Vous savez ce qui est bien avec le fait de faire son éducation musicale en 2019 ? C'est qu'on peut découvrir après tout le monde des pierres angulaires, notamment du rock. Plein de pierres angulaires du rock. Et ça, c'est bien. Et donc, Ziggy Stardust (que je vais appeler comme ça, vous pensez pas que je vais écrire son titre complet, quand même).


Contexte : on est en 1972 et David Robert Jones, alias David Bowie, a commencé une carrière musicale depuis 1964, d'abord dans des petits groupes et en sortant divers singles : Liza Jane, Can't Help Thinking About Me, I Dig Everything... des chansons qui ne vous diront rien si vous n'êtes pas un maniaque de Bowie. Et donc, tous ces singles sont des bides, ce qui frustre notre ami anglais au fur et à mesure que les années passent. Il finit par se lancer en solo en 1967 et, jusqu'en 1972, il va sortir plusieurs disques dont la plupart contiennent déjà ses futures chansons cultes.


Sortent donc David Bowie (1967), premier effort assez surprenant où la future star se mue en narrateur théâtral en chantant des chansons de cabaret, Space Oddity (1969), album de folk progressif contenant son premier gros succès (à savoir la chanson éponyme), The Man Who Sold the World (1970), première collaboration avec Mick Ronson, Trevor Bolder et Mick "Woody" Woodmansey et étant plus un effort commun de ces derniers et du producteur Tony Visconti qu'un album d'un Bowie étant à cette époque jeune marié et consommateur de marijuana et, enfin, Hunky Dory (1971), qui est la première pierre de l'édifice glam rock de Bowie et qui commence enfin à le faire connaître auprès du grand public.


A l'époque, au tout début des années 1970, le glam rock (ou "glitter rock") est un genre naissant et sa star principale est Marc Bolan, meneur du groupe T. Rex et qui, en plus d'être un ami et rival de Bowie (chose qui a maintes fois été racontée), partage beaucoup de points communs avec lui : comme lui, il a d'abord fait du folk psyché, comme lui, il a enchaîné les bides en matière de singles et d'albums, comme lui, il avait un narcissisme avancé qui faisait qu'il en avait franchement marre de ne pas connaître le succès. Et les deux, chacun à leur manière, réussirent à connaître le succès en inventant et en prédisant la mode, chose que Bowie allait pouvoir refaire de nombreuses fois et qui a été l'une de ses qualités constantes. Bolan, lui, bien qu'il reste aujourd'hui parmi les artistes qui ont compté dans l'histoire du rock, ne connaîtrait pas autant de chance et sa mort prématurée en 1977, dans un accident de voiture et au moment même où la vague punk, qui comptait énormément de fans de glam rock, allait lui permettre de faire son retour, est sans aucun doute un gâchis.


Mais revenons à Bowie. Et à cet album mille fois révéré et salué sur lequel tout a probablement déjà été dit. Mais que je vais quand même redire une nouvelle fois parce que ça fait jamais de mal. C'est donc en 1972 et pendant au moins les deux années qui suivront que le personnage de Ziggy Stardust, cet extraterrestre androgyne à la coupe orange en pétard devenu star du rock et qui finira lentement corrompu par le succès et le star-system, prend vie et que Bowie finira par se fondre en lui jusqu'à ce qu'ils ne fassent plus qu'un, ce qui aurait pu sûrement le mener à un dédoublement de la personnalité s'il n'avait pas décidé de le tuer métaphoriquement.


Ziggy Stardust est donc un album qui nous parle de science-fiction apocalyptique, de fin du monde imminente, d'hommes devenant des mystiques après avoir reçu des ondes radiophoniques, de groupes de musique dont le chanteur connait l'ascension vers la gloire puis la chute... en fait, même si ce n'est pas un album-concept à proprement parler, l'auditeur se voit exposer ici un univers qui est cohérent et qui se tient de bout en bout. Et qui n'est pas forcément joyeux, même malgré l'apparente gaieté des chansons et des mélodies.


Parce que, et c'est là que j'en viens à la raison de pourquoi cet album est absolument génial, les chansons, en plus de parfaitement nous jouer le jeu du "On dirait que je suis joyeux, mais en fait, regardez les paroles, je suis en train de vous tromper", sont magnifiques. Alors que le hard rock était bien plus lourd dans ses mélodies et que le rock progressif était de plus en plus focalisé sur "montrer que les musiciens ne sont pas des virtuoses pour rien", le glam rock, prenant pour principale source d'inspiration le rock'n'roll des années 50, va créer quelque chose d'énergique, de léger et à lequel vous ne pouvez pas résister. N'essayez pas de vous challenger pour voir si vous ne danserez pas, c'est impossible.


Mais soudainement, en y réfléchissant, peut-être qu'il n'y a rien de plus à dire sur cet album. Car tout nous est déjà présenté, Bowie et ses Spiders From Mars laissant presque leur musique parler pour eux. Et au fond, personnellement, quand je repense à ces chansons courtes, légères, énergiques, aux paroles référencées, ironiques... à toutes ces bombinettes qui nous sont lâchées, de Five Years, commençant sobrement et montant crescendo au fur et à mesure, à Rock'n'Roll Suicide et son fameux "Gimme your hands, cause you're wonderful". Quand je pense à ces airs accrocheurs qui ne veulent pas sortir de la tête, à ces musiciens si doués, à ce Bowie qui, déjà, avait une grande maîtrise de sa voix... eh bien, je me dis qu'il n'y a pas besoin de rajouter quelque chose.


Et accessoirement, que je devrais aller me coucher. Peut-être croiserai-je un jour le Starman dans mes rêves...

AntoineFontaine
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le 18 oct. 2019

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