You don't want to hear nobody else

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Il faut avouer que j'ai été pas mal surpris à la première écoute de Pretzel Logic, troisième album de Steely Dan.
Ayant commencé leur discographie par la fin, et remontant jusqu'à leurs débuts, je suis petit à petit dans le mauvais sens toutes les évolutions d'un groupe atypique au possible. 

Nous l'avons dit et redit, Steely Dan possède un style difficile à appréhender globalement. Les derniers albums tendent vers le jazz rock, avec un léger côté funk plus ou moins visible. La perfection tant recherchée par Fagen et Becker, les deux têtes pensantes du groupe, se retrouve autant dans l'interprétation que la production. Rien ne semble laissé au hasard et leurs morceaux transpirent la maîtrise et l'expertise.

Hé bien Pretzel Logic n'est rien de tout ça.
Enfin, presque.
A la première écoute donc, l'album surprend d'abord par l'extrême variété des styles déployés. Si le jazz et le rock dominent, la pop et le blues ne sont jamais loin. Les styles musicaux sont loin d'être exclusifs, leurs frontières sont bien étanches. Becker et Fagen le savent et en profitent pour créer une musique difficilement concevable sans exemple concret.

Je me demande régulièrement pourquoi Steely Dan est peu évoqué aujourd'hui, alors que le succès critique ET commercial était présent à l'époque. (généralement l'absence de l'un des deux explique en partie le manque de renommée)
Une ébauche de réponse pourrait commencer de la manière suivante : la musique de Steely Dan ne cherche pas à rentrer dans des catégories spécifiques. Le groupe possède une forte personnalité et un caractère imprévisible qui pourra paraître parfois difficile d'accès pour certaines oreilles.

Ne serait-ce que le titre d'ouverture, "Rikki Don't Lose That Number", qui fera retrouver le succès commercial au Dan de fer : l'ambiance ne cesse de changer et pourtant le titre est homogène, assez pour passer à la radio en tout cas.
Passer à la radio, retrouver le succès commercial tout en gardant son âme, n'était-ce pas le but du groupe au final, après l'échec de leur précédent album ? Quand nous voyons le résultat, nous ne pouvons que constater la réussite la plus complète : le groupe arrive même à se réinventer. 

Oui, Pretzel Logic est l'album le plus "pop" de Steely Dan. Pop dans le sens où les harmonies vocales ont une place importante, où la guitare et le piano se font plus touchants qu’entraînants. Un ensemble de cordes, fait très inhabituel chez Steely Dan, a même une place importante sur "Through With Buzz".
Et que dire du chant en lui-même ? Il a rarement été aussi empli d'entrain, ne serait-ce que "Barrytown" ou "Charlie Freak". Pourrait-on dire que le Dan est devenu heureux et plus léger ? Pas vraiment non, les paroles sont toujours aussi cryptiques et tous les morceaux semblent cacher des double-sens qu'il ne vaudrait mieux pas découvrir.

Pour reprendre mon ébauche de réponse, je dirais que l'ensemble de paradoxes (instrumentation complexe mais accessible, styles variés mais homogènes,  paroles étranges mais chant agréable), ainsi que l'ancrage fort de la musique de Steely Dan dans son époque empêche quelque peu le groupe de traverser les décennies.
Ce qui est bien dommage, car les morceaux de Pretzel Logic s'enchaînent avec une fluidité remarquable. Peut-être est-ce à cause de leur durée plus réduite que d'habitude, ou simplement par le talent avec lequel ils sont manufacturés ? 

Barrytown : https://www.youtube.com/watch?v=OWVhvoAeaFk

Any Major Dude Will Tell You : https://www.youtube.com/watch?v=kND8TRZap8Y