de cheminée lors des frimas d’avril, on part assez loin dans les forêts primaires avec ce disque, même si le retour à pied pose, comme toujours, problème. Soyez bienveillant envers les baratineurs qui voudront vous faire accroire qu’il s’agit là d’une offrande cérémonielle aux dieux oubliés, ou les artefacts audio d'une tribu perdue où la préhistoire rencontre la technologie du futur créant un son impossible à dater au carbone 14. Ce sont les gars du marketing qui racontent ça, il faut leur pardonner car ils ne savent pas ce qu’ils vendent. C’est juste la bande-son idéale pour relire Castaneda, délaissé depuis l’adolescence. Un putain de bon disque de chamanisme ambient.

john_warsen
8
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le 2 févr. 2022

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