The Outpost
4.7
The Outpost

Série The CW (2018)

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Un nanard ne nous déçoit jamais ou l'impossible quête de la fantasy pour "jeunes adultes"

Alors que je traînais sur mon site de streaming parfaitement légal, mes yeux ont accroché sur cette affiche si attirante dans son effroyable manque de moyen et de créativité et je me suis dit que j'étais peut-être arrivée au bout de ma quête de l'ultime navet sériel, le Graal sublime de tout bon "Hate-Watcher" qui s'empressera alors d'en écrire une critique superbe dans son verbe et assassine dans son ton. Je me suis donc empressée de regarder le premier épisode et dans le coin inférieur droit, j'ai souri devant ce logo car qui d'autre pouvait se targuer de ce potentiel exquis que celui d'avoir les qualités suprêmes de ses défauts, d'être toujours si parfaite dans son imperfection.


Aujourd'hui, tatie Ingénieure vous sort du lourd parce que des séries comme ça, on n'en voit pas tous les jours. D'un simple coup d’œil expert, on sait dans les tréfonds haineux de son âme qu'on va passer un très bon moment à rire du moindre décors en carton, des épées en plastique et des costumes acheté dans une friperie et le tout sur une musique épique sa maman avec des plans paysage de toute beauté, à t'en faire chialer tes vacances dans le Mercantour quand tu vivais encore chez tes parents. Bref, un sacré bon moment. Même si tu le sens, jamais cette série ne reviendra car très peu en comprendront la portée dantesque de cette œuvre dans ces séries que tu aimes tant détester.


Mais avant de passer au plat de résistance, laissez moi remettre cette perle dans son contexte. En l'an 2018, la CW, chaîne hautement respectée pour sa capacité à produire dans une quantité presque industrielle, des séries B de facture relative destinées à un public jeune et dynamique comme des petits présidents français, bat de l'aile depuis quatre an, incapable de se remettre à la page. En dehors des spin-offs de ses séries phares et vieillissantes et l'exploitation ad nauseam de l'univers DC, il n'y a pas grand chose qui attire le chalant ou devrais-je dire la chalante dans ce cas. On assiste à l'agonie lente des meilleures séries, celles de l'an de grâce deux mille quatorze qui ne seront jamais oubliées par les vrais, ceux qui savent mais constatent tous amers, qu'elles disparaissent une à une dans la solubilité implacable du temps. Mais joie et bonne humeur puisque qu'il ne manque à The Outpost que la comédie musicale pour ramener toutes ces séries légendaires de la CW à la vie dans un mash-up étrange mais qui vaut certainement le détour tant il est stupide. C'est comme quand t'écoutes un gamin te convaincre que le père-noël lui a ramené un cadeau dans la nuit mais qu'au fond tu te souviendras toujours de ces trente balles que t'as dépensés dans un bout de plastique oubliable la semaine prochaine.


Concrètement niveau scénario, on est face à un certain niveau de médiocrité mais qui quelque part brille justement de cette aura de naïveté débonnaire, absolument persuadée que personne ne verra rien aux emprunts faciles et autres """clin d’œil""" à la pop culture. Talon donc, est une jeune nightblo... blackblood avec des oreilles pointues qui vit dans un village tout mignon qui un jour se fait attaqué par ce qui semble être un Cardinal un peu zélé et ses méchaaaants généraux. Mais notre protagoniste parvient à s'échapper et jure de se venger, la mâchoire serrée et les yeux brûlants.
C'est à ce moment du pilote qu'arrive l'espèce de générique qui n'est en réalité qu'un titre fait sur Windows Movie Maker qui ferait rougir de nostalgie tous les fans incontestés de Xena et autre Conan, autrement dit là, mon amour pour les trucs merdiques fut comblé pour le reste de mes jours, d'autant plus lors des fameux crédits du cast dont la police d'écriture te rappelle ces bons après-midi à regarder des trucs bizarre à la télévision. C'était l'extase.


Je serais incapable de nommer une seule personne du cast, hormis peut-être un personnage secondaire joué par un acteur secondaire de The 100 et quelque part, comme dans la plus pure tradition de la chaîne, tu sens que la décision du casting s'est réglée aux détails anatomique plus qu'au talent. Ce qui est terriblement dommage car je m'étais habituée à mieux. Alors bon, pas mieux "digne d'un Emmy" mieux, juste un peu plus de qualité. Là franchement, il n'y en a pas un pour rattraper les autres. Ce ne sont pas de parfaits inconnus mais ils sont tous, mais tous, à la ramasse. Entre Talon qui suffoque tellement que tu te demandes ce qu'elle prend (ce qui trouvera, aussi étrange que ce soit, une réponse dans l'épisode 2 ou 3), son prince charmant en armure dont le jeu retranscrit assez bien finalement l’inutilité d'un tel personnage autre que celui de faire-valoir relationnel et la copine de ce même prince charmant qui au fond, devrait sûrement être l'héroïne de ce bourbier tellement elle a plus de classe que tout le reste. Ce qui, pour une proto-féministe médiévale en haut de sa basse-cour sociale qui n'a d'ailleurs jamais fais quoi que ce soit autre que naître pour obtenir sa place de nantie, est en soi assez révélateur de la qualité globale du truc.


Car si cela ne vous était pas parvenu à l'esprit, The Outpost est une série de fantasy que nombres de critiques acerbes comparent à The Shannarah's Chronicle de MTv ou pour les plus fous à Game of Throne de HBO. Cette dernière comparaison peut prêter à sourire tant elle est absurde mais la première me semble révéler un symptôme récurrent de la fantasy à destination d'un public jeune.


The Shannara's Chronicles a réalisé en son temps les mêmes audiences à peu de choses près que The Outpost, c'est-à-dire un petit million de curieux pour les premiers épisodes avec une légère chute en dessous de la barre du million. Clairement ce qui départage les deux séries est clairement le soin apporté à la réalisation qui, il faut l'admettre à de la gueule pour la première et est risible au possible pour la seconde. Démontrant alors que ce n'est pas tant un problème de réalisation mais certainement plus un problème d'écriture. La fantasy est un genre qui a souvent séduit les adolescents à travers sa forme littéraire plus que par sa forme cinématographique. Autrement dit, ma génération a peut-être lu Eragon mais peu ont apprécié le film et de toute façon, à mes 16 printemps, je regardais déjà Game of Throne donc qu'est-ce que je pourrais bien trouvé de plus dans une série low-cost ? Il y a des exemples de séries d'apparence repoussante et qui pourtant se révèle plus subtiles qu'on les aurait cru capables mais visiblement ce temps-là n'a pas encore été atteint dans ce sous-genre de niche.


Et pour les petits malins qui compare The Outpost à The 100, franchement, on est vraiment très très loin du compte. The 100 est clairement plus marqué science-fiction et anticipation, ce qui évidemment ferait crier les puristes puisqu'en soi, The Shannara's Chronicle se déroule dans un futur apocalyptique où par un effet d'évolution, on abouti au tryptique "racial" favori de la fantasy. Mais là où il découle une histoire fantastique dans SC, The 100 reste toujours fidèle à son genre de prédilection et bénéficie par conséquent d'une palette de problématiques plus concrètes et tangibles car reposant sur la science autant humaine que technologique couplé à une qualité d'écriture sans précédant sur la chaîne. Ce qui confère à The 100 une audience plus stable mais surtout plus engagée autours de la série. Le scénario est bien trop souvent ce qui fait défaut dans le fantastique à destination des jeunes, peut-être par peur d'être trop complexe ou par incapacité dans le format et le budget à proposer un contenu plus dense et plus ambitieux, ce qui est l'avantage de Game of Throne par exemple, qui bénéficiant du cadre de diffusion des networks payants, peut élargir et étendre son histoire sur des heures et des heures, prenant le soin de développer des univers plus engageants et des personnages plus profonds et nuancés.


Mais The Outpost part dans tous les sens comme pour ouvrir le plus de storylines possibles afin d'attiser la curiosité du spectateur qui se serait par mégarde égaré sur sa toile. Des démons, de la magie, des prophéties, des familles au pouvoir, une équipe de protagonistes aux bras cassés, des punchlines et des combats aussi lourds que malaisément longs, des vieux mentors barbus et des polygones amoureux où la jalousie trouve un terreau fertile. Bref, la formule magique pour une bonne série de merde mais dans laquelle tu ne peux pas faire autrement que levé les yeux au ciel et faire un bon jeu à boire autours de tous les clichés invoqués (bon, ne le faites pas, je risque d'avoir votre coma éthylique sur la conscience au bout du deuxième épisode). En fait, je crois qu'il aurait pu y avoir quelque chose d'ambitieux dans cette série. Un truc qui accroche un peu, une storyline un peu mystérieuse propice aux théories, plus de contexte et moins de "Tiens voilà le parchemin, maintenant tu dois te rendre à pour te confronter au grand méchant de l'Ordre Premier".


Cette croyance dévote en la qualité de ce que l'on produit sous le regard rieur du spectateur me fait comprendre pourquoi certain aime la télé réalité quand d'autres trouvent leur bonheur dans des séries médiocrement bonnes.

Thepunkowl
4
Écrit par

Créée

le 11 sept. 2018

Critique lue 3.8K fois

9 j'aime

Engy Near

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9

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