Cet album, sorti sur le label Rivista le 15 août 1991 en même temps que '77 Live et Mizutani, est pourtant considéré comme le tout premier disque sorti officiellement des Rallizes Dénudés. Sachant que le groupe s'était formé en 1967, c'était en soi d'une petite révolution –mettons à part la compilation Oz Days de 1973, double LP ultra rare d'enregistrements live où le groupe partageait le second disque avec les Taj Mahal Travellers. Le souci, c'est que '67-'69 Studio et Live fait davantage office d'une collection de chutes de studio et de bribes de concerts plutôt que de signer un véritable effort éditorial. Le son est franchement très crade sur certaines pistes, ce qui est plus digne d'un bootleg que d'une sortie officielle. On peut ironiser sur le fait que plus tard, ce sera finalement le contraire avec des sorties de qualité chez des labels semi-officiels comme Ignuitas.

On peut scinder cet album en deux, pas forcément en faisant la distinction entre studio et live, mais plutôt sur le plan stylistique. Deux types de compositions ressortent : des morceaux anti-pop plutôt intimistes et des morceaux de noise psychédélique complètement barrés. A noter que sur toutes les pistes, on trouve Takashi Tada à la basse comme compagnon de route du légendaire Takashi Mizutani, tandis que deux batteurs officieux se partagent la vedette : Tsutomu Matsumoto sur les pistes 3 à 7, alors que Takashi Kato tient les baguettes sur les pistes 1, 2 et 8.

L'album débute par une version de vingt minutes de « Smokin' Cigarette Blues », caractérisant le noise-psych du groupe à son niveau le plus trash. La performance semble excellente, proche du free form, avec un jeu d'harmonica intéressant. Malheureusement le son ne permet pas de juger de la qualité de l'interprétation, tout comme pour « The Last One », version tronquée pourtant prometteuse, où des nappes de guitares frénétiques usent de larsens comme pour batailler avec une batterie qui frappe un peu de tous les côtés. C'est complètement barré, il n'y a pas de structure prédéfinie ; malgré la puissance, cela reste assez brouillon. Dans le même genre, les deux versions de « 眩暈 Otherwise my Conviction » bénéficient d'un meilleur son, bien typé 70s : l'occasion de découvrir l'un des tubes du groupe. Quant à la cinquième piste, « 記憶は遠い» (Distant Memory), c'est tout bonnement l'un des morceaux les plus agréables de l'album, beaucoup plus posé.

Ce '67-'69 Studio et Live propose également « La Mal Rouge », titre peu courant dans la discographie des Rallizes Dénudés. Un court morceau où des roulements légers de toms et quelques coups de cymbales éparses accompagnent une guitare jouée « à la grecque ». Pas de déluge de bruit, si ce n'est un final un peu gratuit. « Les Bulles de Savon » adopte clairement structure assez velvetienne, au même titre que «鳥の声» (Voice of the Bird). On comprend très vite, avec ces morceaux-là, que le frontman Takashi Mizutani était meilleur guitariste que chanteur.

Inutile de se voiler la face : l'album fait pâle figure face aux deux autres sorties officielles du catalogue. Les bénéfices du remaster de ce premier disque ne sont pas forcément flagrants, étant donné la qualité des enregistrements originaux. C'est pourtant une belle expérience sonique qui a l'avantage d'offrir les tous premiers témoignages d'un groupe précurseur, comme une première preuve de l'influence énorme de leur vision du rock psychédélique au Japon.

http://offthebeatentracklists.wordpress.com/2012/06/04/les-rallizes-denudes-67-69-studio-et-live
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le 13 juin 2012

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