The Good man, the Bad singer and the Ugly family

Dans le petit monde de l'avant-garde, Mayo Thompson avait servi avec ses Red Krayola une putain d'entrée avec son Parable of Arable Land, délire bruitiste total au fun consommé ! God Bless... en plat de résistance affinait le propos, retirant du jeu les Free-Form Freakout de la Famille Moche pour se concentrer sur les bluettes décalées qui hantaient l'esprit de Thompson.

Et voilà le dessert, le dernier album de cette première période : Corky's Debt To His Father. Même s'il est de notoriété underground que l'homme a toujours été le cerveau des Krayolas, l'étiquette Mayo Thompson © a ici son importance : elle signifie qu'il s'est écarté de ses branques de collègues pour s'offrir de vrais musiciens de studio. Tant pis pour la réputation "mauvais mais authentiques" chère à certains, tant mieux pour la musique ! L'album de la maturité en quelque sorte, dixit Mr. Poncif.

Plus clair dans son propos, plus propre dans le son, plus dénudé dans l'accompagnement, Mayo dévoile en une grosse demi-heure quelques unes de ses plus belles compositions. Très folk, Corky's Debt dégage une joie de vivre sacrément contagieuse ! Le ton, encore plus qu'à l'accoutumé, est nonchalant. Mais de cette nonchalance particulière qui trouve sa source dans le rêve éveillé : Thompson semble tellement perché qu'il ne prend même pas la peine de chanter correctement. Doux-dingue devant l'éternel, Mayo raconte ses histoires absurdes, où les jolies filles côtoient les scènes les plus impressionnistes... Les images décrites sont aussi étranges qu'attachantes. En témoigne une des perles de l'album, "Dear Betty Baby", qui évoque le départ en mer d'un marin, qui craint les lieues qui le sépareront de sa femme et les avaries qui pointeront le bout de leur nez une fois sur l'eau. Et les cors, dès le deuxième couplet, de pousser en chœur leur douce plainte... Les deux autres sommets du disques sont les tendues "Horses" et "Worried Worried". La première, reprise une décennie plus tard par Pere Ubu (avec nul autre que Mayo au chant), voit l'original s'inquiéter de ses propres battements de cœur, au point d'en prier sa nana de nouer son palpitant autour de ses genoux. Électrique, "Worried Worried" rock et dissone dans tous les coins pendant que Mayo psychote dans le sien : "What a shock, what a scare/Who on Earth to turn to/ When the clock, without a care/ Keeps turning on without you".

Corky's Debt To His Father est une parfaite collection de ce qui restera comme le témoignage le plus personnel de Mayo Thompson, qui plutôt qu'un intello snob et goguenard n'était en fin de compte qu'un excentrique un peu timbré et très sensible... Une oddity un peu space à placer entre Skip Spence et Jonathan Richman ; du côté des gentils.
TWazoo
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Folk & Renouveau (Philippe Robert), Les gentils du rock et Les méchants du rock (twisted reality)

Créée

le 2 nov. 2013

Critique lue 189 fois

4 j'aime

T. Wazoo

Écrit par

Critique lue 189 fois

4

Du même critique

One-Punch Man
TWazoo
4

"Well that was lame... I kinda had my hopes up too."

Cette citation n'est pas de moi, c'est Saitama lui-même, principal protagoniste et « héros » de One-Punch Man, qui la prononce après un énième gros vilain dûment tabassé d'un seul coup...

le 5 janv. 2016

67 j'aime

38

Jackson C. Frank
TWazoo
9

Milk & Honey

"Le plus connu des musiciens folk sixties dont personne n'aie jamais entendu parler." Ainsi s'exprime très justement un journaliste dans un article dédié à la mémoire de Jackson C. Frank, mort en...

le 16 oct. 2013

66 j'aime

4

Murmuüre
TWazoo
9

Murmures du 3ème type

On pourrait être tenté, à l'approche de la musique de Murmuüre, de ne parler que de Black Metal. On pourrait amener, à la simple écoute des guitares poisseuses et saturées ou bien des - rares -...

le 30 sept. 2014

54 j'aime

5