See Jungle! See Jungle! Go Join Your Gang Yeah! City All Over, Go Ape Crazy par Mellow-Yellow

La longue carrière de Malcom McLaren est riche en frasques de toutes sortes. Si les New York Dolls et les Sex Pistols sont souvent les premiers noms cités pour évoquer le provocateur anglais, il est beaucoup moins commun d'évoquer son travail avec Bow Wow Wow. Derrière cet étonnant pseudonyme se cache un quartet dont la musique est régulièrement négligée au profit du croustillant scandale qui accompagna la parution de leur premier album. Leur chanteuse, Annabella Lwin, n'avait que quatorze ans lorsqu'elle posa nue sur cette reproduction du "Déjeuner sur l'herbe" de Manet. Un outrage bien évidemment orchestré par McLaren, toujours à l'affût de plans douteux.

Bow Wow Wow naquit des cendres d'Adam & the Ants, McLaren ayant incité trois de ses membres à quitter une formation sur laquelle peu d'espoir planait. Grand bien lui en fasse, c'est à la suite de ce changement que le groupe effectuera sa percée artistique et commerciale. Mais ceci est une autre histoire. Le premier single de Bow Wow Wow fut également la toute première cassette audio commercialisée. Celle-ci déplût aux stations de radio puisque, McLaren oblige, elle incitait au piratage maison, jusqu'à offrir une face B vide pour permettre aux auditeurs de s'adonner à la pratique...

Le groupe change ensuite de label pour sortir ce premier album au titre incongru, issu de la déformation des paroles d'une chanson zoulou. Retracer l'impact de Bow Wow Wow sur l'histoire en ne s'intéressant qu'à ses multiples efforts pour choquer et attirer l'attention, c'est mettre de côté le réel intérêt que possède sa musique. Nous avons à faire à une curieuse page de la new wave anglaise, association de vents contraires et amalgame baroque de styles autant musicaux que vestimentaires (Vivienne Westwood n'étant évidemment jamais très loin).

C'est d'abord une ambiance martelante, des percussions omniprésentes d'inspiration africaine. La basse est à l'honneur et se décline sous toutes les formes possibles, parachevant l'invitation au déchaînement des corps. Instrumentaux entêtants et homogènes pour les uns, répétitifs et agaçants pour les autres, l'album serait idéal pour accompagner un affrontement de rue sous une chaleur intense, où les seules armes autorisées seraient des pistolets à eau. Survolant impérialement la bataille, le chant d'Annabella Lwin insuffle une énergie juvénile épousant à merveille la frénésie ambiante.

Faussement régressif et joyeusement défoulant, le premier album de Bow Wow Wow mérite qu'on y jette une oreille délestée de son association systématique aux manigances de McLaren. La provocation marche à court terme mais son effet est à double tranchant : elle produit un effet de halo qui tend à éclipser les autres brillances inhérentes à la musique du groupe.

"Chihuaha" - https://www.youtube.com/watch?v=HHuOLZkerAA

"Elimination Dancing" - https://www.youtube.com/watch?v=093DYldZYow