Light Grenades
6.1
Light Grenades

Album de Incubus (2006)

Le dépitant A Crow Left Of The Murder scellait chez Incubus une volonté escamotée de faire vendre au détriment d'une œuvre antérieure bigrement farfelue et insolite. Probablement influencés par le producteur Brendan O'Brien capable du meilleur, parfois coupable du pire (Evil Empire de Rage Against The Machine), les californiens se sont apaisés et leur musique les a suivi. Assommante, emmerdante, fatigante : l'exégèse sévère (mais juste !) du précédent album prophétisait le pire pour le successeur Light Grenades, qui se trouve n'avoir d'explosif que le nom.

L'introductif "Quicksand" et son mitoyen galvanisant "A Kiss To Send Us Off" réitère l'illusion d'ACLOTM : reliés en une et même pièce, ils s'apparentent à une colossale explosion d'énergie dont les débris s'éparpillent de manière périodique tout au long de l'album… C'est bien simple : à partir de "Dig" (lui-même consternant de sucreries : "Remind me that we'll always have each other / When everything else is gone."), un titre sur deux est à jeter. L'impression constante d'être lésé après chaque titre réussi s'éternise : chaque déflagration engendre des gravats mièvres et sirupeux. Aussi subtil qu'un Steven Seagal bipolaire, Incubus nous casse la gueule, puis nous vante les mérites de l'amour… Dommage, car les pépites rock jalonnant Light Grenades gagneraient à être adjacentes. Par exemple, le titre éponyme à l'esprit presque punk se révèle exceptionnel de vivacité, mais il est précédé et suivi par deux niaiseuses vomissures que même Justin Bieber n'oserait entonner ("Love Hurts" et "Earth To Bella (Part 1)"). Idem pour "Rogues", le sommet de cet album. Énergique et vigoureux, il est la plus virulente attaque du groupe contre sa propre musique, car il prouve avec évidence à quel point les cinq californiens sont meilleurs lorsqu'ils ne tombent pas dans le racoleur, et plus généralement dans la facilité. "Rogues" est une de ces compositions séraphiques qui font d'Incubus à la fois un des plus grands espoirs du rock contemporain et par conséquent une de ses plus grandes déceptions. Tant de talent, de rage éthérée stupidement gâchés pour dévaliser un maximum de portefeuilles "Hello Kitty"…

Qu'ajouter, si ce n'est qu'Incubus rejoint avec Light Grenades les Red Hot Chili Peppers et autres Radiohead dans le club actuellement très prisé des plus grandes décadences musicales de ce début de millénaire…?
BenoitBayl
4
Écrit par

Créée

le 7 déc. 2013

Critique lue 218 fois

Benoit Baylé

Écrit par

Critique lue 218 fois

D'autres avis sur Light Grenades

Light Grenades
GuillaumeL666
6

Anomaly

De cet album je retiens surtout Anna Molly que je connaissais déjà avant. Le reste c'est du rock alternatif plutôt perché avec de la recherche derrière, donc ça me plaira probablement plus au fil des...

le 4 juin 2018

Light Grenades
BenoitBayl
4

Critique de Light Grenades par Benoit Baylé

Le dépitant A Crow Left Of The Murder scellait chez Incubus une volonté escamotée de faire vendre au détriment d'une œuvre antérieure bigrement farfelue et insolite. Probablement influencés par le...

le 7 déc. 2013

Du même critique

First Utterance
BenoitBayl
9

Critique de First Utterance par Benoit Baylé

Souvent de pair, les amateurs de rock progressif et de mythologie connaissent bien Comus. A ne pas confondre avec son père, Dionysos, divinité des intoxications liquides et autres joies éphémères, ou...

le 9 déc. 2013

23 j'aime

Alice in Chains
BenoitBayl
9

Critique de Alice in Chains par Benoit Baylé

La révélation mélancolique Il y a maintenant 5 ans, alors que ma vie se partageait entre une stérile végétation quotidienne et une passion tout aussi inutile pour le basket-ball, je découvris la...

le 9 déc. 2013

22 j'aime

2

Kobaïa
BenoitBayl
8

Critique de Kobaïa par Benoit Baylé

A l'heure où la sphère journalistique spécialisée pleure la disparition pourtant prévisible de Noir Désir, espère la reformation du messie saugrenu Téléphone et déifie les nubiles BB Brunes, les...

le 5 déc. 2013

15 j'aime

1