Sex and the Series
7.5
Sex and the Series

sérieOCS (2017)

Avec Sex and the series, série documentaire diffusée en octobre sur OCS city, Iris Brey poursuit son travail universitaire sur la représentation de la sexualité féminine sur le petit écran. Une analyse riche et bienvenue à l’heure où le sexe féminin est encore très rare à la télévision, surtout filmé par des femmes, raconté par elles.


Female Gaze


Dès le 5 octobre et tous les jeudis à 21h, OCS city diffusera la première saison de Sex and the series, une série documentaire de six épisodes de 25 minutes, réalisée par Iris Brey. Chaque épisode commence par un petit commentaire de la réalisatrice et universitaire Iris Brey : « Grâce à la multiplication de personnages de femmes complexes et décomplexées depuis les années 2000, les séries mettent en scène une pluralité de sexualités féminines, révélant nos désirs, nos peurs les plus profondes, nos fantasmes et nos tabous ». A travers les interviews des showrunnneuses, mais aussi actrices et plus rarement acteurs, Iris Brey décortique, comme elle l’avait déjà fait dans son livre Sex and the series, la représentation de la sexualité féminine à l’écran. Il est de bon augure de voir cette analyse et ses figures féminines trouver leur place sur OCS, bien qu’en 2017, personne n’ait encore retenté le coup de poker qu’était The L Word, qui racontait la vie de lesbiennes à l’écran, sans tabou et filmait des femmes prendre le pouvoir sans concession. Ces séries nous ont accompagnés et l’analyse qu’en fait Iris Brey avec celles qui ont participé à leur création et diffusion, permet d’enrichir le regard porté sur la sexualité féminine mise à nue sur le petit écran. On y voit des petites révolutions, des maladresses, des tabous qui tombent et la volonté de parler de sexualité, pour parler aussi d’identité. Souvent, les héroïnes se construisent sous nos yeux, en même temps qu’elles dévoilent ou découvrent leur sexualité, qu’elle soit bisexuelle, homosexuelle ou hétérosexuelle. C’est la complexité des représentations, la manière dont les créatrices s’entourent d’autres femmes pour écrire, raconter leurs histoires, les transposer à l’écran qui en fait des séries fondatrices et passionnantes. Grâce à Iris Brey, le spectateur entre véritablement dans les coulisses de la fabrication des séries et dans les réflexions qui ont animé les créatrices, scénaristes et monteuses au moment d’écrire, de filmer, de monter. D‘un questionnement sur la représentation d’un viol, du refus de la nudité par une actrice au désir de rendre « sexy » des scènes de sexe entre femmes, tout est abordé par Iris Brey et ses interviewées.


Retour sur les séries abordées par Sex and the series


Transparent de Jill Soloway


Synopsis : Un père réunit ses enfants, Ali, Joshua et Sarah, pour parler de l’avenir. Pensant en premier lieu qu’il serait question d’héritage, tous les trois sont surpris d’apprendre qu’il s’agit en fait d’une révélation qui risque de bouleverser leur vie : il a décidé de changer de sexe !


C’est à travers le personnage de Maura, un homme qui décide de devenir femme, que la série est ici analysée. Le choix d’un acteur non transsexuel pour interpréter Maura a pu être contesté, mais Jill Soloway a su très vite s’entourer de scénariste et réalisatrice trans afin d’affiner le regard sur Maura, mais aussi de prolonger la représentation des femmes trans et de leur sexualité. Iris Brey revient sur la série entourée de Jeffrey Tambor qui interprète Maura dans la série, Trace Lysette, actrice trans et Our Lady J, scénariste dès la saison 2 de Transparent.


Girls de Lena Dunham


Synopsis : L’entrée dans la vie active de quatre jeunes filles d’une vingtaine d’années, de leurs humiliations à leurs rares triomphes. Hannah, l’éternelle stagiaire, rêve de devenir écrivain ; Marnie, sexy et un peu garce sur les bords, ne manque pas d’ambition; et Jessa, hippie dans l’âme, aimerait gagner sa vie de son art…


C’est Marnie, la meilleure amie d’Hannah (jouée par Lena Dunham) qui est à l’honneur de cet épisode. Iris Brey revient avec l’actrice Allison Williams et l’acteur Alex Karpovsky sur les relations sexuelles complexes de Marnie . En évitant soigneusement une nudité trop frontale, Allison Williams parvient à faire de Marnie une femme en pleine construction, qui ose tout dans le sexe, sans pour autant perdre son identité. Les témoignages des deux acteurs sont complétés par ceux de deux réalisateurs-trices : Richard Shepard et Jamie Babbit.


Masters of sex de Michelle Ashford


Synopsis : Dans les années 1950, le troublé et taciturne Dr William Masters s’associe avec une jeune mère de famille, l’indépendante et libérée Virginia Johnson, afin de mettre au point une étude complexe et détaillée sur le comportement humain et son rapport à la sexualité. Endossant le rôle de véritables pionniers dans ce domaine encore considéré tabou pour l’époque, ce duo hétéroclite va devoir braver les obstacles qui vont se mettre en travers de leur chemin. C’est sans compter sur leurs vies privées qui vont s’entremêler avec le temps : Masters doit gérer sa relation tumultueuse avec son épouse, la délicate Libby, tandis que Virginia doit jongler entre son statut de figure maternelle célibataire et ses dilemmes aussi bien professionnels qu’amoureux.


Si Virginia en vient à se marier avec son collègue à la fin de Masters of sex, ce n’est le premier paradoxe auquel l’héroïne se confronte. Elle passe du statut de simple secrétaire à celui de scientifique ayant révolutionné la connaissance de la sexualité humaine à travers une somme publiée avec le docteur Bill Masters. Son évolution est filmée en parallèle à celle d’une certaine révolution sexuelle, dont les répercussions sont toujours présentes aujourd’hui dans nos vies et le petit écran. Pour parler de ce bouillonnement intellectuel, mais aussi de désir et de masturbation féminine (parfois plus efficace qu’un coït plus classique), Iris Brey s’est entourée de Lizzy Caplan, l’actrice qui interprète Virginia, de la créatrice Michelle Ashford et de Thomas Maier, biographe de Virginia Johnson et William Masters.


Fleabag de Phoebe Waller-Bridge


Synopsis : La vie mouvementée d’une jeune londonienne prénommée Fleabag.


Cette série est sans nul doute la plus mouvementée et osée des 5 abordées par Iris Brey. D’abord one women show, Fleabag, du nom de l’héroïne, est devenu à l’écran le récit de la sexualité d’une jeune londonienne. Sans faire de chichi, la série aborde de front la sexualité de son personnage principal, sexualité qui est aussi une pulsion de vie. Pour commenter ce travail l’épisode fait appel aux voix et commentaires de l’actrice Phoebe Waller-Bridge, la productrice Lydia Hampson (car il est aussi question de moyens et de diffusion de ces séries!) et de la showrunneuse Vicky Jones.


The L Word de Ilene Chaiken


Synopsis : Fraîchement diplômée de l’université de Chicago, Jenny s’installe chez son petit ami, Tim, à Los Angeles où elle espère réussir dans l’écriture. Rapidement, elle fait la connaissance de Bette et Tina, un couple de lesbiennes qui vivent à côté. Une rencontre inattendue qui lui ouvre la porte vers un monde qui lui était jusqu’alors inconnu : celui de la communauté lesbienne.


On termine par la pionnière des séries sur la sexualité féminine. Il y a en effet un avant et après The L Word. C’est à travers les yeux de Jenny que l’on découvre la vie de ses femmes homosexuelles qui « boivent beaucoup de café et font l’amour ». Jenny représente la naïveté des débuts, la crudité de l’abus sexuel et la découverte du sexe libérateur, choisi et l’exploration sans limite de cette sexualité nouvelle et non subie. Mia Kishner qui interprète l’attachante Jenny à l’écran revient sur la création du personnage et ses multiples déboires. Elle est entourée de Jamie Rabbit, réalisatrice, Rose Toche, réalisatrice et Ilene Chaiken qui est à l’origine de The L Word.


Une analyse libératrice


Grâce à la série documentaire d’Iris Brey, sont réunies toutes les femmes qui osent enfin parler de sexe sans qu’il soit avant tout une performance et donc qui évoquent sans équivoque le désir féminin, le plaisir aussi. On découvre aussi combien The L Word a dû attendre le bon moment pour voir le jour, mais que ses successeurs en série se font encore attendre. La réflexion sur la sexualité féminine est aussi complexe et sans limite que les séries qui tentent de la représenter au mieux, avec des sensibilités particulières qui crient haut et fort que faire l’amour est aussi un acte de résistance !

eloch
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le 27 sept. 2017

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