Au royaume de Carcosa, le jaune est roi

Dans un champ de maïs, au pied d’un arbre solitaire, une femme nue est retrouvée attachée, morte, ornée de bois de cerf et entourée de petites constructions inquiétantes. La scène se déroule en Louisiane avec ses bayous, sa végétation lugubre, ses habitants en guenilles et à l’accent nasillard. Une région où les vestiges d’un temps passé et les rites oubliés servent à planter un décor exceptionnel pour une enquête réunissant deux inspecteurs que tout oppose, Rust Cohle et Martin Hart.

Rust est un flic tourmenté, extrêmement compétent, mais qui est sans cesse en proie à ses démons depuis le décès de sa fille. Son métier est comme une bouée de sauvetage en lui permettant de se concentrer sur autre chose au détriment de sa santé physique et mentale. Martin est l’archétype du flic voulant donner l’apparence du bon père de famille, mais dont les excès de boisson et une trop forte libido vont détruire son couple. N’ayant pas le même instinct que Rust, Martin n’en reste pas moins efficace malgré un partenaire habitué à travailler en loup solitaire.

La force de True Detective est de réunir deux des acteurs de cinéma les plus prisés du moment, Matthew McConaughey (Rust) et Woody Harrelson (Martin). Ce casting exceptionnel a énormément servi la série en lui donnant une dimension hollywoodienne.

True Detective se différencie des séries policières «classiques» de par son format de 8 épisodes de 60 minutes pour une affaire. On sort du schéma 5 minutes pour expliquer l’affaire, 25 minutes pour trouver le suspect, 5 minutes pour l’appréhender et 5 minutes pour le juger. Cette différence permet au réalisateur, Cary Fukunaga, de pouvoir s’attarder sur la vie et le caractère des protagonistes ainsi que sur les détails et rebondissements de l’enquête.

Mais voilà, tout n’est pas parfait. On regrettera tout d’abord le manque de dimension fantastique à la série. Les mythes du Roi en jaune et de Carcosa ne sont en effet que survolés. Le spectateur a bien sûr quelques frissons d’angoisse lors des premiers épisodes où les mises en scènes des meurtres font planer l’ombre d’adorateurs d’une entité maléfique. Et puis il y a la deuxième saison...

Dans la deuxième saison, Nic Pizzolatto, le créateur de la série, décide de garder la formule gagnante au niveau casting en choisissant des acteurs de cinéma reconnus avec en binôme principal Colin Farrell et Vince Vaughn. L’histoire se déroule autour de Vinci, une ville californienne corrompue à tous les niveaux. Il s’agit à nouveau d’une enquête policière dirigée par l’inspecteur Velcoro sur la mort d’un homme, Ben Caspere, homme de confiance du truand Frank Semyon. Les 8 épisodes ne sont clairement pas tous mauvais. Certains sursauts dans le milieu de la saison laisse suffisamment d’espoir au téléspectateur pour aller jusqu’au bout. Mais le manque de rigueur scénaristique, les scènes invraisemblables, les discours bateaux et surtout la terrible absence de crédibilité des acteurs viennent torpiller cette deuxième saison de True Detective.

Et si cette série ne se révélait pas être une sorte de Prison Break avec une première saison d’anthologie et une suite qui s’essouffle et perd tout intérêt par la suite ? En tout cas les détracteurs de la seconde saison n’ont pas empêché Nic Pizzolatto d’annoncer une 3ème saison toujours avec HBO. A voir s’il arrive à redonner vie à True Detective...