Mon titre est la reprise de celui d’un roman de Françoise Sagan. Si votre réponse est oui, cet enregistrement pourrait vous intéresser. Si vous ne connaissez pas vraiment Brahms, cette symphonie peut vous donner envie d’explorer un bon filon musical.


Johannes Brahms (1833-1897) mena une carrière musicale d’abord hésitante (débuts difficiles à Hambourg sa ville natale), puis très riche (lui-même pianiste réputé, il dirigea à Vienne notamment). Il travailla avec des musiciens de talent (la pianiste Clara Schumann et le violoniste Joseph Joachim) et fit beaucoup de rencontres. Sa musique est largement influencée par le courant du romantisme allemand. Il composa aussi bien pour le piano que pour l’orchestre et produisit beaucoup de musique de chambre ainsi que d’innombrables lieder. Il ne s’attaqua que tardivement à la symphonie et n’en composa que 4.


Celle-ci (opus 98, en mi mineur) est donc son ultime, composée à partir de l’été 1884. Elle fut exécutée la première fois à Meiningen le 25 octobre 1885. Brahms avait donc 52 ans, on peut considérer qu’il s’agit d’une œuvre de maturité où il s’exprime pleinement.


Dans le premier mouvement (allegro non troppo), si le thème principal irrésistible de charme, est d’abord chanté par les cordes, il doit beaucoup aux instruments à vent. Certaines de leurs interventions lui donnent un éclat remarquable par de brusques changements de rythme. Par rapport à sa première symphonie qui sonne comme un matériau brut, ici tout est à sa place, comme si Brahms, avec la maturité, avait trouvé son équilibre. Toutes les variations sont un plaisir pour l’auditeur. Sa maîtrise du contrepoint et des variations le placent comme un héritier de Bach, Haydn, Mozart et Beethoven. Héritier naturel de par sa formation, Brahms avec cette symphonie s’affirme une nouvelle fois comme un talent personnel.


Encore les vents pour annoncer la ligne mélodique du second mouvement (Andante moderato), le tout souligné de façon très harmonieuse par les cordes en pizzicato pour le rythme. Mélodie très douce qui s’étoffe progressivement jusqu’à la montée en puissance des cordes qui, tout naturellement, permettent une petite envolée. Ventre mou du mouvement avant le retour du thème principal et une nouvelle envolée. Encore un moment plus calme avant un final aux accents déchirants.


Réveil de l’auditeur avec un troisième mouvement (Allegro giocoso – Poco meno presto – Tempo I) qui dégage beaucoup d’énergie. Très entrainant, quasi beethovénien au début. Très brahmsien malgré tout, il affiche l’héritage assumé. Les développements qui alternent tranquillité et rappels du thème initial, puissant, sont caractéristiques du style Brahms.


Le début du quatrième mouvement (Allegro energico e passionato – Più allegro) introduit une sorte de suspense. Où le compositeur veut-il en venir ? La curiosité ici, c’est que Brahms construit ce mouvement sous la forme (ancienne) de la passacaille où il développe 30 variations sur un motif de basse emprunté à la chaconne (Meine Tage in den Leiden) de la cantate BWV 150 de Johann Sebastian Bach. Un développement mélodique superbe, profond où Brahms exploite toutes les possibilités de l’orchestre classique. Belle intervention de la flûte à laquelle succèdent la clarinette puis le cor. Brahms montre qu’il a de belles idées à développer tout en assumant son héritage musical.


Cet enregistrement (Deutsche Gramophon) date d’octobre 1988, avec Herbert von Karajan à la tête du Berliner Philharmoniker. La formation justifie amplement sa réputation, celle d’une des meilleures de l’époque. Les instrumentistes sont d’un niveau de grande classe et Karajan les dirige avec précision et autorité. L’ensemble est quasiment irréprochable et la prise de son est à la hauteur. L’auditeur profite des moindres sonorités de la symphonie. J’ai lu quelque part que Karajan, à force de perfectionnisme instrumental, privilégiait le rendu sonore au détriment de certaines émotions, ce que Bernard Haitink rendrait mieux. C’est possible, puisque je ne connais pas l’enregistrement en question. Par contre, j’ai souvent écouté l’enregistrement des symphonies n°2 et 3 de Brahms par le même Bernard Haitink à la tête du Concertgebouw d’Amsterdam. Il y adopte un incroyable tempo rapide pour le mouvement lent de la 3ème symphonie, qui me heurte décidément. Je reste donc satisfait par cet enregistrement de la 4ème symphonie, tout en gardant en tête que d’autres enregistrements intéressants restent à découvrir. D’ailleurs, Karajan a laissé plusieurs enregistrements de cette symphonie.

Electron
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le 21 avr. 2016

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